Dolf Verspoor
Reconnaissances
Les essais de traduction qui suivent permettront au monde occidental de s'associer tant soit peu à l'hommage que pour ses soixante-dix ans les pays de langue néerlandaise rendent au poète A. Roland Holst. Reconnaissance au poète, donc, et reconnaissance poussée dans son domaine.
Si dans certains accents, dans certains thèmes, Roland Holst adopte puis enrichit cette poësie du littoral atlantique qui, face à la mer, nous donna gestes d'Irlande et chants des Hébrides, cantigas portugaises et vers de Camoens, chants de Galicie et de Bretagne, il se trouve que la meilleure initiation à son oeuvre, en dehors de ses propres écrits, pourrait bien être ‘L'exil d'Hélène’ du méditerranéen Camus. Rencontre d'ailleurs, qui permet de mesurer à quel point, en demeurant traditionnaliste, on peut être précurseur. Lorsque Camus se penche sur le monde actuel, il retrouve non seulement les mots mais encore les symboles qu'avait trouvés Roland Holst. ‘Nous avons exilé la beauté, les Grecs ont pris les armes pour elle’; puis, s'insurgeant contre Hegel et son fatalisme resquilleur, refusant de réduire la vie à la ville et la durée à l'histoire, Camus, à son insu, rejoint le Hollandais dont l'oeuvre depuis longtemps avait évolué vers une véritable prise de conscience europeénne, à travers un destin individuel.
Evolution ‘à son corps défendant’, pour reprendre un titre holstien: c'est à son corps défendant qu'un poète aux débuts élégiaques s'est retrouvé juge. Mais son verdict, s'il retentit ‘contre le monde’, est l'écho d'un sourd verdict, intérieur celui-là que la destinée de l'homme rend contre son insuffisance. Aussi le plus pur Roland Holst est-il dans l'impitoyable révélation de son impureté: ses pages les plus denses confrontent l'homme tel qu'il devient avec le double qu'il eût pu être. Ce sont ces pages qui, avec le recul du temps, apparaissent comme des fragment d'épopee. Dans les dunes de Hollande, sous un ciel désert, s'est inscrit un itiné-