Brieven 1888-1961
(1997)–Alexander Cohen– Auteursrechtelijk beschermd
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Aan Kaya Batutaant.Solo, 26 janvier 1905
Kaya chérie,
Me voici, depuis q.q. heures, dans un endroit où nous n'avons pas été ensemble: a Solo.Ga naar eindnoot1 Je suis parti, ce matin, de Djocdja où je suis resté quatre jours en tout - le temps de voir certaines choses non vues encore: l'Ecole normale, Passar Guedéh,Ga naar eindnoot2 les ruines des Tyandi, Séwou.Ga naar eindnoot3 J'ai été très content d'y retrouver Waldkötter qui a passé avec moi tout son temps libre. Nous avons fait ensemble des excursions suburbaines et nous nous sommes consolés de notre mieux, en parlant des temps passés, de notre temporaire solitude. Mme W.[aldkötter] doit débarquer a Batavia vers la mifévrier. Et voilà pour mon séjour a Djocdja. J'allais oublier: Mme Schafftlein, la dame de l'hôtel Mataram, m'a instamment prié de bien te saluer de sa part. Autre chose: j'ai copieusement engueulé l'assistent-résident de DjocdjaGa naar voetnoot*Ga naar eindnoot4 - celui qui était en même temps que nous chez le Sultan.Ga naar eindnoot5 Figure-toi que ce mufle - a qui j'avais a demander une introduction pour le directeur de l'Ecole normale - non content de me laisser debout dans son bureau (lui restant assis) me paria sur un ton absolument inconvenant. Après m'être emparé d'une chaise j'ai dit son fait a ce monsieur... A Paris les détails. Je viens d'avoir de tes nouvelles - devine un peu comment? - Par le journal: J'y lis: Le Gedé, de Java a Rotterdam, a quitté Périm. J'espère que tu auras eu l'occasion de mettre une lettre à la poste a Périm, car il me tarde d'avoir de tes nouvelles par toi-même.Ga naar eindnoot6 Ta lettre de Padang m'a fait du bien, chérie, j'étais si abattu les premiers jours, seul. Et encore: a Garoet, a Djocdja, où nous étions déjà et où les lieux et les gens m'é- taient familiers, je n'étais pas de trop lugubre disposition - pendant le jour du moins. Mais ici, dans un milieu tout à fait inconnu, je m'ennuie furieusement. Je ne compte rester ici que deux jours, trois tout au plus. A propos: j'ai un esclave. Tu te rappelles Praviro, le garçon qui nous servait les premiers jours a Djocdja et a qui nous avions proposé de nous accom- | |
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pagner? Le jour même de mon retour à l'hôtel Mataram, il vint me demander d'entrer a mon service. Après ‘müre’ réflexion j'ai consenti et nous venons d'atteindre ensemble notre première étape. Coùt: dix florins par mois, plus un dubbeltje par jour pour le makanan.Ga naar eindnoot7 Praviro est très gentil: il est poli, silencieux, élégant et ‘netjes’. Te voici partie 15 jours exactement et me voici a écrire ma troisième lettre: une de Batavia, une de Garoet, celle-ci de Solo. Et pas l'ombre d'une carte illustrée encore. Qu'en dis-tu Hier j'ai reçu deux cartes de visite (a l'occasion de 1 janvier) de M. et Mme Fréchon. Je leur écrirai. Le maire de Cholon,Ga naar eindnoot8 M. Drouhet, en réponse à ma lettre, m'a écrit que je n'ai rien gagné à la loterie de la Maternité. Autre rêve qui s'écroule. Les télégrammes sont supérieurement intéressants depuis quatre jours: les dépêches des journaux, je veux dire: la révolution en Russie (je crois que cette fois-ci c'est sérieux), le Tsar introuvable - d'après les dernières dépêches il se proposerait de filer a Copenhague... Envoiemoi des journaux, encore des journaux, toujours des journaux.Ga naar eindnoot9 Tu sais, je ne resterai plus ici trois mois. Je terminerai mon voyage au plus vite. Je m'ennuie trop sans toi. Avec toi ma joie de ‘voir’ a disparu en grande partie. Je n'aime ‘voir’ qu'à deux - à nous deux - Je t'enverrai bientôt des photos, fixées ou non, je ne sais encore. J'en ai de très belles. En voici une de Mme Rupert et ses esclaves. (Ecris-moi si tu as reçu les autres). Demain j'irai voir q.q. industries et le KratonGa naar eindnoot10 qui, paraît-il, est bien plus beau, c'est-a-dire, bien moins européanisé, que ce-lui de Djocdja. D'ici je compte partir tout droit pour Sourabaya et de la pour Bali et Lombok. (Lettres et journaux a adresser invariablement à Batavia, Poste restante). Ecris-moi le plus souvent possible, Kayouchka dear, et donne-moi des détails sur ton séjour a bord. Et dépêche-toi de trouver et d'arranger un logement, car je voudrais rentrer à Paris au plus tard fin avril. Pas une fleur ici, chérie, pour glisser dans ma lettre. Le temps est pluvieux et triste... Trois tendres baisers, un sur ta bouche, un sur chaque noeuil de ton
Sandro
Amitiés à tout le monde. |
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