Oeuvres complètes. Tome V. Correspondance 1664-1665

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N^o 1349.
J. Chapelain à Christiaan Huygens.
10 mars 1665.

La lettre se trouve à Leiden, coll. Huygens.
Elle est la réponse au No. 1337. Chr. Huygens y répondit par le No. 1361.

Monsieur

Comme vous me tenés tout a fait au coeur et que je regarde tous vos interests comme les miens propres je n'ay pu voir le succes de vos Pendules pour les Longitudes sans vne extreme joye et sans vous la tesmoigner auec empressement. Je n'ay pu m'empescher mesme d'en informer le Public par l'occasion de ce Iournal¹⁾ que M. Salo ce Conseiller habile de mes Amis nous donne chaque semaine depuis deux on trois mois et qui est le plus commode moyen pour communiquer aux Curieux les nouueautés des belles lettres et pour rendre justice aux Ouurages et aux Autheurs de consideration. Quant au particulier de cette admirable Inuention des longitudes j'auois bien creu en la respandant par toute la France que vous n'en seriés pas marri et que la gloire qui vous en reuient ne vous seroit pas desagreable. Mais je ne scay comment il s'est fait que dans lExtrait de vostre lettre on vous a presté des termes moins modestes que ceux que vous m'auiés escrits. Car au lieu qu'on vous fait dire que vous auiés explique vostre horloge a Messieurs les Estats auec beaucoup d'approbation vostre Original²⁾ que j'ay reueu porte simplement auec quelque approbation et sil estoit besoin de l'attester et de produire mesme la Piece je suis prest a le faire quand vous l'ordonnerés. Ie n'ay garde au reste de maintenir ma vision touchant cet instant de repos dans chaque vibration³⁾ qui me fut tressuspecte a moy mesme des le moment quelle me vint et j'acquiesce sans peine a ce que vous m'en dites maintenant, La chose nestant pas disputable entre de vrays physiciens. Ne soyés point fasche de la diligence que j'ay faitte pour estre eclairci du prix proposé par les Espagnols a l'Inuention des Longitudes. Cette enqueste se fera discrettement, et il n'ira point assurement du vostre. Cest moy qui vous en souhaite vn profit honneste et non pas vous, quoy que vous puissiés le souhaiter et le poursuyure sans vous faire tort puisque ce seroit a si bon titre. Monsieur Theuenot me fera voir cette Relation Hollandoise et je lexhorteray a la traduire. Ce sera vne chose aussi vtile que curieuse. Pour vostre nouueau Traitté de la Construction des Pendules je ne croy pas qu'on trouue a redire ches vous

1) Cette nouvelle a été publiée dans le Journal des Sçavants, 1665. N^o. VIII. Voir la Lettre N^o. 1335.

2) Voir la Lettre N^o. 1324.

3) Consultez la Lettre N^o. 1328.

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que vous le dediés au Roy qui vous a si noblement preuenu de ses graces, et qui vient tout fraischement de vous donner vne marque nouuelle de son estime par la concession du Priuilege que Monsieur vostre Pere luy a demande pour vostre Inuention, et je pense que le plustost sera le meilleur, pour marquer de vostre part vostre gratitude à Sa Majesté cela s'entend autant qu'il se pourra sans nuire a vos interests à l'egard des horlogeurs. Cette autre nouuelle descouuerte de la justesse de vos Pendules par sympathie est digne d'vne profonde speculation, et il ne se faudra point presser den assigner la cause à l'air ou a quelque autre chose que lon n'en soit tres assuré. I'ay annoncé cette merueille a nos Amis, et leur ay mesme communiqué l'auis que vous en auiés donné a Monsieur vostre Pere⁴⁾ pour vostre honneur, et on ne cesse point de l'admirer sans en pouuoir penetrer la raison. Vous nous l'exposerés en temps et lieu puisque vous la scaués. Ie retiendray cependant la main à Monsieur Salo, afin qu'il ne rende cette nouuelle publique que quand vous le permettrés⁵⁾. Iespere que vous ne le ferés guere attendre et il sera asses a propos de peur que sur quelque copie qui en peut auoir eschappé quel qu'vn doffice ne l'imprime.

Desormais que Monsieur vostre Pere ne sera plus icy quand vous me voudres faire lhonneur de mescrire toute autre commodité seure vous manquant vous pourrés prier Monsieur Vossius de mettre vostre lettre auec la sienne dans le paquet qu'il adressera a Monsieur Van Beuning qui me fera volontiers la grace de me la faire tenir. Ie vous exhorte a bien menager vostre sante et vous conjure de me croire tousjours inuiolablement

Monsieur

Vostre treshumble et tresobeissant seruiteur Chapelain.

De Paris ce 10 Mars 1665.

A Monsieur Monsieur Christianus Huygens de Zulikem. A la Haye.

4) Voir la Lettre N^o. 1335.

5) Consultez la Lettre N^o. 1352.