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A un jeune Marin.
Tu vas quitter, mon fils, le toit de tes parens,
Cet asile de paix où coulaient tes journées;
Le monde, qui t'arrache à nos embrassemens,
T'invite à d'autres destinées.
Tu vas courir les flots! cette tâche, ô mon fils,
Semble bien périlleuse à l'amour de ta mère;
Mais puisque tu peux être utile à ton pays,
Ton choix obtient l'aveu d'un père.
Sans crainte, je te vois hâter l'heure d'adieu:
Sur l'abîme écumant que la guerre t'appelle,
Ou que la paix te laisse au rivage, ton Dieu
Te couvre partout de son aile.
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Les écueils, l'ouragan, et la fureur des flots,
Nul danger dans mon sein ne porta l'épouvante:
Pour qui fait son devoir, souviens-tor de ces mots,
Il n'est point de tâche pesante.
Si ta mère forma ton coeur aux premiers jours,
Si sa main des vertus te découvrit la route,
De ses prudens conseils, de ses sages discours,
Tu sauras profiter sans doute.
Je n'ajouterai rien à ses tendres avis:
Fais le bien, fuis le mal, deux préceptes sublimes!
Si tu n'étais sensible à ses pleurs, ô mon fils,
Tu serais sourd à mes maximes.
Toutefois, conserver un coeur pur et pieux,
C'est le premier devoir d'un mortel sur la terre;
Et s'il en est encor que prescrivent les cieux,
C'est à coup sûr dans ta carrière.
Celui qui, des héros suivant les pas fameux,
Expose vaillamment ses jours qu'il sacrifie,
Ne doit rien posséder de plus cher, à ses yeux,
Que sa chère et noble patrie.
Avec idolâtrie il s'y doit tout entier.
C'est pour sa liberté qu'il combat avec gloire;
Et, s'il le faut, au prix d'un pénible laurier,
Son sang achète la victoire.
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Tu juras d'être brave et fidèle à ton roi;
Tu consacras ton glaive aux lieux qui t'ont vu naître:
O que jamais, mon fils, on ne dise de toi
Que tu portas le coeur d'un traître!
Si ton pied s'engageait dans un lacs séducteur,
Tu lirais ton pardon dans mon âme attendrie;
Mais je n'aurais pour toi qu'une profonde horrreur,
Si tu trahissais ta patrie.
Si jamais ta valeur, sans combattre, cédait,
Si tu t'avilissais en quittant ta bannière,
Tu forcerais un père, un père qui t'aimait,
A t'accabler de sa colère!
Ta mère t'enseigna la parole de Dieu;
Aux leçons de son coeur tu resteras fidèle;
Pour moi, je t'offre un guide; en tout temps, en tout lieu,
Que de Ruyter soit ton modèle!
Dans la Bible sacrée, interprète du ciel,
Sont écrits tes devoirs envers l'Être-suprême,
Et tu sauras, mon fils, d'un héros immortel,
Comme on sert le pays qu'on aime!
Que son grand souvenir soit partout dans ton coeur!
Suis ses pas; si tu peux, égale sa vaillance:
De ta Patrie ainsi tu croîtras la splendeur,
Et combleras mon espérance.
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Pars en paix, ô mon fils! sois sage et vertueux;
Pense aux conseils d'un père, aux larmes de ta mère,
Et que, digne du sol qu'ont foulé nos aïeux,
Ton sang jamais ne dégénère!
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