Archives ou correspondance inédite de la maison d'Orange-Nassau (première série). Tome III 1567-1572
(1836)–G. Groen van Prinsterer– Auteursrechtvrij* Lettre CCCXLIII.
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Ga naar margenoot+Monsieur le Comte vostre frère luy a donnée, et l'ordre qu'il y a tenu pour l'exécuter, aussy de ce que vous en pouvez espérer, le conseiller Taffin, présent porteur, vous en pourra discourrir plus amplement, comme estans ung de ceulx qui plus volontiers et mieulx s'y est emploié, lequel je vous prie de croire pour ce regard et aussy en d'autres pointz desquels je me suis tenus sur luy, ayant bon tesmoignage de sa fidélité et suffizance. Seulement je vous diray, combien que l'affaire n'ayt pas esté expediée si tost que nous eussions bien désiré, qu'il n'a toutesfois tenu à Monsr de Lumbres, qui s'en est très bien acquicté, mais vous scavez comment le peuple est difficile à remuer. Quant à noz affaires de France, on y parle tousjours de la paix, et par les dernières nouvelles que j'en ay receues, j'ay esté adverty que Monsr de Byron est retourné de devers Messieurs les Princes de Navarre et de Condé, et est arrivé en Court le xe de ce mois; que les Srs de Beauvoir la Nocle et de Thelligny l'accompagnoient, mais que le Sr de Beauvoir est demeuré malade à Cahors et son compaignon a donné jusques à la Rochelle, aiant prins jour à se rendre en Court le xve du présent. On m'advertist que tous articles sont bien accordez, excepté que Messieurs les Princes requièrent que l'exercice de la religion soit libre, sans exception des lieux et des personnes, qu'ilz ne peuvent ny doibvent rien conclurre sans cela, ce qu'on pense qu'on ne nous vouldra accorder. Toutesfois je n'ay point encore eu advertissement de la Rochelle de ceste dernière négociation. Messieurs les Princes estoient au Comté de Roussillon, s'estans retirez des environs de Tholoze, après avoir chastié les juges de la ditte ville, comme ilz l'avoient merité, non seulement | |
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Ga naar margenoot+pour avoir exercé durant la guerre toutes sortes de cruaultez et de violences, mais principalement pour avoir faict mourir après les secondz troubles ung GentilhommeGa naar voetnoot(1) de bon lieu, qui estoit à feu Monsieur le Prince de Condé, qui alloit vers eulx avec ung saufconduict du Roy pour leur porter l'Edict de la paix. Leur armée, par le rapport mesmes de leurs ennemys, et comme aussy j'en ay esté adverty par Monsieur l'Amyral mon frère, est bien gaillarde et bien nettoyée de toute maladie, et font assez bien leurs affaires ès Gouvernemens de Languedoc et de Guyenne. Les autres de la Rochelle ayant repris Marans le viie du passé, prindrent de force Olonne, et aians taillé en pièces la garnison et plusieurs mariniers et faict Landereau leur chef prisonnier, ont amené soixante navires à la RochelleGa naar voetnoot(2), desquelz cincq estoient équippez en guerre, et bruslé grand nombre d'aultres qu'ilz ne pouvoient emmener. Depuis ilz ont assailly Brouage et Marennes qu'ilz ont aussy pris et encores deux gallères et deux qu'ilz tiennent assiégées en la Charante, et ont faict tellement, qu'excepté | |
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Ga naar margenoot+Sainct Jehan d'Angely, ilz ont réduict tout le pais des environs de la Rochelle. Cependant le bruict est que les ennemys assemblent leurs forces pour assiéger la Charité. Quant à voz navires qui sont à présent en ceste coste, il me semble que mon debvoir porte de vous advertir ce que j'en cognois, c'est qu'il est plus que expédient que vous y pourvoiez d'ung homme de commendement qui ayt puissance de tout ce qu'il verra nécessaire, avec une ample révocation de toutes autres commissions, tant celles que vous auriez données, comme celles que Monsieur le Comte vostre frère auroit données du temps qu'il estoit en Phrize, car je n'y voy pas grand ordre, mesmes ainsy comme ilz font, s'ilz prenoient tout le monde, il n'en reviendroit aucun proffit, ny à vous, ny à la cause, et qui pis est, après que je leur ay faict donner congé de pouvoir se rafreschir de vivres et radouber leurs navires en quelques havres et rades de ce Roiaulme, où ilz ont esté souffertz à ma requête, ilz se sont si mal gouvernez que hier, par ordonnance de la Roine et de son conseil, il fut commandé de les prendre et arrester, pour avoir poursuivy quelques navires jusques ès portz en dedans les franchises de ces Royaulme; de sorte que on a esté contrainct de tirer sur eulx, dont il y a eu grands plainctes, lesquelles, après que sa Majesté m'eut hier faict entendre, je n'é failly d'envoyer en diligence les faire advertir de se retirer et mectre incontinent en plaine mer. Vous y donneray doncq ordre, s'il vous plaist, et en attendant je ne laisseray de leur faire tout le secours qu'ilme serat possible pour l'amour de vous, comme aussy je le feray à l'advenir pour le service de la cause et le vostre en particulier, d'aussy bon cueur, qu'après | |
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Ga naar margenoot+vous avoir présenté mes humbles recommendations à vostre bonne grâce, je prieray Dieu, Monsieur, vous vouloir multiplier les Siennes. De [Schm], ce xxiiij d'apvril 1570.
Vostre humble serviteur et amyGa naar voetnoot1, le Cardinal de Chastillon.
A Monsieur, Monsieur le Prince d'Aurenges. Ces avertissements ne furent pas inutiles. Le Prince, par des Ordonnances rendues à Dillenbourg le 10 août, nomma le Seigneur de Lumbres son Amiral; renouvela les défenses d'exercer aucune hostilité hormis contre le Duc d'Albe et ses adhérents, et régla dans quelques articles l'ordre à tenir sur les vaisseaux. On y remarque entr'autres celui-ci. ‘Dat de Capiteinen elk op syn schip hebben sullen eenen Minister om Gods woord te verkondigen, gebeden doen, en de soldaten met de schippers houden in Christelyke zedigheid.’ Bor, 323, sqq. Le même jour le Prince écrivit à Basius d'avertir les capitaines qu'ils eussent à s'abstenir soigneusement de causer le moindre trouble à la Princesse Anne d'Autriche, promise à Philippe II, et qui devoit sous peu s'embarquer pour l'Espagne. |
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