Oeuvres complètes. Tome V. Correspondance 1664-1665
(1893)–Christiaan Huygens– Auteursrecht onbekendNo 1247.
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lors que Je n'en auray pas le loisir. Mais tousiours arriuera il qu'il se trouuera quelque mot a dire sur les experiences ou autres choses qui s'y presentent et alors il faut que vous ayez la patience de soufrir que Je vous en rompe la teste. Mais ce qui vous doibt lasser le plus des choses que Je vous marque dans mes lettres, c'est que bien souuent Je vous escris une chose pour une autre, ou bien sans examiner solidement ce que Je dis. Je vous estale ce que J'en pense retenir dans la memoire, laquelle pour vous dire le vray me trompe si souuent, que Je croirois en meriter du blasme n'estoit qu'il n'est point en mon pouuoir d'y remedier. adioustez a cela, que pour la plus part Je suis pressé du temps, et nay pas le loisir d'y appliquer lattention qui est necessaire, et le seul remede qui puisse obuier les beueuës qu'il marriue de faire fort souuent. Mais pour vous dire franchement, Je ne m'en mets pas beaucoup en peine, puisque Je scay bien la bonté que vous auez pour moy. J'en ay fait une dans celleGa naar voetnoot1) qui vous a dit qu'a la profondeur de 200 brasses l'air sera comprimé à 1/12 partie au lieu que mettant 33. pieds d'eau pour ballancer l'air: l'eau le comprimera a 1/12 a la hauteur de 60 ½ Brasse. Mais vous le scauez mieux que moy. on ne se sert que d'un cylindre de verre pour comprimer l'air à 1/20. ce qui se fait seulement auec la main. Vous aurez la description de la Machine dont Monsieur Hook se sert pour mesurer la velocité des corps descendants. Et peut estre aurez vous bien la curiosité de lexperimenter sur la Tour d'Utrecht; qui est plus haute que pas une que nous auons icy. Je pretends aussi le faire faire par Monsieur le Comte de Kincardin dans des puis qui sont creux de 60. ou 70. Brasses. nous pretendons y examiner la descente de plusieurs sortes de corps de plusieurs facons &c. Je suis fort aise de l'esperance que vous auez de vostre nouuelle Horologe. Nous taschons d'employer des poids au lieu des ressorts, dans les deux dont Je vous ay fait mention dans ma dernierGa naar voetnoot2), puisquoutre l'inegalité qu'on ne peut oster au mouuement qui se fait par des ressors, il se trouue dautres inconueniens auxquels il est necessaire d'obuier, comme la Rouilleur &c. Monsieur vostre pere a receu dix liures sterlins de Monsieur le Vicomte de BrounckerGa naar voetnoot3). Jl m'a promis de peser le contrepoids de son Horologe et m'en dire le poids. Je pretends le scauoir assez a temps pour vous le marquer au bas de cellecy. Cest sur la representation qu'a fait lAmbassadeur de franceGa naar voetnoot4) qui est icy, que Sorbiere à esté relegué. J'ay reçeu la responce que J'attendois de Monsieur le Comte de Kincardin touchant les Horologes: Jl s'en remet absolument à moy. Commençons donc dés à cette heure à y songer à bon escient. la premiere chose, | |
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à mon auis, que nous y auons à faire est de resoudre en quels lieux nous aurons à prendre des priuileges et en quels y proceder d'une autre methode, cest a dire en demandant des recompenses. Vous sçauez, que nous auons cydeuant, eu quelques entretiens la dessus. C'a esté vostre opinionGa naar voetnoot5) si Je ne me trompe, qu'il est a propos de prendre les priuileges necessaires là ou vous estes. Et J'en suis aussi d'auis. Et pour ce qui est de la recompence que Messieurs les Estats ou autres ont promise à ceux qui trouueront une inuention pour scauoir les longitudes sur mer, sçachez premierement ce qui en est, et puis voyez s'il est encor temps d'y pretendre. Cependant la patente portant priuilege à vous et Monsieur le Comte de Kincardin, (ou a vous seul si bon vous semble) et a ceux qui y seront par vous authorisez, de se seruir des Horologes a pendule sur mer (quelque petite inuention qu'on y puisse adiouster &c.) exclusiuement à tous autres, personne ne vous scaura priuer de la recompence à moins d'auoir quelque autre inuention sans s'y seruir du pendule. Et si vous trouuez bon qu'on en fasse de mesme en France ou bien qu'on traitte auec le Roy pour une recompense sans demander patentes vous n'auez qu'a me dire vostre sentiment et Je crois que Je trouueray le moyen de faire faire ou l'un ou lautre. Et pour la Grande Bretagne, il ne sera pas difficile d'en auoir le priuilege mais Je ne vois pas qu'on y puisse attendre recompence. Toutesfois J'ay enuie de taster le poulx à ces Marchands qui ont fait de si belles offres au PortugaisGa naar voetnoot6), pour voir sils veulent autant faire pour une chose reelle, comme ils ont fait pour une Chimere. Au reste pour l'Espagne, le Dennemark, la Suede, les villes Anseatiques &c. Je crois qu'il ne sera pas difficile d'obtenir des patentes pourveu que le ieu vaille la chandelle. il est vray que J'ay ouij dire, que le Roy d'Espagne a proposé quelque recompence pour le secret des longitudes et sil en est ainsi, il vaudra pour le moins la peine de la demander. Mais tout ce que Je viens de dire presuppose que les Horologes vont sur mer auec exactitude; et iusqu'a ce que nous soions assurez de cela, la seule question est, sçauoir, sil est temps de demander les priuileges dans les lieux susnommez, ou bien sil faut attendre encore iusqu'à ce que nous soyons hors de doubte. Au retour de Capitaine HolmesGa naar voetnoot7), nous serons pour le moins esclaircys de la moitié de la chose (ou peu sen faudra) en scachant si les Horologes s'arrestent ou non. pour ce qui est du reste il ne sera pas a mon auis trop difficile d'y voir assez clair, sans en faire des nouuelles experiences sur Mer. Nous attendons Monsieur Holmes dans peu de temps. Voycy ce me semble une lettre desia assez longue. Neantmoins faut il que J'y | |
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adiouste encore quelques lignes touchant ce qui s'est passé en nostre Assemblee mercredy dernierGa naar voetnoot8). OnGa naar voetnoot9) y presenta un aimant qui a 4 poles bien distinctes. et cela sans Artifice. la nature y ayant uni deux Aimants distinctes auec quelque espece de terre, ou pierre entre deux priué de la vertu Magnetique. Sur le rapport qu'on y auoit fait que, par une obseruation fort exacte de 4. ou 5. bonnes aiguilles dont 2. estoyent longues dun pied et 2. autres de 7. poulces, Monsieur le Vicomte de Brouncker, le cheualier Neile, Monsieur Ball, Monsieur Hook et moy presents, prennant le Meridien du quadrant au soleil du Roy (qui est au jardin priué) pour le vray, Toutes les aiguilles sy accorderent sans aucune variation, il fut ordonné, qu'on s'informast soigneusement, si deux aiguilles se peuuent appliquer a un Aimant en sorte que l'une regarde les poles, et l'autre en soit esloignee. de mesme deux autres appliquées à deux aimants: pour scauoir quelle certitude il y a en faisant la comparaison entre plusieurs Aiguilles. OnGa naar voetnoot10) y presenta de l'Antimoine qui auoit esté calciné au Soleil, pour voir si selon ce que plusieurs Autheurs en disent le poids en augmente. Mais on y trouua le contraire. On y esprouua dereschef auec grande satisfaction lexperience touchant le nombre des vibrations d'une chorde. On fit estendre une chorde 138. pieds en longueur, 1/32. de poulce despaisseur, (la matiere en estant d'airain) ayant pendu a l'un des bouts, un poids de 4. liures 7. onces. on y auoit adiusté le poids en sorte, que touchant la chorde au milieu, chaque vibration qu'elle faisoit, duroit ½ seconde tout iuste: et sur la suggestion de Monsieur Nostre president, on trouua, que le milieu de la chorde estoit plus bas que ses deux bouts, de la hauteur d'une pendule qui bat le demiesecondes. Et ayant raccourcy la chorde de la moitié, et y repeté la mesme experience en tous points, on trouua que les vibrations estoyent iustement deux fois plus vistes qu'auparauant: et le milieu de la chorde estoit plus bas que ses deux bouts, de la hauteur d'une pendule dont les vibrations estoyent de la mesme vistesse que celles de la chorde raccourcie. Vous voyez qu'il n'y a pas moyen descrire les choses si court, que cela n'aille a plusieurs lignes. Mais vous ne m'en ferez point de reproche, si ce n'est que Je me suis expliqué mal en quelques endroits à mon ordinaire. Mais vous auez assez d'amitié pour moy pour me pardonner les fautes de
Monsieur Vostre treshumble tresobeissant et tresaffectionné seruiteur R. Moray. | |
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My lord Brouncker a esté si fort empesché qu'il faut remettre ce que Je croyois vous dire du Contrepoids a ma prochaine. tousiours vous baise il les mains de bon coeur.
A Monsieur Monsieur Christian Hugens de Zulichem A la Haye. 1 β XII |
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