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L'Espérance.
Pourquoi veux-tu fuir l'Espérance,
Toi, qui gémis dans la douleur?
Est-ce elle, où ta folle imprudence
Qui détruisit, à leur naissance,
Les vains rêves de ton bonheur?
Toujours poursuivant tes chimères,
Tu formas de stériles voeux,
Et des images mensongères,
Comme des ombres passagères,
Ont fasciné tes faibles yeux.
Dans ton impatiente ivresse,
N'as-tu pas sondé l'avenir?
Séduit par une enchanteresse,
Ne t'es-tu pas créé sans cesse
Des jours filés par le plaisir?
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Sur la coupe, de fleurs ornée,
Où ton orgueil but à longs traits,
Tu crus lire ta destinée;
Mais la liqueur empoisonnée
Ne te laissa que des regrets.
Et quand la volupté t'abuse,
Quand le dépit sèche ton coeur,
Insensé, qu'une erreur amuse,
Dis, qui faut-il que l'on accuse
De nourrir ta fatale erreur?
Hélas! dans sa fièvre brûlante,
Combien un coeur novice encor,
Que le feu des désirs tourmente,
Peut aisément suivre la pente
Où l'entraîne un perfide essor!
Ici-bas, quand leur barque vole
Élancée au gré du hasard,
La plupart, nochers sans boussole,
Ne cherchent point l'astre du pôle:
Il est trop haut pour leur regard.
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Vois-tu, sur l'océan du monde,
Vois-tu ces feux irrésolus,
Qui naissent et meurent sur l'onde,
Et, dans la nuit la plus profonde,
Plongent les matelots perdus?
A peine une clarté trompeuse
Brille-t-elle dans le lointain,
Qu'au sein de la vague orageuse,
Livrant ta fortune douteuse,
Ta voile a disparu soudain!
Non, telle n'est pas l'Espérance:
Sa douce et paisible lueur,
Faible peut-être en apparence,
Aux regards de la confiance,
N'offre point un éclat menteur.
Ainsi, malgré le sombre orage,
Malgré les gouffres entr'ouverts,
Toi que sa lumière encourage,
Vogue, l'oeil tourné vers la plage,
Et brave le courroux des mers.
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Il se peut que, dans la tempête,
Ton faible esquif soit fracassé,
Qu'importe? que rien ne t'arrête:
Des feux qui grondent sur ta tête,
Ton flambeau n'est point éclipsé.
Mais si ton bras trop téméraire
Est la cause de tes malheurs;
Dédaignant une plainte amère,
Attends un destin moins contraire,
Et ne cache point tes erreurs.
Crois-tu qu'une fleur périssable
Ne doive jamais se flétrir?
Cette onde qui fuit sur le sable,
Crois-tu sa source inépuisable,
Quand un vase peut la tarir?
Pourquoi, d'une vaine fumée,
Vouloir toujours flatter tes sens?
Par les vertus légitimée,
Méprise un inutile encens.
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Pourquoi de frivoles richesses,
Attendre des plaisirs sans fin?
Faux espoir! stupides faiblesses!
Ce vil trésor que tu caresses
Est en butte aux coups du destin.
Pourquoi, dans un penchant volage,
Rêver les voluptés du ciel?
En secret quand l'amour t'engage
A savourer un doux breuvage,
La haine y vient mêler son fiel.
Illusions, bonheur, folie,
Tout fuit, tout passe avec le temps:
Plus fragile encor que la vie,
Le plaisir naît, brille, varie,
Et nous échappe à tous momens.
Mais toujours ferme, l'Espérance,
Indifférente aux jeux du sort,
De sa consolante influence,
Vient embellir notre existence,
Et nous conduire vers le port.
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D'un rêve d'amour doux symbole,
Elle est pour nous un don des cieux:
Ah! celui que sa voix console,
Peut s'endormir sur sa parole;
Elle ne fait que des heureux.
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