Septentrion. Jaargang 32
(2003)– [tijdschrift] Septentrion– Auteursrechtelijk beschermd
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Willem Elsschot (1882-1960).
Olivier Silva, tout jeune soldat (Photo R. Dijkstra).
Olivier Silva, transformation accomplie (Photo R. Dijkstra).
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ActuellesAu risque d'enfoncer une porte ouverte, reconnaissons que les Français ont bon goût. Cela s'est encore vérifié dans leurs achats de livres néerlandais lors du dernier Salon du Livre, où la Flandre et les Pays-Bas étaient mis à l'honneur. La librairie aménagée dans le Pavillon d'honneur offrait un large éventail de littérature néerlandaise en traduction française. L'ouvrage qui s'est le mieux vendu a été la nouvelle Fromage (titre original: Kaas) du prosateur flamand Willem Elsschot (1882-1960). Le personnage principal est un commis qui devient représentant de commerce en fromages, échoue lamentablement et, pratiquant l'autodérision, se résigne à sa triste existence. Dans son oeuvre, l'auteur met en scène à plusieurs reprises ce Laarmans, antihéros petit-bourgeois. Quoique peu prolifique et rarement traduit en français, le bourgeois anarchiste Elsschot reste un des grands noms de la littérature néerlandaise. Les autres titres figurant dans le classement des vingt ouvrages néerlandais les plus vendus en version française n'étonneront personne. Harry Mulisch y figure quatre fois, Cees Nooteboom, Hugo Claus et Anna Enquist trois fois. Adriaan van Dis, Arnon Grunberg, Stefan Hertmans et Lieve Joris sont présents avec un titre chacun. Mais on est agréablement surpris d'y trouver également Max Havelaar, ce monument littéraire du xixe siècle où Multatuli s'en prend à l'administration néerlandaise des Indes orientales, ainsi qu'un ouvrage qui ne relève pas de la catégorie ‘fiction’ (L'Histoire des Pays-Bas de Christophe de Voogd). Voir Septentrion, xxxii, no 1, 2003, pp. 173 - 176 et xxxii, no 2, 2003, pp. 75-78. ◆ Les transformations, vues en quelque sorte comme des rites de passage, sont la spécialité de la photographe néerlandaise Rineke Dijkstra (o1959). Elle a photographié, entre autres, de jeunes mamans peu après l'accouchement de leur premier enfant, des toreros après leur combat et quatre miliciennes de l'armée israélienne. | |
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Jusqu'à la fin du mois d'octobre 2003, le Musée national d'art moderne de Paris a exposé une série de photos que Rineke Dijkstra a faites du jeune légionnaire toulousain Olivier Silva. Dès l'âge de quatorze ans, Olivier rêvait de faire partie de la Légion étrangère. A dix-sept ans, il s'engageait. Depuis, il a pris part à des opérations de paix au Kosovo, en Bosnie, en Somalie, au Gabon et en Côte-d'Ivoire. C'est à Djibouti qu'il a connu son baptême du feu. Rineke Dijkstra s'est proposé de clôturer sa série ‘Silva’ lorsque le légionnaire aurait vingt et un ans, mais elle juge la transformation déjà accomplie aujourd'hui. Sur les premières photographies, la jeune recrue paraît encore mal à l'aise dans sa tenue de combat. Les portraits suivants montrent que l'uniforme lui va de mieux en mieux. L'uniforme fait désormais partie intégrante du personnage. Voir Septentrion, xxix, no 2, 2000, pp. 66-68. ◆ Si vous cherchez sur Internet des détails concernant un auteur flamand qui n'a encore été que peu traduit en français, vous ne tarderez pas à tomber sur un site français intéressant. C'est ce qui m'est arrivé il y a quelques mois alors que je cherchais des informations à propos de Tom Lanoye (o1958). Un ‘lien’ m'a conduit vers bon-a-tirer, ‘revue littéraire diffusant en version intégrale des textes courts originaux et inédits écrits spécialement pour le web’. Cette revue digitalisée présente essentiellement des oeuvres d'auteurs francophones, mais chaque numéro contient aussi des textes d'auteurs qui écrivent dans d'autres langues. En parcourant les archives, j'ai notamment trouvé un récit de Tom Lanoye ainsi que des fragments en prose de Hugo Claus (o1929) et de Charlotte Mutsaers (o1942). Cette dernière a également dessiné la page d'accueil du site. En regard des textes originaux néerlandais figurent les traductions françaises - d'Alain van Crugten pour Lanoye et Claus, de Nicole Verschoore pour Mutsaers. bon-a-tirer est une réalisation des Éditions Revue et Corrigée asbl, de Bruxelles. Le site bénéficie du soutien du Service des lettres de la Communauté française de Belgique et des librairies Tropismes (Bruxelles) et ABC (Louvain). A ce jour, les textes d'une cinquantaine d'auteurs y ont été repris, chaque fois accompagnés d'une biobibliographie succincte. www.bon-a-tirer.com ◆ Friedrich Nietzsche n'est pas que le philosophe qui préconisait des ‘coups de marteau’. N'hésitant pas à faire table rase des réponses classiques, il est cependant demeuré impuissant face aux plus vieilles questions que se pose le genre humain. Cette impuissance se reflète d'ailleurs dans les écrits de divers philosophes qui se sont inspirés de Nietzsche avant d'élaborer leurs propres théories. Dans Vier ongemakkelijke filosofen (Quatre philosophes difficiles), l'essayiste néerlandais Ger Groot, lui-même philosophe de formation, est parti à la recherche des convergences pouvant exister entre Nietzsche, Cioran, Bataille et Derrida. Il consacre à chacun d'eux quatre chapitres d'un style limpide. Il commence chaque fois par présenter dans les grandes lignes la pensée du philosophe, après quoi il cherche les ‘liens’ éventuels. Cela le conduit parfois à mettre au jour des points communs assez inattendus. Nietzsche et Cioran se rejoignent comme théoriciens de la maladie, Cioran et Bataille comme penseurs de la nuit, Bataille et Derrida comme critiques du phallocentrisme. Vier ongemakkelijke filosofen est paru aux Éditions Sun à Amsterdam (ISBN 90 5875 016 7). ◆ Le Musée Singer à Laren (Hollande-Septentrionale) a un faible pour la sculpture française. Après Auguste Rodin et Camille Claudel, c'est à présent le tour de ‘Ossip Zadkine et ses disciples néerlandais’. Cette exposition est ouverte jusqu'au 11 janvier 2004. Dès avant que soit dévoilé à Rotterdam son monument à la mémoire des victimes de la guerre Verwoeste stad (Cité dévastée, 1953), le sculpteur franco-russe Zadkine jouissait déjà d'une grande | |
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Jan Wolkers, ‘Leda met de zwaan’ (Léda au cygne), bronze, 1957-1958.
notoriété auprès des artistes et amateurs d'art néerlandais. Charley Toorop fut un des premiers artistes avec qui il entretint des relations suivies. De plus, bon nombre de jeunes sculpteurs néerlandais sont partis pour Paris, où Zadkine mettait son atelier à la disposition de tous. Une bonne vingtaine d'entre eux ont également assisté à ses cours à l'Académie de la Grande Chaumière. Zadkine a notamment influencé les artistes Willem Couzijn, Lotti van der Gaag, Willem Reijers et l'écrivain-artiste Jan Wolkers. Adresse: Oude Drift 1, NL-1251 BS Laren / www.singerlaren.nl ◆ En 1629, le Batavia, fleuron de la Compagnie néerlandaise des Indes orientales, fit naufrage en bordure d'un archipel de corail, à quelque quatrevingts kilomètres de l'Australie. Ce qui s'est passé ensuite est une hallucinante épopée de mort et de perdition. A peine sauvés de la noyade, les trois cents rescapés tombèrent entre les mains d'un ‘fou de Dieu’ qui assassina une grande partie de ses compagnons. Dans Les Naufragés du Batavia, essai d'une soixantaine de pages écrit d'une plume élégante et alerte, l'écrivain-sinologue belge Simon Leys (pseudonyme de Pierre Ryckmans, o1935) retrace les événements de 1629 en adoptant une double perspective. En tant que marin, il se demande pourquoi le Batavia a fait naufrage, et, en sa qualité de sociologue que fascine la folie collective, il décrit ce que les rescapés du Batavia se sont infligé les uns aux autres. Dans le même volume, l'auteur a publié Prosper, compte rendu captivant du voyage qu'il a effectué dans les années 1950 à bord d'un des derniers voiliers bretons équipés pour la pêche au thon. Les Naufragés du Batavia est paru aux Éditions Arléa (ISBN 2 86959 623 5). Voir également www.arlea.fr ◆ Nostalgie: c'est le nom du sentiment qui, selon Martin Sommer, cimente l'unité de la nation française. La nostalgie de leur glorieux passé serait le lien par excellence qui unit tous les Français. Martin Sommer, qui a été pendant cinq ans correspondant | |
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parisien du quotidien néerlandais de Volkskrant, défend cette thèse dans son livre Heimwee naar Frankrijk (Nostalgique de la France). Sommer trouve que l'on ne peut parler de ‘la France’. ‘Les France’ lui paraît un terme plus approprié. Il ne veut pas tellement évoquer par là les différences entre la ville universelle de Paris et la province. Sommer a constaté que le pays se partage en deux sur d'autres plans: à côté d'une France accessible, moderne et fonctionnelle, il existerait une France hautaine et introvertie, où vous n'auriez droit à la parole que si vous connaissez ‘le code’. Sommer expose, en s'appuyant sur des thèmes judicieusement choisis, ce qui l'a le plus frappé en tant que Néerlandais dans l'Hexagone. Les sujets de son étude pénétrante sont le général de Gaulle et le président Chirac, mais aussi, entre autres, Médan (le ‘village de Zola’), les formules ‘Qui ne mange ne sait rien’ et ‘Le langage de l'amour’. Un rôle de premier plan est réservé au facteur français, qui, ultime représentant de la civilisation, colporte la nostalgie quotidiennement. Il n'est pas étonnant que, dans maint petit village, chaque jour, des femmes se refassent une beauté avant le passage du facteur. Heimwee naar Frankrijk est paru aux Éditions Meulenhoff à Amsterdam (ISBN 90 290 7330 6). ◆ De novembre 2003 à mai 2004, les Pays-Bas seront éminemment présents à Strasbourg. Tout au long de la présidence néerlandaise du Conseil de l'Europe, un intéressant programme culturel sera offert. Le Conseil de l'Europe, dont la création remonte à 1949, se réunit au Palais de l'Europe à Strasbourg. Avec ses quarante-cinq États membres, il est (provisoirement) la seule institution officielle représentant quasiment la totalité du continent européen. Le Conseil de l'Europe s'est notamment signalé par son action en faveur des droits de l'homme, des minorités linguistiques et de la sauvegarde de l'État de droit. Le coup d'envoi de la saison culturelle de la présidence a été donné le 21 novembre 2003, jour où s'est ouverte au Palais Rohan une grande exposition Rembrandt. Cette exposition rassemble 51 eaux-fortes du maître. La littérature se voit également réserver une place de choix. Ainsi, des poèmes de plusieurs auteurs néerlandais, avec traductions françaises (dont certaines extraites de Septentrion) et anglaises, seront affichés en de multiples endroits à Strasbourg. Des soirées littéraires seront organisées avec la participation d'auteurs tels que Leon de Winter, Lieve Joris, Oscar van den Boogaard, Toon Tellegen, Joke van Leeuwen et Hafid Bouazza. D'autres formes d'expression artistique sont mises à l'honneur: l'architecture avec un séminaire sur L'Aubette et De Stijl; la musique avec, entre autres, un concert de musique pop (The Nits), des concerts de musique classique et des concerts de jazz; enfin, le cinéma avec une semaine du documentaire néerlandais. Le but de ce vaste programme de qualité est de promouvoir la diversité des modes d'expression artistique et culturelle néerlandais auprès du public international en général et des Strasbourgeois et Alsaciens en particulier. Pour de plus amples informations, on peut s'adresser à la Représentation permanente des Pays-Bas auprès du Conseil de l'Europe (3, place Sébastien Brant, F-67000 Strasbourg / tél.: + 33 (0)3 88 36 20 48 / fax: + 33 (0)3 88 36 70 10 / e.mail: han.grooten@minbuza.nl). Hans Vanacker |
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