Oeuvres complètes. Tome IX. Correspondance 1685-1690

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N^o 2616.
Ph. de la Hire à Christiaan Huygens.
30 août 1690.

La lettre se trouve à Leiden, coll. Huygens.
Elle est la réponse au No. 2610.
Chr. Huygens y répondit le 16 novembre 1690 pas une lettre que nous ne connaissons pas.

A Paris a lobseruatoire le 30 Aoust 1690.

^a)Monsieur

Jattendois toujours a uous escrire que j'eusse receu les exemplaires de uostre traitté de la lumiere, mais apres tous les retardemens qui sont suruenus je ne puis encore me flatter de les auoir dans la semaine prochaine comme on me le fait esperer. M. le febure marchand libraire de l'Isle entre les mains de qui ils sont est uenu a paris, je luy ay parlé et il ma dit quil nauoit pu trouuer de commodité pour me les enuoyer car les uoituriers ne sen uouloient pas charger. Monsieur de la Reynie ma fait attendre longtemps son passeport¹⁾ et enfin il ma dit qu'il nen falloit point et que lon ne pouuoit pas arrester ny saisir ces sortes de liures. Enfin un marchand qui uient de lisle et qui doit arriuer icy dans 8 jours me les doit apporter: mais je ne comprens pas comment Mss. uos marchands nen enuoyent pas icy puis qu'ils trouuent bien le moyen d'y enuoyer des liures de M. de furetierre²⁾ lequel est deffendu, et celuy cy qui ne lest point ne trouueroit aucun empeschement: car toute la difficulté qui s'est trouuée, n'a esté qu'a cause que le pacquet nestoit pas assez gros pour estre donné a un roulier, et sils y en enuoyent ils en trouueroient tres bien le debit si uous rencontrez quelqu'occasion de me faire tenir une copie de uostre astroscopia je uous seray infiniment obligé mais ce sera a uostre commodité la uoye de la poste n'estant pas commode. Cependant cest par cette uoye que je uous enuoye la description que uous demandez, mais je ne laurois pas fait sans uostre ordre expres; car c'est trop peu de chose pour prendre cette uoye.

Il uient de paroitre un liure de Mons. de Varignon touchant la pesanteur³⁾ a qui il ne donne que le titre de conjectures il y a quantité de calculs dont il se sert pour ses preuves et entrautres il pretent contre les sentimens de Galilae et de Monsieur Mariotte, qu'un corps qui tombe dans l'air ne peut jamais acquerir une uitesse telle quelle ne saugmente plus. son calcul sur ce sujet me semble tres embarassé a cause

a) Respondu le 16 nov. 90 [Christiaan Huygens].

1) Voir la pièce N^o. 2590.

2) Voir la Lettre N^o. 2555, note 6.

3) Nouvelles conjectures sur la pesanteur par Monsieur Varignon de l'Académie Royale des Sciences, & Professeur de Mathèmatique au College Mazarin. A Paris, chez J. Boudet. 1690. in-12^o.

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dun trop grand nombre de suppositions: cela ma engagé de chercher si ce quil dit pouuoit estre uray: mais je trouue le contraire et je tombe dans le sentiment de Galilee; je ne scay pas encore si en poussant cette demonstration par les principes que j'ay supposez, j'auray lieu de me dedire. Tous nos messieurs a qui uous enuoyez des exemplaires de uostre traité uous remercient on continuë dans l'academie l'impression de lanatomie des animaux et comme lon reduit lancien uolume a une grandeur plus commode quelle nestoit les planches donnent de la difficulté a reformer, le grand nombre de dissections des mesmes animaux qui estoient dêja decrits a fourny plusieurs choses quil faut joindre et corriger dans les anciennes descriptions⁴⁾ on y en ajoutera un bon nombre de nouuelles qui sont faites auec un tres grand soin comme l'Elephant, le Crocodille &c. Il est arriué quelque retardement a nos ouurages de physique et de mathematique de la part de limprimeur et je ne puis me promettre quand louurage sera acheué. Monsieur Cassini continue ses tables des satellites de jupiter⁵⁾ et les nouuelles difficultez qui suruiennent dans leurs mouuemens ne luy permettent pas daller aussi uiste qu'on le souhaitteroit.

Jay proposé a Mr. Cassini de faire l'epreuue dune maniere de prendre assez commodement la difference de longitude de plusieurs lieux sur terre et nous en deuons faire lexperience au premier jour. Ce n'est que par la justesse de uos pendules que cela se peut executer car je suppose deux obseruateurs eloignez lun de l'autre de 15 lieues enuiron et placez dans deux lieux desquels ils puissent uoir un mesme lieu eleué entre deux. les deux obseruateurs feront leurs obseruations exactes pour connoitre parfaitement lestat de l'horloge, ce qui est facile a faire et en 3 ou 4 jours ou par le moyen du soleil ou par le moyen dune mesme estoile, ce qui doit estre le passage par le meridien, et mesme l'estoile sera plus commode que le soleil a cause quelle ne change pas sensiblement de declinaison. Ensuite on doit faire un signal, ou plusieurs de suite sur le lieu qui est entre les obseruateurs ou auec un drapeau blanc pendant le jour ou auec du feu pendant la nuit ce qui se peut executer en plusieurs manieres, et la difference du temps de lobseruation de ce signal par les deux obseruateurs donnera la difference de longitude. On pourroit par ce moyen trouuer la position de plusieurs lieux dune grande carte comme dun royaume en assez peu de temps et tres justement jay deja fait quelques epreuues de cette methode sur de petites distances et elle ma toujours tres bien reüssi.

Il uient aussi de paroitre une philosophie⁶⁾ de M. Regi⁷⁾ en 3 uolumes in 4^o en

4) Consultez la Lettre N^o. 2195, note 3.

5) Voir la Lettre N^o. 2568, note 5.

6) Systeme de Philosophie, contenant la Logique, la Metaphysique, la Physique et la Morale. Par Pierre Sylvain Régis. A Paris, chez Denis Thierry. 1690. in-4^o.

7) Pierre Silvain Régis, né à la Salvétat de Blanquefort dans l'Angenois, en 1630. Il étudia la théologie à Paris et devint un zélé partisan du Cartésianisme. Il habita successivement Toulouse, Montpellier et Paris. Ses conférences dans cette ville ayant été fermées par ordre de l'archevêque de Paris, il recourut à la presse pour propager ses doctrines et combattre les adversaires du Cartésianisme. En 1699, il fut admis à l'Académie des Sciences comme attaché géomètre. Il mourut le 11 janvier 1707.

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francois on ma dit que pour la logique il suiuoit assez exactement celle de Mss. de port Royal et que la physique qui en fait la plus grande partie est celle de M. Descartes quil a professée longtemps en languedoc a laquelle il a changé quelque chose et quil a commentée M. Ozanam fait un dictionnaire de Mathematique⁸⁾ a peupres sur la mesme idée de celuy de M. Felibien⁹⁾ pour les arts, et il est presqu'imprimé. Je resteray peu de temps a paris pendant ces uacances car je suis obligé de demeurer aupres de M. l'abbé de Louuois a sa maison de campagne, cependant comme je uiens toutes les semaines a paris j'y receuray les ordres quil uous plaira de me donner et je me feray un tres grand plaisir de les executer. Je suis

Monsieur

Vostre tres humble et tres obeissant seruiteur De la Hire.

8) Dictionaire Mathématique, ou Idée generale de Mathématiques. Dans lequel sont contenus les termes de cette Science, outre plusieurs termes des Arts & des autres Sciences, avec des raisonnements qui conduisent peu à peu l'esprit à une connaissance Universelle des Mathematiques. Par M. Ozanam, Professeur des Mathématiques du Roy tres-Chrétien à Paris. A Amsterdam, chez les Huguetan, 1691, in-4^o.

9) Sur André Felibien, consultez la Lettre N^o. 1655, note 5. On a de lui, entre plusieurs autres ouvrages, un ‘Dictionnaire des termes de peinture et d'architecture’.