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Chapitre IV
Traductions hollandaises de romans picaresques français
La France a été de tout temps un de ces pays dont on aimait à imiter les moeurs, la mode et la littérature dans une grande partie de l'Europe. Cependant peut-être nulle part cette influence ne s'est fait sentir si fortement que dans notre patrie, et notamment au XVIIe siècleGa naar voetnoot(1), lorsque la nationalité hollandaise fut définitivement constituée.
Le séjour plus ou moins long que font dans les Sept-Provinces de nombreux Français au commencement du XVIIe siècleGa naar voetnoot(2), l'arrivée de beaucoup de protestants français avantGa naar voetnoot(3) et après la révocation de l'édit de Nantes, voilà deux faits dont il faut certes tenir compte pour expliquer cette influence. Ces réfugiés, qui avaient sacrifié une existence sûre plutôt que de renier leur foi et qui précisément de ce chef occupent une place honorable parmi leurs compatriotes, n'ont pas tardé à exercer une influence considérable sur la vie intellectuelle et morale de certains milieux de nos grandes villes. Le français, langue de la cour et de la noblesse, deviendra aussi celle des notables, et désormais ce sera l'idiome dont on se servira de préférence dans les hautes classes. Des écoles françaises où plus d'un réfugié trouvera un moyen de subsistance seront fondées dans plusieurs villes des Sept-Provinces tandis que le nombre des églises wallonnes s'accroîtra considérablementGa naar voetnoot(4)Ga naar voetnoot(5).
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Quoi donc de plus naturel que les éditeurs hollandais, au courant des ouvrages en vogue de la littérature française, en bons commerçants, se soient efforcés de répandre parmi le peuple - qui ne savait pas le français - des versions des meilleures productions littéraires de l'époque? Voilà peut-être pourquoi nous possédons entre autres des traductions de Francion, du Roman comique et de Gil Blas et ce seront par conséquent celles-ci que nous soumettrons à un examen.
Il a existé différentes versions de ces ouvrages; seulement la rareté des exemplaires qui se trouvent encere dans les bibliothèques publiques et le plus souvent dans celles des bibliophiles a été la cause que nous n'avons pu en consulter que quelques-uns. Aussi nous regrettons de devoir constater que ce chapitre ne pourra pas donner une idée complète des traductions de romans picaresques français, et c'est pourquoi il nous semble inutile de hasarder une hypothèse sur la façon dont on a travaillé généralement.
Que parfois le traducteur ait été un homme tout à fait incompétent, que quelquefois le travail de l'écrivain hollandais soit devenu une adaptation plutôt qu'une traduction, que la question du débit ait aussi influé sur le mode de travail, ce sont là des points que nous discuterons par la suite, mais qui ne constituent pas une matière suffisante pour caractériser avec assez de certitude les versions hollandaises de romans picaresques français.
Comme nous suivrons l'ordre chronologique dans les dates de publication, nous commencerons par traiter:
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't Kluchtige leven van Vrolijcke Fransje.Ga naar voetnoot(1)
Cette traduction de Francion se compose de deux volumes et compte autant de chapitres que l'original.
Ce qui est très curieux, c'est que les deux volumes ne sont pas le travail d'un seul traducteur. En effet le second volume est dû à N.N. et a été publié chez le même éditeur et dans la même année, ce qui est la preuve évidente que les deux tomes doivent former un tout et ne constituent pas deux éditions à part.
Est-ce que V.D.R. était mort avant d'avoir pu achever son
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travail, la besogne a-t-elle été trop fatigante pour lui ou pas assez à son goût pour qu'il la termine, voilà autant de mystères que nous ne sommes point parvenus à dévoiler; mais, quoi qu'il en soit, nous avons bien sujet de regretter qu'un homme tout à fait incapable se soit chargé de la traduction de la seconde partie.
En effet, même, sans les initiales N.N. et sans être doué d'une grande perspicacité, on constate aisément qu'ici deux écrivains, de talent bien différent, se sont mis à l'oeuvre pour transmettre en néerlandais le roman si populaire de Sorel.
Si la première partie observe assez fidèlement le texte originalGa naar voetnoot(1), si elle peut encore se lire de nos jours sans trop nous lasser, il n'en est rien pour la seconde, dont l'auteur arrive au pauvre résultat de nous donner un travail bâclé qui fourmille de germanismes. Aussi nous sommes porté à croire que N.N. était Allemand, et à l'appui de cette assertion nous nous permettrons de citer quelques traductions que nous mettrons en regard du texte français.
... qu'il avait promis le mariage à Emilie (p. 446): ... dat hij Emilie d'Ee versproken had (p. 379). |
Je vous proteste (p. 447): Ik gesta U... (p. 380). |
Sa mère m'a prié (p. 447): Haer moeder heeft my gebeden (p. 380). |
... qui étaient de son invention (p. 447): by hem ervonden (p. 380). |
... il fallait avouer... (p. 447): ... dat men toestaen moest (p. 380). |
... faire des fictions (p. 447): erdichten (p. 380). |
... par coeur... (p. 402)...: uitwendigh (p. 306). |
Je vous avous... (p. 403): ... laet ik u toe... (p. 307). |
Ces comparaisons sont trop éloignées (p. 403): Dees gelijkenissen zijn veel te verscheiden (p. 307). |
... contraint... (p. 324): ... beweegt... (p. 161). |
... déjà... (p. 325): ... schoon... (p. 162). |
Quant à la première partie, le travail de D.V.R., les moralisations sont pour la plupart supprimées - naturellement dans le but de gagner plus de lecteurs -Ga naar voetnoot(2), de même que l'Avis aux Lecteurs et la dédicace A Francion. Cette dernière a été remplacée par ‘Aux Grands’, morceau que nous trouvons dans le Livre XI de l'originalGa naar voetnoot(3). Qu'on compare les passages suivants:
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Comme cette pernicieuse vieille fut partie, laissant ceux qui l'avoient entendue discourir tout satisfaits des facétieux contes dont elle les avoit entretenus, il arriva dans la taverne un carrosse que le gentilhomme qui avoit couché avec Francion avoit envoyé querir chez soi dès le grand matin. Après dîner, voyant que la pluie étoit passée, il fit tant que le pèlerin y monta, lui disant qu'il désiroit avoir cet honneur de le traiter en sa maison, où il seroit aussi bien inconnu qu'au bourg où il vouloit aller. Ce m'a été une bonne fortune, continua-t-il, de trouver si à propos un homme dont la connoissance m'est infiniment chère. Je revenois avec un seul laquais, de voir une mignarde veuve de ce pays-ci, qui s'appelle Hélène: je soupai avec elle fort tard, et, en passant par ici pour m'en retourner en mon château, il m'arriva un accident qui me fit demeurer, et que je bénis comme la cause de mon bonheur, c'est que mon cheval se rompit une jambe en sautant un fossé; mais je ne voudrois pas pour cinquante coureurs tels que lui n'avoir eu votre rencontreGa naar voetnoot(1). |
Als dese schadelicke oude koppelster vertrocken was, die 'er toehoorders vernoeght liet door de boefachtige vertellinghen daer sy hen meê onderhouden had, quam 'er aen de Herbergh een Karros, die de Edelman, die by Fransje gheslapen had, 's morgens vroegh tot sijnent liet halen. Naer middagh, siende dat de regen ophiel, deed hij so veel dat de pelgrim daer in klom, tot wien hy seide dat hy hem eerlick in sijn huys begeerde te herberghen daer hy beter sou zijn, dan in 't onbekent Dorp, daer hy meinde te gaen. 't Is my, vervolghde d'Edelman, een groot geluck so te vinden een man wiens kennis my uyttermaten veel waerdt is. Ick kom alleen met een staet-jonghen van 't huis eener vriendelicke weduwe, genaemt Helena, woonachtigh in dit landt, met wien dat ick seer spade Avondtmael gehouden heb; maer als ick hier door reisde, om weêr na mijn kasteel te keeren, ghebeurde my een toeval, dat my deed blyven, daer in ick my verheug, als d'oorsaeck mijns gelucks; want myn paert in 't overspringen van een sloot, brack een been; maer ick wenste niet om vijftigh sulcke kleppers, dat ick u niet ontmoet hadGa naar voetnoot(2). |
En général la traduction de D.V.R. est exacte.
Par-ci par-là il commet cependant quelques erreurs dont nous relèverons les suivantes:
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... je ne faisois autre chose que philosopher et que méditer sur l'état des hommes, sur ce qu'il leur faudroit faire pour vivre en reposGa naar voetnoot(1). Ick deê niet dan op de staet der menschen te philosopheren, en t' overpeinsen wat men hen doen most om in rust te leven,...Ga naar voetnoot(2).
... gardant toujours néanmoins ma liberté de médire de ceux qui le méritoientGa naar voetnoot(3) ... my nochtans mydende van yemant quaet te spreeckenGa naar voetnoot(4).
... pour meurtrir un coeurGa naar voetnoot(5): ... om een hart te stelenGa naar voetnoot(6).
... et quelques autres inventés de nouveauGa naar voetnoot(7) ... en veel andere vernufte woordenGa naar voetnoot(8).
Cela dit, (j'allai à part avec lui),...Ga naar voetnoot(9): ... toen ick dit geseidt had...Ga naar voetnoot(10) (au lieu de hij).
... ces matoises de femmesGa naar voetnoot(11): ... deze onbeschofte vrouwenGa naar voetnoot(12).
Ajoutons que D.V.R. a intercalé quelques poésies dont la tournure ne manque pas d'une certaine grâceGa naar voetnoot(13).
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De Kluchtige Romant
of de
Edelmoedige ComediantenGa naar voetnoot(14).
Une dizaine d'années seulement après la publication de la première partie du Roman comique, une traduction hollandaise en avait déjà vu le jourGa naar voetnoot(15).
Est-ce à cette traduction que Heinsius fait allusion dans l'Avantpropos de son édition? Si oui, il n'en dit pas beaucoup de bien. C'est surtout le grand nombre d'erreurs que son prédécesseur - un certain L.v.B. a eu à se reprocher, dit Heinsius, qui l'a amené à refaire son travail, d'autant plus que l'édition de L.v.B. était complètement épuisée. Heinsius promet de donner mieux. Il ne s'appliquera pas à reproduire servilement le sens des mots, mais il s'efforcera plutôt de rendre celui du texte. Certes on peut dire que Heinsius a tenu parole. Aussi bien dans la deuxième partie, achevée avant la première,
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que dans celle-ci, il s'est inspiré de l'esprit de l'auteur français et il est parvenu à écrire un livre d'une lecture agréable et qui ne fait nullement l'impression d'être un ouvrage traduit. Il a consciencieusement travaillé, il a accompli sa tâche pénible sans reculer devant aucune difficulté, sans rien omettre qui pût affaiblir le chef-d'oeuvre de Scarron.
Qu'on compare les passages suivants:
Le sieur de la Rappinière était alors le rieur de la ville du Mans. Il n'y a point de petite ville qui n'ait son rieur. La ville de Paris n'en a pas pour un, elle en a dans chaque quartier, et moi-même qui vous parle, je l'aurais été du mien si j'avais voulu; mais il y a longtemps, comme tout le monde sait, que j'ai renoncé à toutes les vanités du monde. Pour revenir au sieur de la Rappinière, il renoua bientôt la conversation que les coups de poing avaient interrompue, et demanda au jeune comédien si leur troupe n'était composée que de mademoiselle de la Caverne, de M. de la Rancune et de luiGa naar voetnoot(1)! |
Monsr. la Rappiniere was doen ter tijt de potsemaker van de Stadt Mans; want daer is geen stadt, hoe kleyn dat se is, daer niet een snaeck in is. Daer is 'er meer als een in Parijs; yder quartier van de stadt heeft 'er een; en ick selver, die hier tegens u praet, kon die van het mijne wel geweest sijn: maer ick heb al over langh, gelijck een yder bekendt is, de ydelheyt van de werelt vaerwel geseyt. Om weêr tot Monsr. La Rappiniere te keeren, hij begost het propoost, dat de vuystslaegen afgebrooken hadden, wederom op nieuws, en vraeghde aen den jongen speelder, of haer troep uyt niemant, als Mejuffr. la Caverne, Monsr. la Rancune en hem bestondtGa naar voetnoot(2)? |
La conversation dura encore quelque temps avec les brancardiers, et ils surent les uns des autres qu'ils avaient été reconnus en chemin par les mêmes hommes que les comédiens avaient vus. Le premier brancard portait le curé de Domfront, qui venait des eaux de Bellème et passait au Mans pour faire une consulte de méde- |
De praet van dese voerlieden duerde nogh eenige tijt, verstaenden van malkander, dat se van deselfde mannen aengesproken waeren, die de Commedianten onderweegh gesien hadden. In de eerste Rosbaer sadt den Priester van Domfront, die van de badtstooven van Bellesme quam, en voorts nae Mans trock, om sigh |
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cins sur sa maladie. Le second portait un gentilhomme blessé qui revenait de l'armée. Les brancards se séparèrent: celui des comédiens et celui du curé de Domfront retournèrent au Mans de compapagnie, et les autres où ils avaient à aller. Le curé malade descendit en la même hôtellerie que les comédiens, qui était la sienne. Nous le laisserons reposer dans sa chambre, et nous verrons dans le chapitre suivant ce qui se passait en celle des comédiensGa naar voetnoot(1). |
aldaer met eenige Doctoors over syn kranckheyt, te beraeden. In de tweede was een gequest Edelman die uyt het Leger quam. Dese Rosbaren scheyden sigh van malkander. Die van de Speelders, en van den Priester van Domfront keerden weêr nae Mans, houdende malkander geselschap en de andere daer se te doen hadden. Den geestelijcken patient, ging inde selfde Herbergh van de Comedianten t'huys leggen, gelijck hy gewoon was te doen. Wy sullen hem in syn kamer laeten rusten, en in het volgende Capittel sien, wat in de kaemer van onse Comedianten gebeurdenGa naar voetnoot(2). |
Aussi les inexactitudes qu'on trouve dans son travail, ne sont pas d'une grande importance et ne font pas grand tort à la marche générale de l'ouvrage. En voici quelques-unes:
Elle passa dans le tripot de la BicheGa naar voetnoot(3): Sy gingen voorbij de kaetsbaen, la Biche genaemtGa naar voetnoot(4).
... les vint accosterGa naar voetnoot(5): quam sigh by haer voegenGa naar voetnoot(6).
Que le feu de saint Antoine les ardeGa naar voetnoot(7): Datter de moort slaeGa naar voetnoot(8).
Le déplorable succès qu'eut la comédieGa naar voetnoot(9): De jammerlijke voortgangh van het spelGa naar voetnoot(10).
... qu'il se cabraGa naar voetnoot(11): dat het struykeldeGa naar voetnoot(12).
sérénadeGa naar voetnoot(13): aubadeGa naar voetnoot(14).
... sur le dos de la servante du châtréGa naar voetnoot(15): ... op de schouders van den gelubden...Ga naar voetnoot(16).
... en une petite nymphe replèteGa naar voetnoot(17): in een volkomen NimphjeGa naar voetnoot(18).
Parfois Heinsius rend par des expressions énergiques, malheureusement très grossières souvent, le texte correspondant français.
Qu'on compare:
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fainéantGa naar voetnoot(1): bomen-telderGa naar voetnoot(2).
fils de chienneGa naar voetnoot(3): verdoemde hoere-jongenGa naar voetnoot(4).
bateleurGa naar voetnoot(5): gauwe-diefGa naar voetnoot(6).
... on y but beaucoup, et on n'y mangea pas moinsGa naar voetnoot(7): ... men soop, en vradt 'er als TempeliersGa naar voetnoot(8).
... qui ne se fût pas tuGa naar voetnoot(9): ... die syn beck niet sou toegehouden hebbenGa naar voetnoot(10).
fouGa naar voetnoot(11): schobbertGa naar voetnoot(12).
Cette première contribution de notre compatriote à la littérature picaresque contient déjà une promesse pour l'avenir, promesse dont Heinsius, nous le verrons plus tard, s'acquittera d'une façon digne de l'illustre race de littérateurs dont il est sorti.
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Le traducteur anonyme de cet ouvrage a commencé par retrancher la Déclaration de l'Auteur et il n'a certes pas eu tort de la supprimer. En effet, quelle que puisse être pour les contemporains français l'importance de cette Déclaration où on lit que Lesage a voulu représenter la vie telle qu'elle est, sans envisager personne en particulier, pour nous autres étrangers et après un si grand laps de temps, elle perd beaucoup de sa valeur.
Après le Gil Blas au Lecteur, le traducteur nous renseigne sur les coupures qu'il a cru devoir faire pour adapter l'ouvrage à l'esprit des lecteurs hollandais; il a été d'avis qu'il fallait supprimer certaines descriptions trop réalistes d'amourettes afin que tout le monde pût jouir de cet ouvrage si amusant et si instructif à la fois. Or, une comparaison très minutieuse de l'original et de la traduction nous a appris que l'auteur hollandais n'a pas seulement supprimé les passages qui auraient pu blesser les délicats, mais aussi d'autres dont ils ne se seraient point offusqués.
Ainsi il s'est fait un devoir de supprimer les histoires de don
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Pompeyo de CastroGa naar voetnoot(1) et de ScipionGa naar voetnoot(2); de même il ne traduit pas les passages attestant le peu de cas qu'on faisait d'un auteur ou d'un comédienGa naar voetnoot(3). Il passe également sous silence la dernière entrevue que Gil Blas a eue avec son ancien maître, le docteur SangradoGa naar voetnoot(4); il ne parle pas non plus de la rencontre de Gil Blas avec deux fripons qui se sont faits chartreuxGa naar voetnoot(5). Il y a encore maint autre endroit supprimé ou fortement raccourci par le traducteurGa naar voetnoot(6); les passages indiqués suffisent à prouver que l'auteur hollandais a considérablement réduit son modèle.
Il se peut qu'il y ait été forcé par son éditeur ou que lui-même ait trouvé moins de goût aux épisodes supprimés; mais, quoi qu'il en soit, un tel ouvrage n'est plus à proprement parler une traduction, mais un abrégé traduit de l'original.
Quant à ce qui a été traduit, il faut avouer qu'un homme versé dans la connaissance du français a entrepris ce travail. Il sera difficile de trouver une ligne traduite qui ne corresponde exactement à l'original, sans que par là sa version ait en quelque sorte pris un habit français. Qu'on compare:
Je ne fus pas sitôt au logis, que le docteur Sangrado y arriva. Je lui parlai des malades que j'avais vus, et lui remis entre les mains huit réaux qui me restaient des douze que j'avais reçus pour mes ordonnances. |
Zoodra was ik niet te huis, of dokter Sangrado kwam mede terug. Ik sprak hem over de zieken, die ik bezocht had, en stelde hem acht realen ter hand, welke ik over had van de twaalf, die ik voor mijne recepten ontvangen had. |
Huit réaux! me dit-il après les avoir comptés, c'est peu de chose pour deux visites; mais il faut tout prendre. |
Acht realen, zeide hij, dezelve geteld hebbende, dat is weinig voor twee bezoeken; doch men moet alles aannemen. |
Aussi les prit-il presque tous. Il en garda six, et me donna les deux autres. |
Hij nam ook bijkans alles aan. Hij behield er zes, en gaf mij de twee andere. |
Tiens, Gil Blas, poursuivit-il, voilà pour commencer à te faire |
Ziedaar, Gil Blas, vervolgde hij, ziedaar iets om u een beursje |
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un fonds; je t'abandonne le quart de ce que tu m'apporteras. Tu seras bientôt riche, mon ami; car il y aura, s'il plaît à Dieu, bien des maladies cette annéeGa naar voetnoot(1). |
te maken; ik geef u een vierde van hetgeen gij mij brengen zult; gij zult weldra rijk worden, mijn vriend, want er zullen, zoo het Gode behaagt, dit jaar vele zieken zijnGa naar voetnoot(2). |
Lorsque nous eûmes fait environ deux lieues, nous nous sentîmes de l'appétit; et comme nous aperçûmes, à deux cents pas du grand chemin, plusieurs gros arbres qui formaient dans la campagne un ombrage très agréable, nous allâmes faire halte, en cet endroit. Nous y rencontrâmes un homme de vingt-sept à vingt-huit ans, qui trempait des croûtes de pain dans une fontaine. Il avait auprès de lui une longue rapière étendue sur l'herbe, avec un havresac dont il s'était déchargé les épaules. Il nous parut mal vêtu, mais bien fait et de bonne mine. Nous l'abordâmes civilement; il nous salua de mêmeGa naar voetnoot(3). |
Den volgenden morgen twee mijlen afgelegd hebbende, begon de eetlust onze maag te prikkelen, en daar wij, omtrent twee honderd schreden van den grooten weg af, eenige dikke boomen zagen, die in het veld een aangenaam lommer verspreidden, hielden wij daar onze rustplaats, en ontmoetten er eenen man van zeven of acht en twintig jaren, bezig zijnde eenig hard brood in eene bron te weeken. Naast hem in het gras lag een lange degen, benevens eenen reiszak, van welken hij zijne schouders ontlast had. Hij scheen zeer slecht in de kleederen te zijn, maar van een zeer gunstig voorkomen; wij spraken hem beleefdelijk aan, hetgeen hij even zoo beantwoorddeGa naar voetnoot(4). |
Le roman hollandais compte trois tomes dont le premier contient deux livres, le deuxième trois livres et le dernier cinq livres, tandis que l'oeuvre originale se compose de douze livres. |
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voetnoot(1)
- R. Murris, La Hollande et les Hollandais au XVIIe et au XVIIIe siècles, vus par les Français, Paris, 1925, p. 88.
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voetnoot(4)
- J. te Winkel, op. cit., III, première édition, pp. 10 et 11.
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voetnoot(5)
- Félix Gaiffe, L'Envers du grand siècle, Paris, 1924, p. 315.
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voetnoot(1)
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't Kluchtige Leven van Vrolycke Fransje, vertaelt door D.V.R., Amsterdam, 1669. Cette édition fort rare se trouve dans la bibliothèque de M.F.-G Waller, d'Amsterdam.
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voetnoot(1)
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Charles Sorel, Histoire comique de Francion, Paris, 1877, p. 89.
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voetnoot(14)
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De Kluchtige Romant of de Edelmoedige Comedianten, vertaelt door N. Heins, Amsterdam, 1678.
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voetnoot(15)
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De Doorluchtige Comedianten met de hollebollige Ragotin, door L.S. (Lambertus Silvius of v.d. Bos).
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voetnoot(13)
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Gil Blas van Santillane, 's Gravenhage, A. Kloots, 1834.
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