Oeuvres complètes. Tome VI. Correspondance 1666-1669

[p. 130]

N^o 1589.
Christiaan Huygens à Lodewijk Huygens.
20 mai 1667.

La lettre et la copie se trouvent à Leiden, coll. Huygens.

A Paris ce 20 Maj 1667.

Ie n'ay escrit a personne par le dernier ordinaire n'ayant rien receu, dont le Signor Padre dit que la faute est au frere de Zeelhem¹⁾ et en effect j'attendois response²⁾ de sa seigneurie, l'ayant priè de m'envoier une attestation du secretaire de la Haye³⁾ et quitance pour faire recevoir mon revenu annuel de 100 ℔. Ie vous prie de luy en faire souvenir.

L'on m'apporta au commencement de cette semaine la perruque que j'avois commandee pour vous⁴⁾ mais n'estant pas bien faite a ma fantasie je l'ay renvoiée, et en verray une autre nouuelle dimanche qui vient⁵⁾.

Je vous remercie de la pierre mouuante. Elle sera exhibee demain en nostre assemblee, et vous scaurez ce qu'on en aura dit, et raisonnè; qui peut estre ne vous rendra pas plus scavant que vous n'estes. Il y a d'autres matieres qui produisent de l'air quand on y verse dessus certaines liqueurs acides, comme la poudre de corail et de caille d'huitre. C'est pourquoy il faudroit scavoir ou naissent ces pierres, pour veoir si elles ont quelque chose de commun avec celles, que je viens de nommer.

Je n'ay encore rien a vous dire touchant ce que vous demandez de Madame de Villedieu⁶⁾ mals je m'en informeray.

J'ay dit a Monsieur de Carcavy ce que vous me mandez touchant les medailles a vendre, a quoy il respond de mesme que l'autrefois⁷⁾ quand je luy indiquay une pareille. qu'il faudroit envoier icy tout le cabinet a fin qu'il en pust choisir celles qu'il voudroit et que pour cela il promet de paier les frais du transport, et de donner caution pour la restitution. Mais on n'en fera rien si l'on me croit.

1) Constantyn Huygens, frère.

2) Voir la Lettre N^o. 1588.

3) G. Graswinckel à Maeslant; consultez la Lettre N^o. 1588, note 1.

4) Consultez la Lettre N^o. 1584.

5) C'est le 22 mai 1667.

6) Marie Catharine Hortense Desjardins, connue sous le nom de Madame de Villedieu, fille d'un prévôt de la maréchaussée d'Alençon et d'une femme de chambre de la duchesse de Rohan, naquit en 1631 à Fougères, où elle mourut en novembre 1683. Auteur très estimée par ses contemporains, elle mena une vie licencieuse, épousa d'abord un capitaine Boisset de Villedieu, puis le marquis de Chatte, vieillard de 60 ans, et enfin son premier amant, Desjardins. Malgre l'éclat de ses dérèglements, elle fut toujours bien reçue par la cour et le grand monde.

7) Consultez la Lettre N^o. 1550.

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Il y a longtemps que j'ay veu le Chapelain decoiffè⁸⁾, qui en effect est une jolie piece.

J'avois escrit au frere de Moggershill⁹⁾ pour avoir l'histoire du Messie Turc, que l'on desiroit mesme imprimer icy, mais il ne m'a pas fait response. Si par quelque occasion luy ou vous me la pouuiez faire tenir, j'en seray bien aise.

Ie m'estonne que ni vous ni Mon Pere ne me mandez rien touchant ce qu'on dit par dela de la guerre qu'on va faire en Flandre. Le manifeste¹⁰⁾ sans doute y sera desia parvenu, comme aussi le dialogue¹¹⁾ qui est comme un abbregè du dit manifeste.

Pour le frere Louis.

8) Le Chapelain décoiffé, ou parodie de quelques scènes du Cid. Paris 1665. in-12^o.
Selon Barbier, Dictionnaire des ouvrages anonymes, 3^e Ed, Tome II, page 566, cet ouvrage est ‘Attribué par Charpentier à François Payot de Linière, et plus ordinairement à A. Furetière. Racine et Boileau ont eu quelque part à ce poème satyrique, qui a été compris par beaucoup d'éditeurs dans les oeuvres de Boileau.’
Ces auteurs étaient:
François Payot de Linière, né en 1628 à Paris, où il mourut en 1704. Avocat de son métier, il était poète satyrique improvisateur et fut appelé, ‘l'athée de Senlis.’
Antoine Furetière, né en 1620 à Paris, où il mourut le 14 mai 1688. D'abord avocat, il devint religieux et abbé de Chalivoy. Reçu membre de l'Académie Française en 1662, il en fut expulsé en 1685, à cause de son ‘Dictionnaire’ qui ne fut imprimé qu'en 1694 et eut plusieurs réimpressions; néanmoins il fut protégé par Louis XIV et était lié avec les principaux poètes de son temps; il était membre de la Société des Gais Buveurs, qui se réunissaient au Mouton du cimetière St. Jean. Par ses sarcasmes et satires il s'était fait beaucoup d'ennemis, entre autres l'auteur mentionné plus haut:
François Charpentier, né le 15 février 1620 à Paris, où il mourut le 22 avril 1702. D'abord destiné au barreau, il se consacra aux lettres: protégé par Colbert, il présenta au roi un discours éloquent touchant l'établissement de la Compagnie française des Indes. Il entra dans l'Académie française et prit part à la querelle des anciens et des modernes.

9) Cette lettre à Ph. Doublet est le N^o. 1587.

10) Manifeste du Roy concernant les droits de la Reyne sur les provinces des Pays-Bas. Traité des droits de la Reyne Tres-Chrestienne sur divers Estats de la Monarchie d'Espagne. Paris. Sebastien Cramoisy & Sebastien Mabre-Cramoisy. Imprimeur ordinaire du Roy. ruë Saint Iacques aux Cigognes [8 may 1667] in-4^o. 4 et 270 pages.
On en trouve la traduction hollandaise:
Vertooningh van de Rechten der Christelijkste Koningin op verscheyde Staten van de Spaansche Monarchien. t'Amsterdam, bij Jacob Vinckel, Boeckverkooper in de Beursstraet, in de History-Schrijver, 1667. Gedruckt bij Jacob van Velzen, in de Kalverstraet, tusschen de Heiligenwegh en de Osse-Sluis, in-4^o. 4 et 146 pages.

11) De ce dialogue nous possédons la traduction dans la plaquette:
Samenspraek over de rechten der Aller-Christelijkste Koningin van Vrankrijk. Uit de Fransche in onze taal getrouwelijk overgezet. m.dc.lxvii. in-4^o.
C'est un dialogue tenu à Bruxelles entre trois avocats, un français, un hollandais et un allemand, traduit de la première partie d'un ouvrage de F.P. Lisola:
Dialogue sur les droits de la Reyne Tres-Chrestienne. mdclxvii. in-12^o.
Cet écrit a été le commencement de toute une série d'autres pour et contre le ‘Manifeste’ cité.