Septentrion. Jaargang 33
(2004)– [tijdschrift] Septentrion– Auteursrechtelijk beschermd
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André Baillon (1875-1932).
Paul Janssen (1926-2003).
Portrait de Barlaeus (1584-1648).
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ActuellesL'écrivain néerlandais Arnon Grunberg (o1971), maître du burlesque absurde, est-il un bienfaiteur littéraire? Tout semble l'indiquer. Récemment, Grunberg a créé l'Arnon Grunberg Foundation (en abrégé AGF). Cette fondation a fait don de € 2 300 à la maison d'édition amstellodamoise Athenaeum, Polak & Van Gennep pour lui permettre de publier une nouvelle traduction néerlandaise de La Chartreuse de Parme de Stendhal. Grunberg signe également la postface de cette traduction. Il y commente le roman de Stendhal en ces termes: ‘un des ouvrages les plus romantiques que je connaisse et un des livres les plus intéressants sur l'ennui’. Grunberg, qui truste les distinctions littéraires, entend consacrer, par le biais de l'AGF, dix pour cent au moins du montant de ses prix à la ‘philanthropie littéraire’. Les bénéficiaires pourront être des éditeurs aussi bien que des auteurs et des traducteurs. Voir Septentrion, xxxii, no 4, 2003, pp. 68-70. ◆ André Baillon: pendant longtemps, l'année de sa naissance et celle de sa mort (1875-1932) étaient tout ce que l'on connaissait encore de cet écrivain flamand d'expression française. Jusqu'au jour où - dans les années 1980 - l'auteur-traducteur Frans Denissen (o1947) est tombé par hasard sur l'oeuvre de ce ‘prosateur maudit’. Denissen s'est pris de passion pour l'écrivain et a publié en 1998 André Baillon, de gigolo van Irma Ideaal, une biographie du ‘solitaire vulnérable’, dont le talent littéraire était à la fois stimulé et contrecarré par les accès de désespoir, voire de folie, qui caractérisaient cet écorché vif. Il existe depuis peu une association appelée Présence d'André Baillon, qui s'est fixé pour objectif de promouvoir l'étude de l'auteur. Cette promotion au sens large comporte des démarches aussi diverses que l'examen de la dimension réelle de son oeuvre et de la place qui lui revient dans la littérature du xxe siècle, la publication de textes inédits, d'études ou d'essais, l'échange d'informations ou encore le soutien d'initiatives | |
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ou de projets susceptibles de faire connaître l'oeuvre de Baillon au grand public. Les membres de l'association reçoivent régulièrement les Nouveaux Cahiers André Baillon. Adresse: Librairie La Borgne Agasse, rue Anoul, 30, B-1050 Bruxelles / www.andrebaillon.net Voir Septentrion, xxviii, no 2, 1999, pp. 33-44. ◆ Vingt-deux titres de docteur honoris causa, plus de quatre-vingts prix dans le domaine de la médecine, plus de huit cent cinquante publications scientifiques et plus de cent brevets à son nom: tel est l'impressionnant palmarès de Paul Janssen, le chercheur en pharmacie qui est décédé en novembre 2003 à l'âge de 77 ans. Janssen appartient à la promotion 1951 des docteurs en médecine de l'université de Gand, où il a eu pour professeur le pharmacologue et prix Nobel Corneel Heymans. Avant même d'avoir obtenu son diplôme, Janssen s'était rendu aux États-Unis pour y suivre des cours de pharmacologie et visiter des sociétés pharmaceutiques de premier plan. Une belle carrière académique s'ouvrait à lui, mais le virus de la recherche était le plus fort. Janssen s'est lancé dans l'étude des molécules, non sans rêver d'avoir son propre laboratoire de recherche. Le rêve est devenu réalité. Mieux même: le laboratoire en question a pris des proportions plus grandes que prévu. Les installations initiales de Beerse (en Campine anversoise) se sont développées pour devenir une multinationale (Janssen Pharmaceutica) qui emploie quelque 30 000 salariés répartis sur plus de trente sites et qui a poussé des ramifications jusqu'en Chine. Des médicaments mis au point par Janssen et son équipe font désormais autorité dans maintes applications médicales et diverses thérapies, que ce soit en anesthésie, en psychiatrie, ou dans le traitement d'affections fongiques ou intestinales (Imodium et Motilium). Durant ces dernières années, Paul Janssen s'était également intéressé à la pathologie et au traitement du virus HIV. Voir Septentrion, xix, no 1, 1990, p. 87. ◆ ‘Ainsi nous apparaît BARLAEUS, ou plutôt son corps / Mais non son esprit: alerte, désireux, tel Claudien / Et Aristote, d'abaisser, d'une plume infatigable / En vers et en prose, ce qui est bas. / Le siècle d'Auguste même vient écouter son esprit, / Qu'il compose des vers ou donne des leçons d'or’. La version originale de ces vers est de Joost van den Vondel, une des figures de proue du xviie siècle, le Siècle d'or des Pays-Bas, et se retrouve sous un portrait de Barlaeus (nom latinisé de Caspar van Baerle, 1584-1648). Ce savant était lui-même un écrivain apprécié, qui s'est notamment distingué dans la rhétorique. Grâce à Catherine Secretan, chargée de recherche au CNRS, un de ses discours est à présent disponible en français. Sous le titre ‘Marchand philosophe’, Catherine Secretan a traduit l'intégralité du Mercator sapiens du latin en français. Elle a également rédigé un avant-propos ainsi qu'une étude fouillée du contexte historique et culturel. Barlaeus prononça son Mercator sapiens, qui était en quelque sorte un éloge de la philosophie, lors de l'inauguration de l'École Illustre d'Amsterdam (1632). Ce discours est demeuré célèbre, car, au-delà de la perfection formelle, il est fondé sur une adéquation parfaite entre son objet et son auditoire. Le commentaire figurant sur la couverture de l'édition française en précise le propos: associer l'éloge de la philosophie à celui du commerce ne pouvait apparaître aux marchands amstellodamois de l'époque que comme une forme d'ennoblissement et de légitimation de leur réussite. Le ‘Marchand philosophe’ est paru aux Éditions Champion à Paris (ISBN 2 7453 0593 X). Voir www.honorechampion.com. ◆ ‘Le dernier grand historien néerlandais’: ces termes ont été utilisés en guise d'hommage à E.H. Kossmann, décédé en novembre 2003 à 81 ans. Kossmann était né à Leyde dans une famille juive libérale. Après la seconde guerre mondiale, il a fait des études d'histoire à l'université de sa ville natale, où il a été promu docteur en 1954 avec une thèse sur la Fronde. Trois ans plus tard, il devenait professeur ordinaire à Londres (University | |
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Vercingétorix, le ‘premier vrai Français’.
Yvonne Serruys, statue d'Émile Claus, 1926, dans le ‘Citadelpark’ de Gand.
College). En 1966, il enseigne à l'université de Groningue, ville qu'il ne quittera plus. Kossmann a été un des premiers historiens à manifester le souci de replacer les théories et les idées dans le contexte intellectuel et historique où elles ont pris naissance. Un des ouvrages permettant de bien appréhender sa conception de l'histoire est Théorie politique et histoire (2003), textes édités et présentés par Catherine Secretan. Ce volume est paru dans la collection Bihlioteca europea des Éditions Vivarium à Naples. La publication la plus imposante de Kossmann est le volumineux ouvrage en deux tomes De Lage Landen 1780-1980 (Les Plats Pays 1780-1980), dans lequel il aborde simultanément l'histoire des Pays-Bas et l'histoire de Belgique. On sera également impressionné - d'une autre manière - par le livre Les Pays-Bas. Histoire des Pays-Bas du nord et du sud, qu'a publié la Stichting Ons Erfdeel (Fondation Notre Patrimoine), éditrice de Septentrion. En 64 pages, Kossmann et son épouse J.A. Kossmann-Putto réussissent à présenter un condensé de l'histoire de Belgique et des Pays-Bas depuis la préhistoire jusqu'à nos jours. Ce petit volume est paru en treize langues, dont le français. Kossmann ne se distinguait pas seulement par son érudition, son esprit de synthèse et son sens de la relativisation. Il était aussi l'homme des ‘sourcils constamment froncés’, qui a joué un rôle en vue dans certains débats sur la seconde guerre mondiale. Il a été le premier historien néerlandais à tenter de ramener à de justes proportions les concepts de ‘bon’ et de ‘fautif’ en proposant une catégorie intermédiaire: ‘accommodation’. Le scepticisme éclairé et l'ironie pétillante de Kossmann vont certainement nous manquer. ◆ Vercingétorix: ce nom si chargé de résonance pour les Français n'évoque généralement plus chez les néerlandophones qu'un personnage des aventures d'Astérix et Obélix. L'historien néerlandais Fik Meijer leur rappelle opportunément qui était le vaillant Gaulois en publiant Vercingetorix. De mythe van Frankrijks oudste held (Vercingétorix. Le mythe du plus ancien héros français), pour lequel il | |
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s'est fondé sur les notes de Jules César et sur des vestiges retrouvés à Gergovie, Bibracte et Alésia. Meijer, qui est professeur à l'Universiteit van Amsterdam, procède à une reconstitution des principaux affrontements entre Vercingétorix et les Romains et de toute la campagne militaire jusqu'à la soumission des Gaulois. Chemin faisant, l'auteur démonte le mécanisme du mythe qui s'est créé autour du personnage de Vercingétorix. Oublié pendant mille cinq cents ans, son nom a refait surface au xvie siècle. Le guerrier gaulois allait se voir conférer une place d'honneur dans la galerie des ‘grands Français’, aux côtés de Clovis et de Jeanne d'Arc. On lui a aussi attribué maints talents qui ne sont pourtant ni mentionnés, ni même suggérés, dans les sources historiques. Tant les royalistes que les républicains ont chanté ses louanges. Vercingétorix était devenu un pionnier de l'unité nationale, un champion de la liberté, le ‘premier vrai Français’. Vercingetorix. De mythe van Frankrijks oudste held est paru aux Éditions Athenaeum, Polak & Van Gennep à Amsterdam (ISBN 90 253 3410 5). ◆ Qui est Yvonne Serruys? On lui doit notamment La Leçon d'histoire, une sculpture qui se trouve place Louis Blanc à Paris, et le monument en hommage à Albert Samain au jardin Vauban de Lille. Yvonne Serruys (1873-1953) était originaire de Menin, en Flandre-Occidentale, à deux pas de la frontière française. Elle a suivi les cours d'un peintre de renom, Émile Claus, mais n'a pas tardé à découvrir sa vraie vocation: la sculpture. Elle s'est installée en 1900 à Paris, où elle allait, avec son mari, l'écrivain-diplomate Pierre Mille, exercer une certaine influence dans les milieux culturels. Serruys a réalisé plusieurs centaines d'oeuvres parmi lesquelles de nombreux reliefs, nus et portraits. On lui doit un nombre assez important de monuments publics. Ses statues sont présentes dans différentes villes, notamment Paris, Lille, Gand (un monument à la mémoire d'Émile Claus), Menin et Tunis. La ville de Menin a consacré fin 2003 une grande exposition à sa vie et à son oeuvre. En marge de cette manifestation, Marjan Sterckx a publié une monographie intitulée Yvonne Serruys (1873-1953). Belgische beeldhouwster in Parijs (Yvonne Serruys (1873-1953). Sculpteur belge à Paris). Cet ouvrage, riche en illustrations, présente l'oeuvre sculpté de l'artiste dans toute sa diversité et établit des parallèles avec des sculpteurs tels que Camille Claudel. Ce livre est édité par le Stadsmuseum 't Schippershof de Menin (ISBN 90 74705 1 54). ◆ Les Français sont-ils arrogants ou non? Si vous voulez savoir comment ce genre de ‘stéréotype’ voit le jour, nous vous recommandons le dernier numéro (publié sous la direction rédactionnelle de Marie-Thérèse Claes, Philippe Hiligsmann et Jan Walravens) de n / f, le périodique de l'Association des néerlandistes de Belgique francophone. Paul Verluyten tente d'y expliquer les mécanismes de fonctionnement d'un stéréotype, tandis que Roel Vismans et Philippe Hiligsmann décortiquent les formules de politesse: Vismans dans l'usage néerlandais moderne, Hiligsmann dans l'enseignement du néerlandais comme langue étrangère. Jan Walravens signe un article sur les ‘relations interculturelles’ en général. Les chapitres restants ont pour thèmes la synergie entre études culturelles et science de la littérature (Joris Vlasselaers), la culture et la communication dans l'aire géographique de langue néerlandaise (Marie-Thérèse Claes), les différentes manières de s'adresser aux gens en néerlandais (Hanny Vermaas) et enfin le lien potentiel entre le juron et la culture (Henny-Annie Bijleveld). n / f est édité chez Vantilt à Nimègue (ISSN 13777645). Hans Vanacker |
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