Mijn leven
(1877)–Mina Kruseman– Auteursrechtvrij
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tion de vieille femme? Ne soyez jamais alors ni la fiancée ni la femme, ni rien d'amoureux d'un homme marié. Si j'étais à votre place, je crois que j'aimerais mieux jouer la comédie entre femmes seulement, il y aura moins de côté piquant, dirait E. il n'y en aura même point du tout, mais il y aurait moins de jalousie, moins de haine et moins de tout ce qui s'en suit aussi. Ne m'appelez pas prude pour ce, que je vous dis, et ne me croyez pas bégueule, je vous en supplie, mais jugez vous mêmes, si vous ne courez pas grand risque de tomber tout droit d'un amusement dans un chagrin S'il vous faut des hommes pour monter convenablement vos pièces, prenez au moins des jeunes gens, les plus libres et les moins fêtés que vous pourrez trouver, qu'ils soyent vos amoureux, vos maris, n'importe quoi pour dix minutes, une heure, une soirée entière; la pièce jouée, ils rentrent dans les rangs des simples connaissances, et s'il y a par ci par là une petite jalousie inavouable, du moins, elle se cachera par amour propre et n'aura pas le droit de vous reprocher un regard ou un sourire qu'elle vous envie. Donc, voici la conclusion du sermon; je vous enverrai dans la petite malle, que nous sommes occupés à emballer pour vous, quelques pièces de comédie, qui vous plairont, j'espère, puis j'y ajouterai.... devinez quoi? ... une chose tres nécessaire, indispensable même dans la plupart des pièces, et à laquelle je parie qu'aucune de vous n'aura pensé encore! Un objet très difficile à faire pour vous et très facile à envoyer pour moi. Eh bien! Y êtes-vous?... Un bonnet! - L'aviez-vous deviné? Non, hè? ......................... L'amitié entre Mme R. et moi n'a jamais été grande, comme vous savez, maintenant nous nous aimons tout à fait à distance, ce qui me plait infiniment mieux que ces entrevues fréquentes, vides de tout intérêt. ......................... Il y a quelques jours, tout Bruxelles a été en émoi à cause d'un bal, donné par Monsieur et Madame **. Les invitations avaient été faites plusieurs jours d'avance, et le jour du bal même on fait dédire la fête à cause d'indisposition, comme quelques jours auparavant un bal de la cour avait été dédit le jour même, à cause de la mort du Grand Duc Etienne, frère de la Reine. Mais le bal de la cour avait été dédit par les journaux surtout, tandis que le bal de ** l'avait tout simplement été par de petits billets, écrits à la hâte, et envoyés à quelques personnes privilégiées, tandis que les autres, ne sachant de rien, s'occupaient courageusement de leurs toilettes de bal. Le soir venu, le monde accourt. On renvoit les voitures, on entre, on trouve les salons ouverts, bien éclairés, bien chauffés, bien arrangés, mais personne pour récipier qu'un domestique qui annonce que le bal n'a pas lieu. Stupéfaction! colère! puis un | |
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tapage horrible! Chacun a son mot à dire. (On est si beau!) Il me semble que je vois toutes ces personnes pincées, frisées, gantées on ne peut mieux, se fâcher au possible contre leurs hôtes invisibles! On veut partir, mais les voitures n'y sont plus! Et forcément on reste. On continue à écorcher les hôtes malades, on leur accorde tous les beaux noms en harmonie avec la situation (pas le moins du monde avec les toilettes splendides!) Et quand à la fin on s'est décidé à faire bonne mine à mauvais jeu, et à s'amuser de n'importe quelle manière, quand on s'est installé assez confortablement dans les salons des ** et quand la colére commence à s'user un peu, voilà que vers dix heures et demie, une derniére fois les grandes portes du salon s'ouvrent largement pour faire passage à deux dames en toilettes magnifiques. Madame et Mademoiselle ** elles-mêmes! On est trop stupéfait pour se fâcher de nouveau! On les regarde, les salue, les écoute, bouche béante. ‘Mes chers amis (c'est Madame qui parle). Je suis on ne peut plus fachée et triste de ce qui vous arrive, mais je n'y suis pour rien; je vous prie de le croire. J'ai écrit à tous nos invités pour leur prévenir de ce que le bal n'aurait pas lieu; si mes lettres ne vous sont pas parvenues, ce n'est pas ma faute, je n'y puis rien; je n'ai manqué à auqu'une loi de politesse; je vous plains, mais je n'ai rien à me reprocher.’ Puis, après une petite pause, que personne n'eût l'idée d'interrompre, elle reprend: ‘Ma fille avait reçu une invitation à laquelle elle désirait vivement se rendre, moi je ne demandais pas mieux que de l'accompagner, mais notre bal!..... Bref, nous avons dédit le bal. Si vous en avez été informé trop tard, ce n'est pas ma faute, et je vous le répéte, j'en suis fachée pour vous.’ Puis saluant de nouveau, elle fit signe à sa fille et partit avec elle pour la soirée en question, laissant ses hôtes dans une perplexité telle, qu'un silence presque solennel suivit ce brusque départ. A minuit seulement les voitures sont revenues chercher les invités de l'hôtel ** Pendant une quinzaine de jours du moins, tout Bruxelles a eu son mot à dire sur le bal de **, et maintenant encore, si quelque chose ne réussit pas du tout, on appelle cela ‘une réussite à la **.’ Et voici maintenant la fin de l'histoire. Monsieur et Madame ** vivent un peu, comme ......, chacun pour soi. Mais leur fille était revenue du couvent, et pour fêter ce bonheur suprême, ils avaient résolu de donner un grand bal, auquel, à l'honneur de leur fille, ils assisteraient tous les deux. Malheureusement une petite querelle survient; Monsieur prend la résolution de sortir le soir, et Madame, pour le surpasser en politesse se décide à l'imiter. ......................... | |
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Ah! oui, je vous récommande spécialement ‘Par droit de Conquête’ par Legouvé, mon auteur favori, c'est une de ces comédies qui ont tout pour plaire. .........................
Mina. |
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