Jopie Huisman, peintre d'une civilisation du prêt-à-jeter
Dans la petite ville frisonne de Workum, située en bordure de l'IJsselmeer, une belle maison dans la ‘Noard’ (la rue du Nord) a été restaurée. Plus de cent mille personnes l'ont visitée, l'année dernière, non pas parce qu'elles voulaient savoir comment se présentait une habitation du dixseptième siècle, mais pour admirer les toiles de Jopie Huisman, qui y ont trouvé un décor approprié depuis le mois d'avril 1986.
Jopie Huisman est chiffonnier et marchand de ferraille. Ce ne sont certainement pas ces activités-là qui lui auraient apporté quelque célébrité. Il n'empêche qu'elles déterminent dans une très large mesure son oeuvre picturale. En effet, ce qu'il représente dans ses toiles, il l'a emprunté en majeure partie au monde du prêt-à-jeter dans lequel il vit quotidiennement.
Jopie Huisman est né le 18 octobre 1922. Il a survécu à l'enfer du travail obligatoire en Allemagne, épisode qui l'a longtemps marqué sur le plan physique aussi bien que spirituel. Dans ses jeunes années, il ne semble pas s'être fait remarquer par quelque disposition particulière. Il était déjà sorti de l'école avant que ne se manifeste son talent de dessinateur. Sa situation financière ne lui permettant pas de suivre des cours, il a dû le développer indépendamment
Après la guerre, il trouvera du travail dans une poterie - les poteries vernissées sont une spécialité
Jopie Huisman, ‘Autoportrait’, peinture à l'huile, 80 × 60 cm, 1978.
de Workum -, où il s'appliquait à décorer les poteries avant la cuisson. Il a voulu s'installer à son compte, mais voyant que cela ne nourrissait pas son homme, il passa au commerce de chiffons. De 1952 à 1959, avec sa charrette de chiffonnier, il faisait partie du décor des rues de Workum. Après avoir déménagé à Franeker (Frise) en 1960, il décida, en 1963, de mettre sur pied sa propre entreprise, et c'est ainsi que depuis lors
Le Musée Jopie Huisman, une habitation datant du xviie siècle, à Workum en Frise (photo Marten Heida).