Oeuvres complètes. Tome V. Correspondance 1664-1665

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N^o 1266.
Christiaan Huygens à R. Moray.
31 octobre 1664¹⁾.

Une copie²⁾ se trouve à Londres, Royal Society.
La lettre est la réponse au No. 1256. R. Moray y répondit par le No. 1268.

A la Haye ce dernier Oct. 1664.

Monsieur

Vostre derniere a estè du 13 septembre lors que vous n'auiez pas encore receu la miene³⁾ ou j'auois mis quelque chose des pendules figures pour estre communiquè a Milord Brouncker. Je seray bien aise de veoir le resultat de ces dernieres Experiences faites en St. Paul et ou il y en devoit auoir aussi du tuyau de ☿. A propos de cela je vous diray que Monsieur Sluze de Lieges m'a envoyè⁴⁾ sa maniere nouuelle de Thermometre qui est un tuyau environ de 3 pieds et large d'un pouce plein d'eau salee dans la quelle nage une petite balle de cire meslee avec quelque chose de plus pesant, a fin de faire qu'elle se soustiene vers le milieu du tuyau, cette balle suivant le different degrè de chaleur monte et descend, quoy que non pas soudainement comme l'eau dans le thermometre vulgaire; mais aussi il n'est pas sujet a la diverse pression de l'air qui altere ces autres sans changement de chaleur. J'en ay fait l'experience, et vous voyez qu'elle est fort aisée.

Quelque chose que dise Campani de son tour pour tailler les verres⁵⁾ je ne puis croire que ce moyen puisse reussir, c'est a dire, sans l'usage de forme. L'ouuerture du verre de Reeues est passablement grande (2 4/10 pouces) mais je croy qu'elle pourroit estre d'avantage dans cette longueur. Ce seroit une chose digne de recherche pour scauoir, quelle peut estre cette ouuerture dans chasque verre de telle ou telle distance de foyer ce qui ne depend que de l'experience, en travaillant de grands verres au double de ce qu'on fait a cetheure dans chaque forme. J'ay vû a Paris auec estonnement un verre de 12 pieds de l'ouurage de Divini qui souffroit une ouuerture de 2 pouces, mesure de Paris.

Vous estiez en dessein de faire expedier la patente pour les chaises roulantes, ce que je desire scavoir si vous l'aurez executè.

Je croy que cela est fort bien au nom de Monsieur Hook et pour mes suretez je vous assure, que j'en suis fort en repos. pourtant si la chose vaut la peine il faudra suivant mon traitè, que j'ay fait en France, que je vous envoie copie de ce qu'ils veulent que je contracte avec les participans en Angleterre, car vous scavez que ces Messieurs s'y sont reseruez une part. Pour ce qui est du Priuilege des horolo-

1) Le N^o. 1261, écrit le 21 octobre, est le sommaire de cette lettre.

2) La copie est de la main d'Oldenburg.

3) Voir la Lettre N^o. 1258.

4) Consultez la Lettre N^o. 1259.

5) Consultez la Lettre N^o. 1253.

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ges, puisque mon nom n'y peut pas entrer, il me semble, qu'il importe fort peu que j'y face mettre celuy d'un autre en ma place. Et que Monsieur le Comte de Kinkardin peut bien le prendre au sien seul, en m'enuoyant pourtant quelque assurance de ce que cela ne derogera point a mon droit, comme je feray de mesme quand je l'auray obtenu icy. Je differe tousjours et trop peut estre a la demander, voulant estre seur de mon fait devant qu'en faire du bruit. C'est pourquoy je continue sans cesse a faire des experiences de l'exactitude de mes nouuelles montres, ce qui est aucunement difficile, tant que je n'en ay pas deux de mesme, ce qui sera pourtant dans peu de jours. Cependant j'y trouue bien plus de justesse que dans celles de la premiere facon, et je tasche de l'augmenter de plus en plus.

J'attens a ce soir un balot, que mon Pere a envoyè de Londres, ou il y aura du verre qu'on fait dans vos verreries, et des verres taillez de Reeues pour representer les objects dressez dans une chambre obscure, ce qui me tarde de veoir comme il reussit. L'on admire a Paris le microscope, que mon Pere y a portè de sa facon qui m'escrit aussi des merveilles d'une lunette de 2½ pieds a 4 verres de Campani, qui fait voir droit et fait a ce qu'il dit, une fort belle ouuerture.

Depuis que je vous envoyay dernierement³⁾ des pendules figurez, j'ay penetrè plus avant cette matiere, et j'ay trouuè des regles generales pour donner des pendules isochrones tant a des corps solides, qu'aux figures planes, en quoy il y a des problemes aussi difficiles que j'en scache.

Cet article est pour le cher Mylord Brouncker, auec les tres humbles baisemains de

Vostre et son serviteur le plus acquis Chr. Hugens de Zulichem.

3) Voir la Lettre N^o. 1258.