A Monsieur P. Rome.
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Bruxelles 8 Juillet 1876.
Nous sommes ici, en Belgique, en pleine querelle de religion; les élections ont été très accidentées, et depuis lors les esprits ne se sont pas encore calmés. Tous les intérêts sont en lutte, et pour cacher le pauvre moi qui domine tout, on accuse de part et d'autre le trop ou le trop peu de foi, qui est entièrement hors de question pourtant! Comme cette pauvre humanité se donne de la peine pour se rendre la vie désagréable! - En Hollande ce sont les protestants et les catholiques qui se ruinent mutuellement; ici les catholiques se déchirent entre eux en se taxant par degrés de foi! Quelle valeur! En attendant on fait très religieusement sauter les banques, que les grands seigneurs volent, une cièrge en main, l'hostie sur la langue! Et le peuple va toujours son chemin de misère, en parlant de malheurs et en bénissant l'Eglise qui lui promet le Paradis ‘plus tard!’
Dans ce moment nous avons ici, à Bruxelles, une grande ex-position internationale d'objets d'industrie et de sauvetage. Ce mot sauvetage est d'un sarcasme sanglant, quand on voit qu'il s'applique principalement aux ambulances et aux instruments de chirurgie pour couper les jambes et les bras aux militaires, blessés au champ de bataille! - Si l'on ne faisait plus de guerre, est-ce que ce ne serait pas là un sauvetage complet?