Oeuvres complètes. Tome V. Correspondance 1664-1665

N^o 1445.
Christiaan Huygens à J. Chapelain.
20 août 1665.

La copie, le sommaire et la minute se trouvent à Leiden, còll. Huygens.
La lettre est la réponse aux Nos. 1430 et 1435. J. Chapelain y répondit par le No. 1451.

Sommaire:
Qu'il aura vu que sa lettre n'a point estè perdue. Obligè de la peine. la machine y estant que ce seroit temps a cett heure, mais puis que je doibs aller a Paris je serois marry de luy donner plus de peine. que j'ay priè Montmor de faire veoir l'horologe a Thuret. que je m'assure qu'il trouvera l'invention bonne, et ne donnera plus de croyance aux fausses nouuelles dont il estoit alarmè. Et moins encore quand il en aura vu l'espreuve. c'est la derniere perfection des horologes et l'experience continuelle que j'en fais m'en fait veoir l'exactitude. que Monsieur de Carcavy ne m'avoit rien mandè de tenir l'affaire de ma vocation secrette. conclu arrestè. de l'obligation que je luy veux avoir toute ma vie de &c.

Chapelain.

20 Aoust 1665.

Monsieur

Scachant que ma derniere¹⁾, que je vous escrivis il y a 5 ou 6 semaines, vous mettroit en repos touchant ce qu'estoit devenu vostre penultieme²⁾, et voiant que le Sieur Thuret differoit de traiter jusqu'a ce qu'il eust veu arriver a Paris de mes horologes, j'ay creu que de me taire pour quelque temps, c'estoit vous delivrer d'importunitè. Voila maintenant qu'une de ces machines est entre les mains de Monsieur de Carcavy, et une autre de la facon qu'elles doivent servir sur mer chez Monsieur de Montmor, que j'ay priè d'y appeller le dit Sieur Thuret pour la mettre en estat et asin que la voyant il ne donne plus de croy-

1) Consultez la Lettre N^o. 1429.

2) C'est la Lettre N^o. 1417.

[p. 440]

ance aux faux rapports qu'il avait escoutez au desavantage de cette invention. Il faut que ce soient de gens tout a fait malicieux qui font courir de tels bruits, car bien loin que je trouue des deffauts dans mes horologes comme ils pretendent, j'esprouve de plus en plus par les continuelles experiences que j'en fais, qu'il n'y a rien de comparable a leur justesse, et qu'ils en ont plus qu'il ne faut pour servir heureusement au grand usage ou je les destine. Ce seroit donc maintenant le temps de reprendre le traitè avec le Sieur Thuret, mais puis qu'il y a apparence que je me trouueray a Paris devant qu'il soit longtemps je croy qu'il se peut differer jusqu'a ce que je suis venu, sans vous donner plus de peine, et je ne laisseray pas de vous avoir la mesme obligation que si vous l'aviez parachevée puis que vous avez eu la bontè de la vouloir entreprendre.

J'ay^a) estè bien aise de veoir que comme je l'avois pensè l'on vous avoit fait part de l'affaire de ma vocation, en suite de quoy vous aurez aussi sceu qu'elle a estè entierement arrestée depuis. J'espere de la generositè du Roy et de la faveur de son grand ministre que je ne me repentiray pas de m'estre accordè franchement a la premiere proposition qu'on m'en a faitte, et je scauray bien tousjours ce que je vous dois Monsieur de ce que par vostre tesmoignage vous m'avez fait valoir beaucoup plus que je ne merite. Quant a mes escrits dont j'ay promis la publication il y a longtemps, je pourrois vous alleguer patriae iniqua tempora, et la difficultè que font les imprimeurs de rien entreprendre, mais pour vous dire la principale cause de ce retardement, c'est qu'ayant escrit ces ouurages il y a bien long temps, je n'y ay trouvè pas peu a changer et adjouter. Vous devez croire cependant que je ne cesse de travailler et que si je me resous tard a faire au Roy les offrandes promises c'est pour les rendre plus dignes de sa grandeur. Je suis de tout mon coeur &c.

a) Huygens a écrit en marge de la minute:
Je n'avois pas mal conclu qu'on vous en auroit fait part. et certes &c. Il m'a escrit depuis &c. l'obligation.