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Poésies Diverses.
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Dévouement sublime.
Imité de Nanning.
Vers les bords du Helder, sur une aride plage,
Où des sables mouvans assiégent le rivage,
Non loin de cette mer dont les flots effrayans
Menacent d'engloutir dans leurs grondans,
Cette terre, autrefois arrachée à leur rage,
Des enfans de Batton glorieux héritage,
Entassé dans l'arène où croît l'humble roseau,
Apparaît de Huisduin le modeste hameau.
Là, sous des toits épars, protégés par la dune,
Quelques humains livrés aux fureurs de Neptune,
Au sein de l'indigence, isolés, sans secours,
Sous le joug du destin comptent leurs tristes jours.
Hardis navigateurs, dès leur tendre jeunesse,
Ils bravent l'Océan qu'ils sillonnent sans cesse,
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Et, pleins d'humanité, simples et courageux,
Gardent fidèlement les moeurs de leurs aïeux.
Dans ces sauvages lieux qu'habitent les alarmes,
La nature oublia de répandre ses charmes:
On n'y voit point les prés, de leurs tapis de fleurs,
Étaler aux regards les riantes couleurs;
Le sol ingrat et sec, rebelle à la culture,
Partout languit sans vie et s'offre sans parure.
Seulement, vers le soir, lorsque l'astre du jour,
Lançant ses derniers feux, va terminer son tour,
Son disque avec éclat embrasant l'Empyrée,
Descend majestueux dans la plaine azurée:
Alors, nos yeux émus s'attachant sur les flots,
L'Imagination, de ses riches pinceaux,
Nous retrace ces temps où, conduits par la gloire,
Nos aïeux à leurs mâts enchaînaient la victoire;
Alors, comme enchantés, et chers à notre coeur,
Ces rivages déserts dépouillent leur horreur.
Là souvent, sur ces bords, guidés par l'espérance,
Une épouse et son fils se rendent en silence.
Leur amour inquiet interroge les mers,
Et semble errer au loin sur les gouffres amers.
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Tout-à-coup, un esquif, dans la vaste étendue,
Comme un point incertain se présente à leur vue;
C'est un père, un époux que le ciel protecteur
Va rendre à sa familie, à la joie, au bonheur!
Il s'approche; le vent, sur son aile rapide,
Porte déjà sa voix à leur oreille avide.
L'absence, les douleurs, les craintes, tout a fui;
Leur coeur impatient vole au devant de lui.
Il touche enfin la rive; et, transporté d'ivresse,
Il revoit les objets de toute sa tendresse.
Dans sa reconnaissance, il regarde le ciel;
D'un moment aussi doux rend grâce à l'Éternel,
Et, pressant dans ses bras et le fils et la mère,
Regagne sa cabane où l'attend son vieux père!
Mais ces touchans tableaux et ces groupes joyeux
Ne s'offrent pas toujours sur ce sol malheureux,
Écoutez! l'ouragan, tyran des mers profondes,
Avec un bruit affreux bouleverse les ondes,
Et le sinistre effroi, les noirs pressentimens
De funèbres tableaux viennent remplir les sens.
Des élémens fougueux l'épouvantable guerre
Se joint avec horreur aux éclats du tonnerre.
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De nuages épais l'horizon s'est voilé:
Tout tremble, tout frémit sur ce bord désolé.
La mer, la mer terrible, en mugissant de rage,
S'agite, se soulève et frappe le rivage.
Jusqu'aux cieux élancés, ses bouillons en courroux
Ébranlent ses remparts de leurs horribles coups.
Des torrens désastreux déjà couvrent la plaine,
Et du pâle habitant ravagent le domaine.
Tous quittent leur asile; et Neptune vainqueur
Leur dispute ces champs ravis à sa fureur.
O scène déchirante! ô spectacle effroyable!
Partout des pleurs! partout la mer impitoyable
Entraînant du hameau les fragiles débris!
De ces infortunés entendez-vous les cris?
Il semble que les vents et les flots et l'orage
Menacent l'univers d'un éternel ravage.
Le tonnerre redouble; et la voûte des cieux
S'embrase et n'offre plus qu'un océan de feux!
Quel lugubre crayon nous peindra l'épouvante,
Comme un spectre hideux sur ces rives errante?
Quel talent énergique et quels sombres pinceaux
Montreront à nos yeux, triste jouet des eaux,
Le malheureux pilote en butte à la tempête,
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Bravant le feu du ciel qui gronde sur sa tête?
Qui peindra ses regrets, son effroi, ses combats?
Dans sa barque entr'ouverte il attend le trépas.
Qui pourra retracer sa fatale agonie,
Hélas! lorsqu'à l'aspect de sa chère patrie,
De fatigue épuisé, cédant aux coups du sort,
Dans l'abîme orageux il vient mourir au port?
Ah! loin de moi l'horreur que ce speetacle inspire!
Un plus noble sujet vient réveiller ma lyre.
Quels que soient les dangers et la fureur des vents,
Quand un vaisseau, battu par les flots dévorans,
Doit sur nos bords amis succomber au naufrage,
Le matelot respire et sourit au rivage.
Il sait que le Batave, intrépide nocher,
Aux plus affreux périls osera l'arracher,
Et que de nos aïeux la généreuse race
N'a point dégénéré de vertus et d'audace.
Au milieu des écueils, sous la faux de la mort,
Il songe aux Narebouts, il redouble d'effort,
Et plus calme, implorant la céleste justice,
Regarde, plein d'espoir, la rive protectrice!
Gloire de ma patrie, éclatez dans mes chants!
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Oui, la vérité seule inspire mes accens.
Huisduin, de tes héros les exploits mémorables
Sont gravés dans les coeurs en traits impérissables;
Lieu célèbre à jamais, redis-moi leurs vertus:
Que dans tout l'univers mes chants soient entendus!
Redis-moi leur courage et leur trépas illustre;
A leurs faits immortels ajoute un nouveau lustre;
Que la postérité, fière de leur spiendeur,
Avec un noble orgueil admire leur valeur!
L'Été ne régnait plus. L'impétueux Borée
Parcourait en vainqueur l'empire de Nérée,
Et la mer, chaque jour funeste aux matelots,
Dans ses gouffres roulans dévorait des vaisseaux.
La fatale saison qui désole nos plages,
Avait déjà partout étendu ses ravages;
Dans l'ombre de la nuit la foudre avait grondé;
Le nocher frémissait sous son toit inondé,
Et des vents déchaînés l'haleine courroucée
Redoublait sur ces bords l'épouvante glacée.
L'éclair étincelait; du choc des élémens,
La terre avait senti de longs ébranlemens;
L'habitant à genoux, dans ce malheur extrême.
Pâle et le front baissé, priait l'Être-Suprême.
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Soudain, frappant les airs, le sinistre tocsin
Se mêle au triple coup du redoutable airain.
Il se lève, il s'écrie: ‘un naufrage! un naufrage!
Dieu! calme ta colère et sauve l'équipage!
Compagnons, au secours!’ A pas précipités,
Il vole, en frémissant, vers ces lieux dévastés,
Et son oeil, sur les flots, à travers les ténèbres,
Voit des infortunés poussant des cris funèbres.
Brisés par l'ouragan, deux vaisseaux entr'ouverts
flottent sans gouvernail à la merci des mers.
Le pilote éperdu, succombant de faiblesse,
Arbore, plein d'effroi, le signal de détresse.
Le peuple du hameau, rassemblé sur le bord,
Veut ravir ces nochers aux horreurs de la mort:
Vain espoir! quel secours, quelle humaine puissance
Pourraient des élémens dompter la violence?
Hélas! de nouveaux cris, prolongés sur les eaux,
En lamentables sons ont frappé les échos,
Et le souffle d'Éole en vain a, sur nos rives,
Murmuré les accens de leurs voix fugitives.
Que dis-je? juste ciel! le sol de nos aïeux
Ne produirait-il plus de héros généreux?
Ah! malgré le danger, la mort qui le menace,
Rien ne peut du Batave intimider l'audace.
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A l'instant, un seul cri fait retentir les cieux:
Des barques! du secours! sauvons ces malheureux!
Vingt braves, à ces mots, dans le soin qui les presse,
Élancés vers Huisduin disputent de vitesse.
Traîné par des chevaux, l'esquif libérateur
Arrive, et va des mers affronter la fureur.
On s'embarque: la rante a sillonné les ondes.
Tantôt, précipité dans les vagues profondes,
Le bateau disparaît; et tantôt aperçu,
Sur la cime des flots il reste suspendu.
Inutiles combats! le reflux les ramène.
Lorsque tout doit périr, que peut la force humaine?
Les avirons brisés, échappés à leurs bras,
Sont au loin autour d'eux dispersés en éclats,
Et, près de succomber, nos héros magnanimes
Renoncent à l'espoir de sauver ces victimes.
Faibles jouets des vents, mais non pas ébranlés,
Ils regagnent le bord, vaincus et désolés.
Là, de froid engourdis, fatigués, tout bumides,
Ils arrachent leur barque à ces vagues perfides,
Et méprisant leurs maux, remplis de leurs projets,
Réparent leur esquif, remplacent leurs agrès.
Tout est prêt; et la mer que l'oragc arnoncèle,
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Reçoit en mugissant la fragile nacelle.
O comble de vertu! sublime dévoûment!
Chacun veut affronter le terrible élément.
Un généreux débat sur la rive s'engage,
Et seul de ces héros arrête le courage.
O siècles décédés! renaissez à ma voix;
De cent peuples divers montrez-nous les exploits.
Quel célèbre combat, quel illustre victoire
Fut plus digne jamais du burin de l'histoire?
Non; le marbre éclatant qui flatte les regards,
Ni l'immortel laurier qui brille aux champs de Mars,
N'enflamment point ici ces ames téméraires:
La seule humanité, le salut de leurs frères,
Voilà leur noble but; l'aveu de l'Éternel,
Voilà l'unique prix qu'ils attendent du ciel!
Mais entr'eux, à la fin, la lutte se décide.
Sept héros, les premiers qui, d'un coeur intrépide,
Ont tenté vainement d'audacieux secours,
Pour la seconde fois vont exposer leurs jours:
‘Déjà nous connaissons la fureur de l'orage;
Laissez-nous, disent-ils, essayer l'abordage.
Cette gloire est à nous!’ Sur l'abîme, à ces mots,
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S'élancent, pleins d'orgueil, ces courageux rivaux.
L'ouragan est dompté. Ciel! avec quelle joie,
A l'avide trépas ils vont ravir sa proie!
On suit la frêle barque; on espère, on frémit,
Et d'un cri prolongé la rive retentit:
‘Dieu puissant! sauve-les!.. Achève ton ouvrage!
Sauve-les!... Que ton bras les ramène au rivage!’
Huisduinois! regardez!.. Vers la voûte des cieux,
Que votre ame tremblante adresse tous ses voeux.
Voyez-vous ces héros, tout fiers de leur conquête,
S'avancer hardiment à travers la tempête?
Voyez comme la mer, par d'affreux tourbillons,
Les couvre tout entiers d'écume et de bouillons!
O ciel! elle s'entr'ouvre; et ses vastes abîmes
Vont peut-être à jamais engloutir ces victimes....
Non! le flot les relève; et soudain reparus,
Ils rendent l'espérance à nos coeurs éperdus.
On approche. Déjà, bénissant la fortune,
On semble triompher du courroux de Neptune.
On triomphe! ô destin! ô moment de bonheur!
Mais de nouveaux périls attendent leur valeur:
Il faut, il faut encor, sur la vagne indocile,
Tenter avec courage un retour difficile.
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Imagination! prête-moi des couleurs;
Viens m'aider à tracer ces sublimes horreurs.
Ah! je sens de mes doigts s'échapper ma palette:
J'admire, je frissonne, et ma bouche est muette.
L'Éternel les seconde. A coups précipités,
Leur aviron vainqueur fend les flots redoutés.
Dans l'invincible trouble où leur ame est livrée,
Ils regardent muets la rive désirée.
Après de longs combats, retour inattendu!
Aux bords qui semblaient fuir l'équipage est rendu,
Et de ces naufragés, Dieu! qui pourra le croire?
Onze enfin sont le prix de leur noble victoire.
Un murmure joyeux a passé dans les coeurs.
O spectacle touchant! l'oeil humide de pleurs,
A genoux sur le sol, ces victimes tremblantes
Élèvent vers le ciel leurs mains reconnaissantes.
Les femmes, les enfans, les pères, les amis,
Qui, du haut de la dune, alarmés, interdits,
Avaient vu ces héros, dans leur mâle vaillance,
Arracher à la mort sa barbare espérance,
Tous brûlent d'embrasser, de serrer dans leurs bras
Ces immortels vainqueurs des flots et du trépas.
Mais, ô désir trompé! rien n'arrête leur zèle.
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Sur le vaisseau brisé leur devoir les rappelle.
Inflexibles aux pleurs d'une épouse, d'un fils,
Leur stoïque vertu n'écoute point leurs cris.
Déjà sur l'Océan leur nacelle élancée,
Par le flux orageux loin du bord est poussée.
Leur voix, en s'éloignant, fait retentir ces mots;
‘Là-bas, d'autres encor vont périr dans les flots!
Là-bas, des malheureux nous demandent la vie!’
Ah! dans le désespoir dont leur ame est saisie,
Femmes, enfans, vieillards, sur la terre étendus,
Hurlent, en longs sanglots, leurs regrets superflus.
Dieu! quels cris déchirans! Écoutez cette mère:
‘Cruel! songe à ton fils... et si je te suis chère,
O mon unique appui! songe à moi!..’ Ses accens
Vers le fatal esquif sont portés par les vents.
Une voix lui répond: ‘femme, retiens tes larmes.
N'est-ce donc que pour toi que tu sens des alarmes?
Là-bas, j'entends aussi des pères, des époux
Que l'implacable mort menace de ses coups.’
Et soudain ces héros, redoublant de courage,
De leurs derniers adieux ont salué la plage.
D'abord, jouets des vents, élancés, engloutis,
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Ils attaquent en vain les gouffres de Thétis.
Mais leurs hardis travaux, leur sublime constance
Au but tant désiré guident leur espérance.
O valeur sans exemple! ô prodige éclatant!
Trois pilotes, ravis à leur tombeau flottant,
Sont reçus dans l'esquif..... Une clameur de joie,
De la rive à l'instant dans les airs se déploie.
Malheureux! les dangers ne sont pas tous vaincus.
D'un éclair de bonheur quand vos coeurs sont émus,
Peut-être cette mort que vous avez bravée,
Poursuit encor sa proie et vous est réservée.
Ah! ces joyeux momens tout-à-coup éclipsés,
Par un nouvel effroi sont déjà remplacés.
L'onde, en montagne humide, assiége la nacelle.
Et s'oppose avec rage à la rame infidelle.
Plus d'espoir de salut! le pâle matelot
Voit, glacé de terreur, la mort dans chaque flot.
Sa barque, succombant à la fureur de l'onde,
Descend et disparaît sous la vague qui gronde.
C'en est fait: ces héros luttent contre la mort,
Et nul humain pouvoir ne peut changer leur sort!
A cet affreux aspect, à cette horrible scène,
D'autres veulent tenter une assistance vaine.
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Sur l'avide élément un esquif est jeté:
On s'empresse, on s'embarque, on vogue épouvanté.
La foule, sur le bord, versant d'amères larmes,
Par de longues clameurs exprime ses alarmes.
Ici, crie un enfant; ici, dans les sanglots,
Une épouse se meurt sous le poids de ses maux;
Là, gémit un vieillard; le frère appelle un frère;
Le fils verse des pleurs et redemande un père!
Et cette mère, hélas! dont le gage d'amour
Renfermé dans son sein doit bientôt voir le jour;
O ciel! l'entendez-vous?... Sa mortelle tristesse
Exhale, en sons aigus, la douleur qui l'oppresse.
Plus loin.... Arrêtons-nous. Quel lugubre pinceau
Reproduira jamais ce déchirant tableau?
O Muse! retraçons le combat de ces braves,
L'honneur de la Patrie et l'orgueil des Bataves.
L'esquif qu'un frêle espoir fait voler sur les eaux,
S'approche de l'abîme où luttent nos héros.
Infructueuse audace! une vague barbare
De leurs libérateurs à jamais les sépare.
L'espérance un instant semblait luire pour eux;
Mais comme un traitrapide elle échappe à leurs yeux.
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Oui, vous succombez tous, ô mortels magnanimes!
La mer insatiable a saisi ses victimes.
De ce dernier combat qui nous peindra l'horreur?
O Dieu! je crois les voir. Je sens frémir mon coeur.
J'entends leurs derniers cris. Généreux, intrépide,
L'un d'eux que soutenait une vague livide,
Se soulève et s'écrie: ‘ô mon père! là-bas,
Périt un malheureux.... Sauvez-le du trépas....
Je puis lutter encor.’ Mais l'infortuné père
Lui répond d'une voix que la douleur altère:
‘Dévoûment superflu! mon fils! il est trop tard!’
L'épouvante a glacé le débile vieillard.
‘Adieu donc, dit le fils; adieu, vous que j'adore!
Dans un autre séjour nous nous verrons encore.
Ah! consolez les miens.. dites-leur..’ Mais ces mots,
A peine articulés demeurent sous les flots.
Il plonge et disparaît. En vain ce triste père
Se penche et veut lui tendre une main tutélaire:
La mer avec plaisir redoublant ses regrets,
Lui fait revoir son fils qui s'abîme à jamais.
Parlez, vous qui cherchez, dans les fastes antiques,
De glorieux exploits, des vertus héroïques;
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Quel nom donnerez-vous à ces faits éclatans?
Vous parcourez en vain les annales des temps:
Rome! Athènes! jamais, sur leur illustre terre,
A de plus grands héros n'ont donné la lumière.
Un d'entre eux, expirant, au rivage est rendu.
On le rappelle au jour: le reste a disparu.
Dans ces lieux où déjà s'étendent les ténèbres,
Redemandant aux flots ces victimes célèbres,
Des épouses en pleurs, d'innocens orphelins,
De leur commun désastre accusent les destins.
Déjà le sombre deuil, comme un fantôme pâle,
Nocturne déserteur de la nuit infernale,
Parcourt ces tristes bords et murmure aux échos
L'impérissable nom de ces dignes rivaux.
Vers l'éternel séjour, là s'éleva leur gloire;
Là, nous viendrons souvent honorer leur mémoire:
Pleins de reconnaissance, exhalant nos douleurs,
A leurs mânes sacrés nous donnerons des pleurs;
Nousdirons: ‘c'est donc là, dans cet immense abîme,
Qu'ont péri le courage et la vertu sublime!’
Ah! que les vents fougueux, que le noir ouragan
Rivalisant d'efforts soulèvent l'Océan,
Que d'autres mâts brisés soient jetés sur nos plages,
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Et nous verrons encore, affrontant ces ravages,
Ce père, qui d'un fils n'a pu sauver les jours,
Au nocher malheureux prodiguer des secours.
Héros trop élevés pour les sons de ma lyre,
Que l'humanité pleure et que l'honneur admire,
Oui, vos concitoyens, avec un juste orgueil,
Raconteront long-temps cette scène de deuil;
Et si votre renom, transmis d'âges en âges,
De l'univers entier n'obtient pas les hommages,
Si le modeste asile où vous avez vécu,
Sur la carte du monde est à peine connu,
Près du Dieu qui reçoit la vertu courageuse,
Vous reposez au port d'une vie orageuse.
A l'aspect de ces mers qui roulent leurs débris,
Vous, qui sentez des pleurs dans vos yeux attendris,
Marchez avec fierté sur la terre des braves:
Le sang de ces héros coule en vos coeurs bataves!
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