Archives ou correspondance inédite de la maison d'Orange-Nassau (première série). Tome III 1567-1572
(1836)–G. Groen van Prinsterer– AuteursrechtvrijLettre CCLXXVII.
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Ga naar margenoot+Monsieur, d'aultant que ce ne seroient que redictes de vous faire part de noz nouvelles, je m'en suis gardé jusques à tant que quelqu'un (dont à Breda m'avez délivré des lettres) m'en eust fourny une infinité, dont je vous escriray la substance au plus prez qu'il me sera possible, (ayant laissé l'originel entre les mains d'un quidam qui est plus noir de renom que de nom) espérant qu'il vous sera très agréable qu'i vient d'un de vos plus affectionnés serviteurs et amys qu'ayez pardeçà, qui fait que sans proësme je vous diray ce que le dict personnage m'escript, presque en ces termes, à savoir: que le duc d'Alve arriva à Villefrancque, prez de Nice, le 15me du moys passé, où il se trouva un peu mal, et envoia descendre ce qu'il avoit sur xxxiv gallères à Savonne prez de Gennes; depuis il a marché vers Milan pour y faire sa masse, et a escript-à Monsr de Savoye de lui tenir ses passages prest pour son armée, et de l'accommoder de trois cent pyonniers pour le conduire jusques à la Franche-Conté, où, comme vous aurez peu savoir, les vivres sont tout prests, et en Luxembourg pareillement, pour son dyct passage. Le Cardinal de Granvelle a escript chose asseurée à un de ses amys que le Roy avoit aussi résolu de passer et qu'il espéroit d'estre au Pays-Bas aussi tost que luy, et qu'aux bonnes enseignes il prendroit le chemin de la grand mer pour ce moys de juillet à venir ou pour le plus tard au moys de septembre, et me semble toutefois que l'on se persuade au dict Pays-Bas que les forainz ne viendront point ct qu'elles seront revoquées, mais celuy qui gerit haud molli telum impenetrabile scuto, m'en escript qu'il croit le contraire, et que l'on ayt résolu d'establir l'Inquisition et faire commander â nostre dict Pays | |
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Ga naar margenoot+les Espagnolz comme à Naples, Milan, et Sicile, et de fait le bruict est en la bourse d'Anvers que l'on veult faire un Royaulme des Pays-Bas en prennant couronne soubs tiltre de Roy de Belgues et pense-on que personne ne s'y voudra opposer. Vous aurez sceu, devant nous, comment ilz s'estoient trouvé vers Madame quelques députez d'aulcuns Princes protestans pour faire quelque remonstrance à l'advantage de ceulx de leur Religion et qu'on n'a pas bien pris leurs dictes remonstrances, comme j'ay entendu bien au long par le raport de plusieurs. Le Comte de Künigstein est passé depuis naguères à Anvers, allant en Angleterre de la part de l'EmpereurGa naar voetnoot(1). Lebruict est que c'est pour implorer ayde contre le Turcq, mais la plus commune opinion est que c'est pour renouveller les propoz du mariage avecq l'Archiducq Charles, (lequel, en tant que je cognois le train des affaires d'Angleterre, ne se fera jamais, tant que milord RobertGa naar voetnoot(2) le mignon survivra). Si le désastre arrivé à la pouvre Reyne d'Escosse n'est cause du divorce, laquelle s'estoit desjà remariée au Comte de BadouelGa naar voetnoot1, mais on en dict de piteuses nouvelles, que je craing estre trop vrayes, qui est que les estats du pays assemblés l'ont condamnée à prison perpétuelle, le dit Conte à avoir la teste tranchée, et que le filz sorty de son défunct mary estoit déclaré héritier, et estoient le mary et la femme assiégés au Château de DombarGa naar voetnoot2. L'on escript de Venize que le Turcq entroit en pays de Hongrie, et que si bien tost il n'y avoit trefves entre l'Empereur et luy, qu'il pourroit pénétrer plus avant que l'année passée. Dieu l'en | |
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Ga naar margenoot+vueille bien garder, mais si nos Princes ne prennent aultre chemin pour la pacification générale de la Chrestienté et que chacun s'accommode à venir au poinct de raison, il est à craindre que ce cruel barbare ne s'en face seigneur avecq le temps. Je concluray ma lettre du mesme souhait que fait le susdict personnage: à la meinne voulonté que chacun s'efforceast en son endroict d'y stimuler leGa naar voetnoot1 plus grands; je croy, dict il, que de nostre part nous y voudrions entrer de pieds et de mains. - Mais s'il vous plaist ouir parmi des affaires de conséquence un récit, non moins vray que ridicule, d'une chose advenue depuis trois sepmaines en ce au Pays-bas....... Il y avoit à la ville de Gand, à la maison d'un artisan, un chien prodigieusement grand, qu'on appelloit Hermannus par tout le voisinage. Il advint doncq qu'un jour le maistre du logis cuidant que son chien s'estoit esgaré, demandoit à ses serviteurs s'ilz estoit à la maison, à quoy ilz respondirent qu'ouy. Ce qu'oyant un de soldats de la compagnie de ceux qui faisoient le guet soubs le Capitaine Pascharis, et pensant que ce fut Hermannus, le Ministre GuesienGa naar voetnoot2, accourt tout soudain vers le dict Capitaine et luy raconte ce qu'il avoit ouy, espérant en récompense d'enlever la somme de cincquante livres de gros, que le Magistrat avoit promis à celuy qui mettroit le dict Ministre entre les mains de la justice: brief on y procéde à bon escéant et avecq grand silence; et de fait la convention faite combien que chacun d'eux emporteroit de la proye, eux après boire se voulans faire croire, s'acheminent sur la minuict en bonne compagnie vers le dict artisan, tenans sa maison environné de gens armés, de peur que le butin ne leur eschappast; ilz heurtent | |
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Ga naar margenoot+à la porte, le maitre s'advanse et leur demande ce qu'ilz vouloient, qu'on leur ouvrist l'huysGa naar voetnoot1 ou qu'ilz le romperoient à fiveGa naar voetnoot2 force. Là le povre homme commence entrer en craincte et protester qu'il n'estoit ny Geu, ny abbateur des images, mais homme de bien et bon Catholique. Si ouvre il l'huys à ces criars, lesquelz demandent qu'on leur monstre Hermannus, et comme l'artisan affermoit qu'il n'y avoit aultre Hermannus que son chien, il fut pressé et contrainct avecq menaces de leur montrer leur Hermannus, lequel après l'avoir cerché tout par tout, ilz trouvent à la fin à l'estable abboyant et par ainsi revangeant l'outrage fait à son maitre. Ces oiseleurs se voyant frustrez de leur attente s'en vont, et furent constituez prisonniers, mais bientost relaxez à ceste condition que doresenavant ilz ne donnassent occasion de se faire moquer aux enemys de leur religion à telles enseignes, ... De VrimersheimGa naar voetnoot3, près de Meurs, ce 20me de juin 1567.
Intimo ex animo tuus
Carolus Utenhovius,
filius.
Monsr, après avoir appris de voz lettres par quelle voye je vous puisse faire tenir mes lettres, j'espère que ne vous cederay en tous bons offices que scaurez attendre d'un entièrement vray amy et serviteur. Si Monsr Lorich voit le bout de ceste, y trouvera mes bien affectionnées en sa grâce. Je vous envoieray en peu de jours une prognostication faite, l'an 1468, sur le désastre qui menace la Flandre l'an 1568, ensamble la traduction de | |
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Ga naar margenoot+vers Latins qu'ay fait pour Monsr le Comte de Meurs, qui en a eu l'inspection.
A Monsr Monsr de Villiers, chez Monseigneur le Prince d'Orange, à Dillenbourg. |
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