Oeuvres complètes. Tome III. Correspondance 1660-1661
(1890)–Christiaan Huygens– Auteursrecht onbekendNo 751.
| |
[pagina 81]
| |
esperer vne chose encore plus precieuse que des lettres par le dessein que vous aues pris dhonnorer l'Ambassade Hollandoise en France de vostre accompagnement. Je vous laisse a penser quelle joye vous m'aués donnée en me donnant vne si bonne nouuelle, et combien je dois me proposer de satisfaction dans les longs entretiens de viue voix que j'auray auec vous sur toutes les choses qui vous regardent. J'attens cer heureux voyage auec vne extreme impatience et cependant je vous rens graces de ce que vous n'aués pas desapprouué les sentimens que j'ay eus sur vostre Systeme de Saturne et quelque petite lumiere qui m'est venuë propre a fortifier les vostres bien que ce secours ne leur fust point necessaire. Pour les Italiens qui se souleuent contre vostre beau Trauail, et en verite auec beaucoup de bassesse, je n'en suis en aucune peine. Par l'ExtraitGa naar voetnoot1) de la lettre de Rome que vous m'aués enuoye je voy qu'ils n'ont encore rien trouué contre vostre Position, mais seulement quils veulent essayer d'y trouuer a redire, qu'ils fabriquent des Telescopes pour ce dessein là et qu'ils s'en promettent des merueilles. Tout cela, Monsieur, n'est que fanfare aussi bien que ce desfy pretendu pour vous obliger a la justification de vos Obseruations, lesquelles estant positiues et non contestées par Heuelius mesme quoy qu'en mauuaise humeur dailleurs contre vous ne peuuent manquer de confondre tous ces Malueillans a qui il fasche d'auoir moins bien rencontré que vous. Nattendes donc point de vray Cartel de ce costé là, et si contre mon opinion il en venoit vn, ne vous en troubles point, tant que vous aurés en vostre puissance d'aussi justes Instrumens que ceux dont vous vous serués et vne logique aussi exquise et d'aussi bonne foy que la vostre. Vous m'aués fait rougir lorsque j'ay veu que vous me designes pour vostre Second en cas de Duel. Vous estes trop fort tout seul, et s'il vous falloit de l'assistance ce ne seroit pas d'vne foiblesse comme la mienne que vous la deuriés desirer. Je n'ay que de l'admiration pour vos belles Idées, et loin de les pouuoir appuyer, cest tout ce que je puis faire que de les comprendre. Je vous en suis pourtant tressensiblement obligé, et je mets cette ciuilite que vous m'aués faitte entre mes plus grands auantages. Il faudra voir ce que publira ce pretendu InuenteurGa naar voetnoot2) du Mobile perpetuum pour l'explication de ces deux figures en cuiure quil vous a enuoyées et suspendre son jugement jusques a ce qu'on ait veu son Escrit. Il seroit a souhaiter qu'il fust solide et cela seroit dautant plus agreable quil y a moins dapparence de l'oser esperer. Monsieur PetitGa naar voetnoot3) qui a veu les mesmes figures auec l'Inscription croit que lagent naturel que lAutheur joint a sa machine est le vent, celuy qui sert a celles des Moulins. Par ce que Heuelius vous prometGa naar voetnoot4) touchant ces Parelies ie conjecture que le chagrin quil vous auoit tesmoigne sest dissipé et je m'en resjouis auec vous. Je suis bien | |
[pagina 82]
| |
marry de ne vous pouuoir rien dire dauantage de l'Obseruation des sept Soleils de Rome dont a fait mention Monsieur Gassendi, lequel neantmoins je vous assure qui nen a pas fait mention estourdiment. Je ne verray aucun de mes Amis de ceux qui feront ce voyage la sans leur donner in mandatis den faire la perquisition sur les lieux pour vous. Vostre nouueau trauail sur lhorloge a pendule m'a fort plu par le seul auis que vous m'en aués donné. Il est tresexpedient d'affermir vne si noble Inuention par les secondes pensées qui vous sont venuës sur cette matiere, et le Monde scauant les receura auec joye et applaudissement. Ce sera vne bien agreable pasture pour lAssemblee de ches Monsieur de Monmor, sur tout lorsque vous la debiterés par vousmesme et que vous serés present pour respondre aux instances et aux difficultes. Car vous scaues que tout est disputable et qu'il y a peu de gens partout qui philosophent de bonne foy et qui ne cherchent point a s'eleuer sur les ruines d'autruy, tant l'homme ayme peu la verité et tant il s'ayme soymesme preferablement a toutes choses. Vous l'aués desja esprouue en plus dvne rencontre et je massure que vous estes resolu a l'esprouuer encore à l'auenir. L'importance est de ne se pas rebuter pour ces sortes d'injustices, et de perseuerer dans l'amour de la sincere Philosophie, nonobstant toutes les trauerses qu'on y peut receuoir. Vous le ferés sans doute de lhumeur que je vous connois et je vous en felicite d'auance. Je ne vous ay point encore enuoye les deux PoemesGa naar voetnoot5) de Monsieur Huet pour ne vous accabler pas dvn trop grand port de lettres, ayant reconnu combien les Courriers quon en charge vendent cherement leurs pas. Si Monsieur Boulliau ne part point bientost auec Madame l'AmbassadriceGa naar voetnoot6) je vous les garderay jusqu'a vostre arriuée a Paris. Lvn de ces Ouurages est vne Ode pour le Mariage du Roy, lautre est vne Epistre a la manière d'Horace où il descrit tressensement la peine ou se met vn homme qui veut plaire a tout le monde dans la conduitte de sa vie. Nous les lirons ensemble et je suis trompe si vous n'y trouues de quoy vous contenter. Je suis sans reserue
Monsieur
Vostre treshumble & tresobeissant seruiteur Chapelain.
De Paris ce 13. May 1660.
A Monsieur Monsieur Christianus Huggens de Zulichem A la Haye. |
|