Brieven 1888-1961
(1997)–Alexander Cohen– Auteursrechtelijk beschermd
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Aan Kaya Batutaant.Bois-le-Duc 1.7.99 (Mme Polak, Pensmarkt) O Kaya chérie, comme je m'embête ici. J'aurais voulu d'abord attendre ta réponse à ma lettre d'avant-hier - avec le petit historique - mais je veux un peu causer avec toi. Je dis donc que je m'embête ici. Il n'y a que la petite enfant qui me fasse un peu prendre patience. Elle est délicieuse et veut constammant être avec son ‘oome’. Cette nuit elle a couché avec moi dans mon lit. Ça m'a beaucoup amuse et elle était si tranquille. Mais l'inhabitude de coucher avec des enfants de un an m'a empêché de dormir. A tout instant je me penchais sur la petite pour écouter sa respiration. Et puis j'avais une peur bleue de me coucher sur la petite si je m'endormais. Enfin tout s'est bien, bien passé et ce matin je l'ai rendue à sa maman dans un état de parfaite conservation et non-aplatie. - Ma soeur - et mon beau-frère aussi - sont très gentils pour moi, mais moi je suis triste et je voudrais m'en aller. C'est une ville horriblement ennuyeuse ici. Beaucoup d'ivrognes, beaucoup de curés, beaucoup de nonnes, beaucoup de militaires. Tout le monde à l'air béte ici, infiniment plus que les gens de Schiermonnikoog. D'autre part je n'aime-rais pas m'en aller d'ici avant d'avoir une réponse définitive concernant mon affaire. Hier et aujourd'hui j'ai été bien plus sombre que les tout premiers jours de mon séjour ici. Et je sens que ma tristesse ira crescendo. Il n'y a que Paris pour chercher l'oubli, - que je ne trouverai pas. Mais j'en trouverai peut-être l'illusion. Je suis bien malade, Kaya chérie. - Physiquement je ne suis pas trop bien non plus. Cette foutue balie - qui n'a pas fait son devoir - commence a me gêner maintenant. Je serai obligé de la faire extirper, mais j'aimerais mieux attendre d'être à Paris. - J'avais espéré recevoir un mot de toi aujourd'hui, samedi, mais je n'ai eu que deux journaux, dont merci. Sans doute j'aurai de tes nouvelles demain, dimanche. Dis-moi si tu as bien reçu la mienne de jeudi accompagnée du petit historique de mon affaire. Va chez Cl. le jour par lui indiqué et dis-lui tout ce que je n'ai pas pu mettre dans mon mémoire. Je ferai l'impossible pour tenir ici jusqu'a la solution. - J'ai une sensation comme s'il y avait toujours q.qu'un derrière moi pour me pourchasser de ville en ville, de pays en pays. Il est temps, grand temps que je trouve un peu de repos dans le travail. Il me faut Paris et de l'occupation tout de | |
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suite, tout de suite. - Je suis très content d'avoir tous les jours les journaux français par toi. Merci, Kaya chérie. - Il y à un tas de gens qui viennent chez ma soeur, et qui l'invitent a venir chez eux, avec moi - pour ‘faire ma connaissance’. J'engueule sans la moindre retenue ceux qui m'embêtent trop et les envoie balader on ne peut plus cavalièrement. Quant aux autres je ne leur parle pas, au grand désespoir de ma soeur qui me dit que je laisserai ici la réputation d'un ours. Ce que je m'en moque!.. Vois-tu encore F. q.q.fois? J'ai vu avec plaisir dans ta lettre de mardi que tu t'entends assez bien avec ta mère et très bien avec M. Joseph qui t'apporte des fleurs. Qa m'a fait grand plaisir. - C'est l'heure de la poste et je finis. Ci-clos q.q. petites fleurs que j'ai apportées de l'ïle. Ecris-moi vite maintenant, chérie, T'embrasse de tout mon coeur
ton Sandro. Mes amitiés a ta maman. |
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