Jan Gerhard Toonder (1914-1992)
‘Le monde ne peut aller mal au point qu'il n'y ait plus de place pour une énergie neuve, des idées nouvelles, un courage intact. Pour une personne qui a de l'imagination, de la volonté et de la force à investir dans un travail, qui n'a pas peur de se salir les mains et a les yeux en face des trous, il existe toujours un but à atteindre.’ C'est en 1939 que l'écrivain néerlandais Jan Gerhard Toonder écrivit ces lignes optimistes dans son premier roman au titre sans équivoque Een man zet door (Un homme qui va jusqu'au bout). Il s'agit de l'histoire d'un homme qui, faute de perspective d'aventure, renonce à son modeste poste d'employé de bureau, devient chômeur et finit pratiquement par toucher le fond. Mais après coup, ce passage peut être considéré comme un pertinent autoportrait de Toonder lui-même. Jan Gerhard Toonder, décédé le 25 août 1992 à l'âge de 78 ans, fut en effet un homme qui avait imagination, volonté et force pour travailler et qui n'a cessé de mettre la main à la pâte. Il écrivit plus de trente romans ainsi que des dizaines de nouvelles et poèmes, des scripts, des BD, des textes de chansons et des articles. Il remplit, de plus, plusieurs charges de direction dans le monde littéraire et dans l'industrie cinématographique. Avant tout, Toonder était un conteur-né, une race d'auteurs peu estimée par la critique littéraire néerlandaise, beaucoup plus portée sur l'introspection et la philosophie. Aussi, son oeuvre d'écrivain n'est-elle pas toujours jugée à sa juste valeur.
C'est dans la maison familiale, en compagnie de son frère Marten de deux ans son aîné, que Toonder a inventé ses premières histoires. Pourtant, Jan Gerhard choisit d'abord de vivre en mer, marchant sur les traces de son père qui était officier de la marine marchande. Mais il réalisa bien vite qu'il préférait laisser libre cours à son imagination, assis à son bureau. Son deuxième roman Uitvaart (Obsèques), portait sur un lieutenant au long cours et, dans les années 50, il publia une trilogie maritime basée sur les souvenirs de son père, ‘Chez plus d'un Hollandais, n'eût-il même jamais navigué, se cache un marin’, écrivait le critique Maurits Uyldert en 1940 à propos du deuxième livre de Toonder. ‘Il aime la mer, sa rude et élémentaire force par tous les temps et cet amour est certainement nourri par la conscience que l'histoire de son pays et de sa famille est faite sur et par la mer.’
Pendant l'occupation allemande, Toonder fit essentiellement des travaux de traduction. En 1944, il collabora à
Metro, feuille satirique et illégale faisant, par son insolence, pendant aux canards ennuyeux à mourir que la résistance se chargeait de publier dans le secret. La
Jan Gerhard Toonder (1914-1992) (Photo Marian van de Veen-Van Rijk).
réserve de papier utilisée pour l'hebdomadaire, obtenue de façon clandestine, était stockée à Amsterdam dans la maison de Toonder. Il faisait également partie des fondateurs de la maison d'édition illégale
De Bezige Bij qui se développa après la libération comme éditeur littéraire de premier rang. Sa première publication d'aprèsguerre fut un pamphlet dirigé contre les comités d'écrivains qui devaient juger le comportement de leurs collègues durant la guerre et qui infligèrent à quelques auteurs une interdiction de publier pour faits de collaboration. Toonder estima que l'arbitraire et les copinages politiques jouaient un rôle trop important à l'occasion de ces jugements.
En ce qui le concerne, il travailla dans l'immédiat après-guerre avec son frère Marten, devenu entre-temps un dessinateur de BD connu et populaire, propriétaire de son propre studio. Jan Gerhard écrivit des scénarios pour BD, dessins animés et films publicitaires