Oeuvres complètes. Tome VI. Correspondance 1666-1669

N^o 1779.
H. Oldenburg à Christiaan Huygens.
21 novembre 1669.

La lettre se trouve à Leiden, coll. Huygens.
Elle est une réponse au No. 1770. Chr. Huygens y répondit le 22 janvier 1670.

A Londres le 11. Novembre 1669.

Monsieur,

Puisque vous auez la bonté de me tesmoigner vostre approbation de ce qui a esté mis iusques icy dans les Transactions, apres que ie vous auois prie¹⁾ de faire vos Auimadversions là dessus en amy, ie n'oserois vous mescroire en ce que vous m'y auez respondu; d'où ie prens plus de courage à continuer mes communications, et de vous en envoyer les inprimés.

Touchant la mesfiance, que vous et vos Messieurs entretenez touchant le Vol des aragnees, ie ne scauray dire autre chose, si non qu'il y a des Verités Improbables, outre que nous auons sollicité ceux, qui nous l'auoient communiqué comme leur propre observation, d'y veiller soigneusement à l'avenir, et de nous faire part de ce qu'ils en remarqueront dorenavant, soit pour la confirmation de la chose, soit pour le contraire²⁾. Cependant nous sommes persuadés tant de la probité, que de la curiosité des Autheurs³⁾ et ne pouuons croire nullement, qu'ils se laisseront

1) Consultez la Lettre N^o. 1770.

2) Consultez le compte rendu de la séance de la Société Royale du 10 février 1669/70 (V. st.) et les Philosophical Transactions, N^o. 65, du 14 novembre 1670, p. 2103.

3) Martin Lister, né en 1638 et mort à Epsom le 2 février 1712. Il s'occupait surtout de zoologie; ses expériences sur les araignées sont connues. Il entra à la Société Royale en 1671, fut créé M.D. à Oxford, et passa à Londres en 1684, où, en 1687, il entra au collège Royal des Médecins et en 1694 devint censor. En 1698 il accompagna l'ambassadeur, le duc de Portland, à Paris, et publia alors l'ouvrage:
A Journey to Paris in the Year 1698. By Dr. Martin Lister. London. Printed for Jacob Tonson at the Judges-Head near the Inner-Temple-Gate in Fleetstreet, and at Grays-Inns-Gate in Grays-Inns-Lane. 1698. in-8^o.

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facilement tromper, et beaucoup moins, qu'ils soient portés à tromper les autres.

Quant à nostre Verre de 50. pieds, nous attendons tous les iours ce que Monsieur Hevelius a trouué de sa bonté. Nous n'auions pas prest, lors que nous l'essayames, vn bon tube, et le vaisseau, qui le devoit porter audit Hevelius, pour qui on l'auoit fait⁴⁾, nous pressa de l'empaqueter, en sorte que nous ne le pouuions examiner qu'un soir, et dans vn vieil meschant Tube.

On escrit d'Italie, qu'on s'y est servi auec succes d'une Lunette de 50. pieds sans Tuyau, pour la Lune. Assurement, quoy que cela se puisse pratiquer assez facilement sur les Objets de iour, et encor sur vn tel object comme la Lune, on trouuera bien plus grande difficulté de s'en servir pour les autres Planetes et les Estoiles.

Puisque vous doubtez de la bonté de vos verres de 45 pieds, à cause des defauts de la matiere, on taschera⁵⁾ de vous fournir de quelque bonne matiere d'icy vû qu'on en fait proche de cete ville (à Lambeth) qui se trouue meilleure que celle de Venise, sans veines, et fort propre pour les telescopes.

Nos Messieurs vous remercient des bonnes nouuelles dont vous leur auez fait part, touchant vos horologes, que vous ditez auoir fait le voyage de Candie auec succes, et dont vous vous reservez encor les particularitez, que pourtant vous croyez meriter estre sceuës. Ils seront bien aises, quand vous le iugerez à propos, d'en scauoir le detail, et se persuadent, que vous n'en remettrez pas trop longtemps la communication. Je ne doubte pas, que vous n'ayez sceu, que Signor Campani est allé à Florence pour faire voir au Grand Duc vn horologe, qui est dans le Vuide. Vous nous obligerez, si vous en scauez le detail, de nous dire, de quelle facon elle est faite; si c'est avec vn pendule, ou autrement, et en quelle maniere on la remonte etc.

Ledit Campani pretend, qu'on s'en puisse servir sur la mer tres-utilement; ce qu'on ne croit pas encor icy. De plus, un amy me mande de Rouën, que l'Invention de la Longitude⁶⁾ par la conoissance certaine et exacte du mouuement de la Lune, et par le moyen d'un Instrument, fait à prendre 2. ou 3 observations du Soleil et de la Lune à mesme temps, est à present soubs l'Examen de vostre Academie.

4) Consultez la Lettre N^o. 1761.

5) Dans la séance du 4 novembre 1669 (V. st.) la Société Royale avait résolu de faire parvenir à Chr. Huygens une pièce de ce verre.

6) Consultez la Lettre N^o. 1732. On peut lire dans l'Histoire de l'Académie Royale des Sciences depuis son établissement en 1666 jusqu'à 1686 (publiée en 1733) Tome I, p. 74, le résultat de l'examen de cette proposition.

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Je vous prie, Monsieur, de nous dire ce qui en est; et particulierement, si la Table des heures, minutes et secondes, auxquelles pendant tout ce mois de Novembre la lune deuoit, selon cet Autheur, arriuer au meridien de Paris, se confirme par les Observations?

Monsieur Boyle vous salue tres humblement, et dit, que la difference de l'effet, quand l'eau frappe contre le verre, estant accompagnée d'Air, et quand elle le fait sans Air, est bien considerable, le son de l'Eau tombante contre le verre sans Air estant comme si c'estoit quelque pièce de bois ou de pierre, bien differant d'auec celuy lá, qui se fait de l'eau secouée contre le verre où il y a de l'Air. Il adjouste, que bien que dans des tuyaux plus larges l'Air passe plus facilement, et ainsi ne fait pas vne resistance si notable à la liqueur tombante, que dans de plus estroites, si est ce pourtant, qu'il s'y trouue plus de resistance, que quand l'Air en a esté espuisé. Il n'a pas fait cete Experience dans des Tuyaux bien larges, à cause du plus grand danger de casser les verres.

J'ay baillé cejourdhuy a deux Genevois, passans d'icy à Paris, et nommés Monsieur Tronchin⁷⁾ et Monsieur Chouët⁸⁾, l'Optique de Monsieur Barrow, dont ie vous parlay⁹⁾ dans ma precedente. J'espere que le livre de Monsieur Wallis de motu et mechanice se verra aussi bien tost. Dans le mesme pacquet, ou il y a le Traité de Barrow, i'ay enveloppe quelques fueilles de Monsieur Boyle touchant la Question, s'il y a un repos absolu et parfait in Quiesscentibus solidis, qu'il a fait inprimer comme vne Addition à ses Essays de la Fluidité et Fermeté¹⁰⁾, dont on a fait vne 2^de Edition. J'ay addressé le pacquet à Monsieur Justel, qui ne manquera pas de vous faire part de ces livres lá. Le mesme Monsieur Boyle fera bientost inprimer son introduction à l'Histoire des Qualités particulie-

7) Louis Tronchin, second fils du théologien protestant genevois Tronchin, naquit le 4 décembre 1629 à Genève, où il mourut le 8 septembre 1705. En 1654 il était pasteur protestant à Lyon; en 1661 il enseigna la théologie à Genève; il était modéré et les cantons se partagèrent entre lui et le fougueux calviniste Turini; ce ne fut qu'après la mort de celui-ci en 1687, que ces querelles s'apaisèrent.

8) Jean Robert Chouet naquit à Genève en 1642 et mourut le 17 septembre 1731. En 1664 il devint professeur de philosophie à Saumur et y adopta la doctrine de Descartes. Il revint en Suisse en 1669, devint conseiller de la république en 1686 et eut souvent des missions diplomatiques.

9) Consultez la Lettre N^o. 1773.

10) Certain phisiological Essayes, and other Tracts, by the Honorable Robert Boyle, Fellow of the Royal Society, the Second Edition, enlarged, London: printed for Henry Herringman in the New Exchange. Anno 1669.
Il en existe une édition latine:
Tentamina quaedam Phisiologica, diversis Temporibus & Occasionibus conscripta à Roberto Boyle, Nobili Anglo, Cum ejusdem Historia Fluiditatis et Firmitatis. Ex Anglico in Latinum Sermonem Translata. Amstelodami, Apud Danielem Elzevirium. cIƆIƆclxvii. in-12^o.

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res¹¹⁾; ou il y aura vn Appendix touchant les Qualités Cosmiques ou Systematiques, come il les appelle.

Monsieur Hook a proposé vne maniere bien facile de diviser vne ligne courte en tant de parties que l'on voudra en proportionant vne telle ligne à vne autre plus longue; ce qu'il pense pouuoir appliquer à des Telescopes, pour faire des Observations Celestes bien exactes.

On s'y employe¹²⁾ par ordre du Roy, qui veut, qu'on trouue sur Terre, quelle est la veritable mesure, qui respond à vn degree du meridien. On a demeuré d'accord du lieu ou l'Experience sera faite, et Monsieur Hook fait l'apprest des Instruments, qu'il y juge necessaires. Je suis

Monsieur

Vostre treshumble et tresaffectionné serviteur Oldenburg.

A Monsieur

Monsieur Hugens de Zulichem dans la Bibliotheque du Roy à

Paris.

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11) Tracts written by the Honourable Robert Boyle, about the Cosmical Qualities of things: the Temperature of the Sub-Terraneal and Sub-Marine Regions; and the Bottom of the Sea. together with an Introduction to the History of Particular Qualities. Oxford 1670. in-8^o.
Il en existe une édition latine:
Introductio ad Historiam Qualitatum particularium. Cui subnectitur Tractatus de Cosmicis Rerum Qualitatibus, de Cosmicis Suspicionibus, de Temporis Subterranearum Regionum, de Temporis Submarinarum Regionum, de Fundo Maris. Ab Honoratissimo Roberto Boyle. Nobili Anglo, e Societate Regia. 1670.

12) Dans la séance du 21 octobre 1669 (V. st.), la Société Royale avait nommé, sur la demande du Roi, une commission à cet effet. Les évêques de Salisbury (Seth Ward), et de Chester (John Wilkins), Sir Robert Moray, Sir Paul Neile, Dr. Wallis, Dr. Christopher Wren, Dr. Goddard et Mr. Hooke, ou bien trois ou plus d'entre eux feraient partie de ce comité.