Oeuvres complètes. Tome VIII. Correspondance 1676-1684
(1899)–Christiaan Huygens– Auteursrecht onbekendNo 2176.
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plaisir si dans ce que vous m'auez fait l'honneur de mescrire vous m'auez mandé franchement vostre sentiment, car cette lettre s'adresse à tous ceux qui liront la critique, et les prie den dire leurs auis, me disposant à respondre pertinemment aux objections qu'on me pourra faire. Puis que vous auez donc bien voulu y faire quelques Remarques, je vous diray pour y respondre, premierement que je n'ay point inuectiué dans la premiere partie contre les sçauans, si ce n'est en me faschant de [ce] qu'il soustiennent ce liure bon nonobstant mes remarques, sans les destruire et sans dire les raisons pourquoy ce liure leur semble si bon, Je nay point parlé des autheurs grecs dans cette premiere partye ni n'ay point deffié ces mrs. les scauans de les traduire, cest seulement a la seconde partye que je le fais, Et je ne pretends point parler des historiens grecs parce quils sont traduits autant bien qu'ils le peuuent estre, mais seulement des Poetes, dont pas vn ne l'a esté jusqu'a present si ce n'est homere, mais cette traduction est si mauuaise qu'elle ne doit pas estre comptée. De plus je nomme presque tous les poetes que je voudrois voir traduits, comme homere, Aristophane, Euripide, Sophocle, Theocrite, Anacreon, J'y adjouste les oraisons de Demostene, et celles d'Isocrate, c'est de ces autheurs là que j'entends parler dans lesquels nos sçauans disent voir de si grandes beautez au stile et à la diction, et c'est ce que je leur nie et que je leur nieray toujours car ils ni nous les feront jamais voir traduits. Pour ce qui est de scaligerGa naar voetnoot3), Je croy n'auoir pas mauvaise raison de me mocquer de la vanité de cet homme, qui se croit presque le seul entre les sçauans en Latin, qui puisse voir les beautez qui sont dans Terence, et j'en dis autant des Peintres quand ils louent des tableaux anciens, ce qu'ils ne font qu'a ceux qu'ils ne croyent | |
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pas s'y connoistre, et n'estre pas peintres comme eux, et ces loüanges qu'ils donnent à ces tableaux, c'est affin de loüer quelque chose, car ils se garderont bien de loüer les ouurages de leurs compagnons. Au reste je n'ay pas peur qu'il vienne vn apologiste pour D.Q. Je voudrois bien que l'enuye en prist à quelqu'un, ce seroit ou vn miracle à donner de l'estonnement, ou vne piece a faire mourir de rire, ou de mal de coeur, je deffie la dessus tous les scauans aussy fortement que sur les traductions des Poetes grecs. Ainsy je me tiens fort satisfait puisque vous n'auez rien trouué à redire à la Critique que jay faite du liure. Car vous auez veu que je ne suis pas bien esloigné de me bien remettre auec les scauants quand ils voudront m'esouter et me Respondre, si vous me faites l'honneur de reuenir me voir nous en parlerons dauantage. Cependant la Compagnie vous remercye de vostre souuenir et vous baise les mains et moy particulierement qui suis de tout mon coeur
Monsieur
Vostre treshumble et tresobeissant serviteur Perrault. |
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