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† No CCCXXIa.
Projet d'alliance du Prince d'Orange avec l'Amiral de Coligny et le Prince de Condé pour obtenir entière liberté de conscience dans les Pays-Bas et en France.
Ga naar margenoot+*** Le bruit d'une telle alliance se répandit bientôt. ‘Dicitur Orangius inito foedere cum Condaeo ad ipsum cum exercitu proficisci.’ Languet, Ep. secr. I, 75. Les protestations de dévouement au Roi ne sont pas de vaines formules. En France aussi on ne résistoit que par nécessité et pour la défense de la foi. Les Réformés ne désespéroient pas de Charles IX, et en effet il paroît que, de lui-même, le jeune Roi n'étoit pas mal disposé envers eux. Aux menaces des Ambassadeurs du Pape et du Roi d'Espagne il répondit: ‘Si vestri Principes mihi bellum inferant, ego ipsis objiciam meos Huguenotos, quos scio in ea re mihi alacriter obtemperaturos.’ Languet, Ep. secr. I. 64. Il désiroit le maintien de la paix et l'exécution des promesses qu'on avoit faites a ceux de la religion. ‘Cum admonitus esset eos qui nostram religionem profitentur, necessario adigi ad arma denuo sumenda, ad salutem suam tuendam, cum nihil observaretur eorum quae ipsis sunt promissa, cum de pace est actum; significavit matri se omnino velle ut quae nostris essent promissa, ea bonâ fide observarentur.’ l.l. p. 69. En tout cas il n'étoit question, ni dans les Pays-Bas, ni dans la France, de s'affranchir du pouvoir légitime. On ne sauroit mieux exprimer les principes des Protestants que par ce passage d'un auteur catholique relatif aux Ligueurs: ‘Dévouement sans bornes, soumission pleine d'amour au Prince, fidèle à Dieu, et qui gouverne selon sa loi. Mais si, abusant contrece même Dieu dela puissance qu'il a
reçue de Lui, il s'affranchit de ses commandemens, met en péril la foi des peuples, substitue la force au droit, ses volontés à la justice, renverse les règles, et s'efforce d'élever un pouvoir humain sur toutes ces ruines: résistance inflexible, inébranlable
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Ga naar margenoot+résolution de tout sacrifier, repos, biens, et la vie même.’ Des progrès de la Révol. p. 79. ed. Brux. 1829.
Les événements justifièrent bientôt les précautions de Condé et de Coligny. Le Roi ayant cédé aux influences corruptrices de sa mère, on donna ordre de les saisir: ils n'échappèrent qu'avec beaucoup de peine aux poursuites. En septembre fut publié un Edit par lequel on interdisoit aux Huguenots tout exercice de leur religion: le Chancelier de l'Hôpital fut renvoyé: la guerre civile éclata de nouveau. - Pour apprécier la position des protestants, il faut avoir une juste idée de la férocité de leurs adversaires. Languet écrit en 1568: ‘Monui interdum viros alicujus auctoritatis quantum scelus esset cogitare de interficiendis iis qui nostram religionem in Gallia profitentur, cum tam multi sint numero, et sint innocentissima pars populi. Sed statim respondebant nemini esse parcendum, quando agitur de publica tranquillitate, et si ducenta aut trecenta millia hominum interficiantur, intra triginta annos posse plures renasci. Cohorrescebam ad tales voces.’ Ep. secr. I. 72. Chez beaucoup d'entre ceux qui influoient sur le Gouvernement de la France, cette impassibilité sanguinaire étoit moins fanatisme religieux que calcul politique: c'étoit là l'école italienne. ‘Haec est humanitas quam didicimus et quotidie discimus ab Italis, quorum videntur deductae ad nos coloniae; tam multi ex iis omnes Galliae angulos suis sceleribus polluunt et contaminant.’ l.l.
Condé étoit, aussi peu que le Prince d'Orange, un Seigneur ambitieux, fomentant la révolte pour augmenter son pouvoir. Ce n'est qu'avec peine qu'il se décida en 1562 à prendre les armes: ‘Il se faschoit d'estre contraint d'entrer en guerre contre sa propre nation.’ La Noue, p. 804. ‘Excellent Chef de guerre, néantmoins amateur de paix ... Ce qui le rendoit plus recommandable, c'estoit sa fermeté en la Religion.’ l.l. p. 961. ‘Je sens au vif,’ écrit il lui-même en 1563, ‘telle présence des grâces de Dieu en moy, que je me sens beaucoup plus délibéré de perdre une vie ici et d'y espandre mon sang pour avancer l'honneur de Dieu et le repos de ses enfans, que je ne fus onques, me contentant (comme aussi il y a bien de quoy) du dot d'im- | |
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Ga naar margenoot+mortalité qui m'est appresté pour eschange de tout ce que je puis ici perdre.’ De Bèze, Hist. des Egl. Ref. II. 277.
Coligny ‘a tousjours eu la pieté en singulière recommandation et un amour de justice..... Il n'a point cerché ambitieusement les commandemens et honneurs, ains en les fuyant on l'a force de les prendre pour la suffisance et preud'hommie.’ La Noue, p. 1008. Quant à sa conduite envers le Roi, il pouvoit lui dire aux approches de la mort: ‘Testis est mihi Deus, ad cujus tribunal jam sisti videor, me quamdiu vixi fidelissimum semper erga Majestatem Tuam et addictissimum fuisse perpetuoque et ex animo optasse ut quam florentissimum ac quietissimum regnum diutissime obtineres; et tamen non ignoro non defuisse qui me proditorem ac perduellem, et regni tui perturbatorem appellarent. Sed confido Deum inter me et illos disceptatorem futurum.’ Thuanus, Histor. II. 812. D. ed. Genev. 1620.
Nous Louys de Bourbon, Prince de Condé etc, Gaspar de Coligny, Admiral de France etc. et nous Guilliaulme de Nassau, Prince d'Oranges etc. Ayants devant les yeulx la gloire de Dieu, la loyaulté et obligation que nous debvons à nos Princes, lesquels nous voyons par mauvais conseilliers qui ont occupé leurs oreilles, estre tombez en telle mécognoissance qu'ils ruinent leurs propres biens et fidelles subjects, et aliènent les affections d'iceulx, tellement qu'ils se mettent en dangier de perdre leurs Royaulmes, et à la fin estre accablez par ceulx la mesme qui les ont à cela matésGa naar voetnoot1, ou pour le moins ils ne peuvent eschapper qu'ils ne voyent en leurs dominations ung terrible désordre et pitoyable désolation. Nous doncques, consydérants ces choses, pour obvier à ces inconvéniens et retrancher les desseings des susdicts conseilliers, après avoir meurement pesé les affaires et cognu que leur inten- | |
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Ga naar margenoot+tion est d'exterminer la vraye religion et aussy la noblesse et autres gens de bien, sans lesquels les Roys ne peuvent estre maintenus en leurs Royaulmes, espérant sur le prétext de cela establir leurs Tyrannies par tout et agrandir leurs dominations, avons, tant pour nous que au nom de la Noblesse, auquels le faict touche à ceste heure de près pour les susdictes raisons, promis en foy des Princes et d'hommes de bien de pourchasser, tant qu'en nous est, la gloire de Dieu, le profict et service de nos Roys, et le bien publicq, et la liberté de la religion, sans laquelle nous ne pouvous vivre en paix; et pour ce que cela ne se peult effectuer, à cause
des grandes forces de noz adversaires, que par une vraye intelligence et alliance Christienne, avons à ceste occasion promis de nous ayder, favoriser et secourir l'ung à l'autre de tout ce que despendra de noz puissances et forces, comme nous trouverons convenir. Les conditions seront affin que rien ne se fasse au dommage de nos Princes, asscavoir: que le secours, envoyé de la part d'ung de nous, sortira du pais à la requeste de cesluy-la auquel on aura donné le secours, et cela quant il aura pleu à Dieu pacifier les affaires, se contentant de leurs payemens, sans lesquels puyssent quereller autre chose que se soit, et est nécaissaire d'entendre que le secours envoyé se payera par cesluy-la de nous qui l'aura demandé, et fault que ceste alliance demeure tellement ferme, que, quant il plairoit à Dieu favoriser l'ung ou l'autre pais en luy donnant entière liberté de conscience, que pour ceste occasion ceulx qui seront si heureulx, ne laisseront de secourir l'autre partye, comme si ils estoyent en la mesme peine; que se fera toutesfois sans inquiéter la paix faicte et repos publicq,
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Ga naar margenoot+et nous sommes estés poussez et matés à ceste sçainte aliance d'aultant plus, pource que nous cognoissons qu elle ne portera poinct seulement profict à la France et au Pais-Bas, mais aussy à tous les Princes de l'Empire contre lesquels nous sçavons qu'on a desjà complotté. Nous protestons doncques de tenir ceste alliance ferme et inviolable pour le service de Dieu, des Roys nos souverains, et du bien publicq, sans lequel les Roys ne peuvent florer, et pour plus grande seurté avons signé ceste et sellé de nostre sçau accoustumé. Le aoust l'an 1568. |
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