Les Bataves à la Nouvelle-Zemble, poème en deux chants, suivi de poésies diverses de Tollens, de Bilderdyk et du traducteur(1828)–Willem Bilderdijk, Aug. J.Th.A. Clavareau, Hendrik Tollens– Auteursrechtvrij Vorige Volgende [pagina 205] [p. 205] Colma sur le rocher. Il est nuit: je suis seule. Où fuir? ou me cacher Sur cette colline sauvage? Les vents sifflent.... J'entends mugir près du rocher Le torrent enflé par l'orage. Hélas! il n'est pour moi nul asile en ces lieux. Brillant flambeau des nuits, lève-toi dans les cieux! Qu'une bienfaisante lumière Me guide vers Salgar, Salgar que j'ai perdu! Sans doute maintenant, de fatigue abattu, Il goûte le repos dans un lieu solitaire, Et ses chiens haletans veillent à ses côtés. Et moi, je reste seule, errante, abandonnée! Malheureuse Colma, serais-tu condamnée A pleurer cette nuit sur ces monts écartés? Lebruit des vents s'accroît; le torrent roule et gronde; [pagina 206] [p. 206] Et je n'entendrai pas la voix de mon amant! O Salgar! que ta voix à la mienne réponde! N'ai-je pas reçu ton serment? Pour te suivre, j'ai fui mon père. J'ai tout quitté pour toi, tout! jusques à mon frère! Hélas! depuis long-temps, nos parens désunis Ont fait peser sur nous leur injuste colère; Mais Salgar et Colma ne sont point ennemis...... Vents, taisez-vous! torrens, n'étouffez plus mes cris: Peut-être à son amant Colma se fait entendre. Salgar! mon cher Salgar! t'ai-je en vain attendu? Salgar! oui, voici l'arbre où tu devais te rendre; Ici t'attend Colma; viens!.... Pourquoi tardes-tu? La lune lentement quitte les mers profondes; Son reflet argenté vacille sur les ondes, Et sa douce lumière éclaire le rocher. Salgar! n'entends-tu pas ta Colma qui t'appelle? O mon ami! ton chien fidelle Ne vient pas m'avertir que tu vas approcher. Gémis, Colma; gémis, infortunée; Tu restes seule, errante, abandonnée! Mais que vois-je? mon coeur a frissonné d'effroi. Est-ce toi, cher Salgar? ô mon frère! est-ce toi? Ils sont couchés sur la bruyère! [pagina 207] [p. 207] Leurs glaives sont rougis de leur sang! O mon frère! Pourquoi de mon amant as-tu tranché les jours? Salgar! pourquoi mon frère a-t-il perdu la vie? O malheureux effet d'une aveugle furie! Ils se taisent! hélas! ils dorment pour toujours! La glace de la mort pénètre dans mes veines. Sans espoir, seule au monde, au milieu de mes peines, J'attends le matin dans les pleurs. Venez, amis des morts, venez creuser la tombe; Mais ne la fermez pas: mourante de douleur, Colma viendra, Colma succombe. Lorsque sur ces lieux de regrets, Descend la nuit humide et sombre, Triste et plaintive alors s'élèvera mon ombre Pour pleurer ceux que j'adorais. Cessez, cessez votre murmure, Dormez, vent de l'automne, et vous, vagues, dormez; Dormez, ô douleurs sans mesure! Je finirai bientôt mes chants inanimés. Que ma faible existence un instant se prolonge; Le chasseur attentif écoutera ma voix, Pleurant, pour la dernière fois, Mes amis dont la vie a passé comme un songe! Vorige Volgende