Oeuvres complètes. Tome V. Correspondance 1664-1665
(1893)–Christiaan Huygens– Auteursrecht onbekendNo 1329.
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deuant que de pouuoir acheuer ma derniereGa naar voetnoot2). Je voy qu'il me reste a vous dire que J'ay les Obseruations MicroscopiquesGa naar voetnoot3) prestes pour vous enuoyer par le Sieur Guillaume Dauidson qui doibt partir dans peu de Jours. pource qui est du vaisseau du Cheualier Petty Mylord Brouncker et moy lauons esté voir ce matin. Ses Grands masts sont mis mais il ne sera pas encore preste pour vn voyage qu'il va faire encore de 3. ou 4. semaines. Nous ne sçauons encore rien dire de ses qualitez; mais vous en sçaurez ce que nous apprendrons. Quant a la Gazette des Scauants, Nous en auons veu un essay: mais on y trouue desia a redire. Vous dites bien que la chose pourra estre utile pourueu qu'on ne la gaste pointGa naar voetnoot4). Monsieur Oldenbourg nous a fait voir un eschantillon d'un semblable desseinGa naar voetnoot5) bien plus philosophique, et nous faisons estat de l'y engager, sil se peut faire. Jl ne se meslera pas des choses Juridiques ny Theologiques, mais outre les choses philosophiques qui nous viennent de delà la mer il publiera les experiences, aux moins les chefs, qui se font icy. mais ce ne sera quune fois le mois, en Anglois, et une fois en trois mois, en latin. Voyla tout ce que Jay a vous dire sur le suiet de vos precedentes. Je n'ay pas veu le Capitaine Holmes depuis qu'il m'a fait la relation de ses Horologes. Mais ilGa naar voetnoot6) depuis repeté la mesme chose a My Lord Brouncker. il estoit alors prisonier en la Tour. Jl en est maintenant sorty, mais Je ne scay point encore son logis. a nostre premiere rencontre Je pretends auoir de luy par escrit tout ce qu'il scait dire d'auantage de ses Horologes. Vous pouuez bien croire que toute nostre Societé a este rauy d'apprendre cette belle experience de ces Horologes. pour moy Je ne doubte plus qu'il ne donnent a connoistre l'heure qu'il est au lieu ou ils auront esté adiustez, qu'on ne la puisse sçauoir par aucun instrument ou inuention practique iusquicy sur mer, au lieu ou l'on est, soit par le soleil, soit par les estoiles &c. Au reste Je ne doubte nullement la veracité de Holmes: neantmoins, comme en me racontant l'histoire de lexperience qu'il a faite, il sen raportoit aux Capitaines et Maistres des autres 3. vaisseaux qui estoyent en sa Compagnie Je pretends sçauoir deux le plus tost que Je puis, si toutes choses se sont paslees precisement comme il nous les a racontees. J'approue ce que vous auez fait touchant les horologes. Ce que vous en auez dit en termes Generaux est audelà de toute exception. Mais Je pretends faire inserer cette experience tout au long dans lhistoire de nostre SocietéGa naar voetnoot7) qui est maintenant dans la presse, apres lauoir bien examinee. | |
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Jl me semble que le prix dont parle Vostre HorologerGa naar voetnoot8) est bien au delà de la raison, si ce n'est que vostre nouuelle addition rend l'ouurage beaucoup plus grand, et plus difficile. Icy Je croy que nous les aurons bien pour 15. ou 16. pieces Livres Sterling, la piece tels que nous auons faits. Mais aussi tost que J'auray receu l'horologe que vous m'allez enuoyer, Je scauray bien tost a quel prix on les fera icy. Ce qui rend le prix si considerable est, que pour un long voyage il est fort necessaire que chaque Nauire en aye deux, pour preuenir les accidents qui pourront arriuer. et on aura quelque peine a resoudre a donner 5. ou 600. francs pour un couple de ces Horologes. Toutesfois quand leur utilite sera bien connue, peut estre ny trouuera t'on pas tant de difficulté quau commencement. pour ce qui est de la somme que les Horologeurs doiuent donner pour le priuilege den faire; il me semble que les 30. francs que vous nommez, par piece, est fort raisonable principalement sils sont si chers, comme vous dites: car ce n'en est que la dixieme partie. Je traitteray icy aussi auec quelques Maistres pour voir ce qui sy peut faire, quant J'auray receu celuy que vous destinez pour moy. Jescriray si plaist à dieu à Monsieur lAbbé de BeaufortGa naar voetnoot9) lundy prochain comme vous me conseillez. il est en bon credit a la Cour, et a des habitudes auec les honestes gens, et J'entreprends de lengager d'agir dans l'affaire selon qu'il sera concerté entre luy et Monsieur Vostre pere comme si cestoit pour son propre frere. Nous ne sçauons rien icy du depart de Monsieur DowningGa naar voetnoot10). toutesfois Je luy escriray deux lignes quand celle cy sera acheuee pour le prier de se charger de lHorologe que vous luy mettrez entre les mains, en cas que vous ne me l'ayiez enuoyé par quelque autre voye deuant qu'il parte. Je n'ay jamais ouy parlé que Monsieur Hobbes ait rien fait impriméGa naar voetnoot11) contre Monsieur Sluse. Je le demanderay pourtant a son libraireGa naar voetnoot12) a la premiere commodité si Je men puis souuenir, et puis vous en escriray derechef. Monsieur Auzout nous a enuoyé icy quelques copies de ses Ephemerides du Comete. Je crois qu'il se trouuera qu'il se sera mepris en plusieurs choses. mais comme Je vous ay dit dans ma derniereGa naar voetnoot13) Je n'en veux rien dire en particulier, que Monsieur Wren n'ait acheué la tasche qu'on luy a imposee, de tirer toutes | |
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les conclusions qu'il pourra de toutes les obseruations qu'on luy a mises entre les mains, seulement vous diray Je qu'il est desia dauis comme vous que le Comete est entre nostre orbe et celuy de Mars. Mardy dernier on l'a veu icy encore mesme sans lunette d'approche: mais moins claire quune estoile de la 5e magnitude qui l'egale aussi en grandeur. Vn Duc de BrunswickGa naar voetnoot14) qui est icy nous a fait l'honneur de se trouuer en nostre AssembleeGa naar voetnoot15) et de signer son nom dans nostre liure. le Grand Chancelier d'AngleterreGa naar voetnoot16) y a aussi mi le sienGa naar voetnoot17) et les autres de plus haute qualité tant seculiers quecclesiastique le feront aussi dans peu de iours. Maintenant que J'ay acheué tout ce que J'auois a vous dire, Je men vay vous rendre comte de 2. ou 3. belles et nouuelles experiencesGa naar voetnoot18) que nous auons faites dans nostre Assemblee ces iours passez. Monsieur Hook a dans son liure, que Je n'ay pas seulement le loisir de regarder presque, auance une Hypothese qui semble d'abord estre bien bigearre; C'est que l'Air est un Menstrue lequel estant apliqué aux corps combustibles lors que le feu si est pris les consume de la mesme façon que les eaux fortes font les metaux &c. (Si je ne mexplique pas dans ses propres termes nimporte pas, pourueu que vous entendiez ce que Je dis) Cest a dire qu'une certaine quantité d'Air fait bruler la matiere conbustible estant une fois allumee, iusqu'a ce que toute sa vertu ou force menstruale soit consumee: tout comme les eaux fortes dont une certaine quantité dissoudra une certaine proportion du metail qui y sera mise, mais apres cela n'en sçaura dissoudre un grain d'auantage. Vous pouuez croire qu'on s'est bien opposé a cette opinion mais comme nous ne disputons gueres si ce n'est touchant les experiences, et comme il suggeroit qu'elles seroyent toutes pour luy, on en a proposé quelques unes. Pour faire comprendre ce qu'il vouloit dire il nous a fait voir une experience bien ordinaire. Jl prist une lampe, et l'enfermant dans un phiole capable de tenir 6. ou 7. liures d'eau, en peu de minutes la lampe s'est esteinte, luy affirmant qu'elle a brusle tant que le Nitre ou autre semblable matiere qui est contenu dans l'air, a duré, et que ce n'est pas ni la fumee, les vapeurs ny autre chose qui procede de la matiere qui estoit dans la lampe, qui lait estouffee, mais que l'air es- | |
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tant effete, et ne pouuant agir d'auantage sur la matiere combustible dans la lampe le feu et la flame qui sy estoyent prins se sont esteints. La dessus quelqu'un a dit que si l'air dedans la phiole estoit agité ou que la matiere bruslante fust secouee dans la phiole elle ne s'esteindroit pas, premierement il prit des charbons tous brulants, les pendit dans un spiral conique qu'il auoit fait de fil de fer, dans la phiole en sorte que l'air au dedans nauoit point de communication auec celuy de dehors, puis le laissant en repos, on conta en combien de minutes et secondes le feu sen est esteint. apres on y en remit dautre charbons vifs, et tout estant fermé il secouä la phiole en sorte que les charbons bransloit comme une pendule, et toute chose considerees on demeura satisfait que cette agitation ne prolongea point la duree du feu qui s'esteignit comme en mesme temps que lors qu'il estoit en repos. Mais la seconde experience fust bien plus belle et sembloit fauoriser beaucoup son Hypothese, elle estoit telle. Jl fit une boëte de bois ayant trois pieds de long et un pied en quarré, ayant deux grands vitres aux deux costez de 9. ou 10. poulces en quarré lun opposé à l'autre. il y plaça un pair de souflets, chargez d'un grand poids de plomb posez en sorte que la bouche estoit planté iustement contre cet instrument de fil de fer qui contenoit des charbons tout ardans, et lors que la boete estoyent bien fermee, ayant les charbons et les soufflets enfermez au dedans, on pouuoit faire agir les souflets par le moyen d'une petite corde ou ficelle qui passoit à trauers le desus de la boete. premierement on laissa esteindre de soy mesme les charbons, et l'on remarqua en combien de temps cela se fit: apres on y en remit dautres charbons comme auparauant, et apres un peu d'attente on fit iouer les soufflets. au commencement ils firent luire le feu plus clair qu'il n'auoit fait en le secouant bien bien fort: mais petit a petit l'effet des soufflets deuint foible et à la fin toute la force des soufflets ne faisoit autre chose que secouër comme auparauant les charbons qui commencoyent a mourir quoy quils paroissoyent encore rouges, et dissiper les cendres qui estoyent sur les dehors des charbons sans en façon quelconque faire rougir le feu plus qu'il ne faisoit de soy mesme: et a la fin le feu s'est esteint malgré les soufflets en mesme temps ou peu sen falloit qu'auparauant. On repeta cette experience plusieurs fois et en plusieurs facons, une fois ou deux, apres que le feu ne paroissoit plus dans les charbons quelque fort qu'on souffloit, on ouürit un bout de la boete pour laisser entrer de lair frais, et aussi tost les soufflets firent reuiure les charbons comme d'ordinaire. Enfin tout le monde demeura fort satisfait de l'experience, quoy que la pluspart croyeit, (et croit encore), que ce phaenomene se peut bien expliquer par d'autres Hypotheses. Mais quelquun ayant dit qu'entre autres causes de lextinction du feu aux charbons ou de la flame de la lampe on pourroit alleguer que la chaleur engendré dedans la phiole, et la Boëte, par le feu qui estoit enfermé, ayant bien fort estendu l'Air qui y estoit, l'air pouuoit auoir esteint le feu par le moyen de sa seule com- | |
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pression: surquoy on proposa qu'il se fit une experience, d'une lampe allumee et enfermee dans nostre grande Machine faite pour y comprimer l'Air. Aussi tost toutes choses estant aprestees on enferma une lampe dans la machine: et puis l'y laissant en repos elle sesteignit dans 4. minutes ou enuirons. puis l'ayant ralumee comme auparauant, on y poussa de l'Air frais par le moyen de la pompe qui sert a cette fin, sans qu'il en sortit le moindre soufle, en un mot, on continua a y pomper de l'air 18. minutes durant, iusqu'a ce que l'operateur qui trauailloit n'en pouuoit plus, et la lampe continua a brusler comme au commencement. on repeta cette experience plusieursGa naar voetnoot19) et tousiours auec pareil succez. Cette experience en produisit une autre tout contraire. on mit la lampe dans la Machine fait pour lexsuction de l'air, et apres l'y auoir enferme (sous la premiere phiole) elle sesteignit en 44. secondes ou enuirons: apres estant rallumee et remise comme auparauant, au troisiesme coup de la pompe elle sest esteint, et dans la moitié du temps. la flame saffoiblissementGa naar voetnoot20) comme par saut, lors que le Robinet laissa sortir l'air. On pretend encore den faire bien d'autres sur ce suiet. Je crois que vous ne serez pas mal satisfait que Jaye este si heureux que de nestre point interrompu cette fois icy, et moy Je n'en suis pas marry. toutesfois Je noserois entreprendre de relire ce que Je viens descrire de peuGa naar voetnoot21) que Je ne sois interrompu deuant que Je puisse escrire deux lignes a Monsieur Downing. C'est pourquoy vous aurez la peine accoustumee de deuiner ce que J'ay voulu dire lors que Je mexplique mal, ou que Joublie quelque mot, comme Je fais presque toutes les fois que J'escris mesme sans me presser. Je suis autant qu'ame viuante le peut estre
Monsieur Vostre treshumble tresobeissant et tresaffectionné seruiteur R. Moray.
Voyez Monsieur Downing.
A Monsieur Monsieur Christian Hugens de Zulichem A la Haye. XX β 2. |
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