Échos limbourgeois(1842)–Aug. J.Th.A. Clavareau– Auteursrechtvrij Vorige Volgende [pagina 53] [p. 53] Le dernier chant du Tasse. Vainement les rayons d'une gloire trop chère M'environnent encore au bout de ma carrière; Qu'importe une couronne à qui n'a plus qu'un jour? La mort, d'un doigt glacé, m'a touché sans retour. Adieu donc, beau ciel d'Italie, Adieu, Sorrente où je suis né, Adieu, douce et chère patrie, Ton fils se meurt infortuné! [pagina 54] [p. 54] Adieu, toi surtout, ô Ferrare, Pleine pour moi de souvenirs! Le sort pour jamais me sépare De l'objet de tant de soupirs! Dans tes yeux, noble Léonore, J'avais puisé tout mon amour: Fallait-il qu'une pure aurore Précédât un funèbre jour! Le ciel se couvrit de nuages; L'orgueil m'exila loin de toi; J'entendis gronder les orages, Et la foudre éclata sur moi! Depuis lors, le malheur me poursuit et m'opprime; Mon coeur tumultueux, en butte au désespoir, Roule de vains projets, va d'abîme en abîme: Léonore! il faut donc mourir sans te revoir! L'exil et la misère, Héritage d'un père, Assiégent ma carrière, Déçu dans tous mes voeux; Traînant, de ville en ville, Ma douleur sans agile, D'une plainte stérile J'importune les cieux. [pagina 55] [p. 55] Et l'on veut, quand je meurs, du laurier de Virgile, Ceindre mon front brisé sous le poids des chagrins! Non, non! il est trop tard! fuis, triomphe inutile! Le Tasse meurt! le Tasse a rempli ses destins. Pardonne, ô Poésie! Ta céleste ambroisie Consola mon génie Des injustes revers Adieu, tout ce que j'aime! A mon heure suprême, Tu légueras toi-même Ma gloire à l'univers! Vorige Volgende