Yves Cazaux (1909-1999).
Cazaux pour cette remarquable personnalité. Ce sont surtout les idées prononcées de liberté, de démocratie et de tolérance qui firent grande impression sur Cazaux.
Guillaume le Taciturne est davantage qu'une biographie classique. Sous la plume d'Yves Cazaux, c'est tout ce monde occidental, de la fin du règne de Charles Quint presque jusqu'aux confins du
xvie siècle, qui revit. Par ailleurs, cette biographie ne néglige pas la forme, tant s'en faut: elle est également une oeuvre littéraire à laquelle les exigences de l'art et de l'histoire n'ont nui à aucun moment. En 1983, Cazaux fit paraître
Naissance des Pays-Bas, ouvrage tout à fait digne de sa réputation d'historien scrupuleux et d'écrivain de grand talent, qui figure parmi les études historiques de premier plan consacrées aux Plats Pays après la seconde guerre mondiale. A peine deux ans après, on en mettait sur le marché une version néerlandaise. Dans
Naissance des Pays-Bas, Cazaux évoque en détail et sans la moindre concession au culte des héros la genèse et l'essor de la nation néerlandaise et du sentiment national néerlandais. L'auteur souligne l'important apport flamand à la naissance, au
xvie siècle, de l'État néerlandais. Le soulèvement des XVII Provinces (grosso modo les Pays-Bas et la Belgique actuels) contre l'hégémonie espagnole déboucha sur une confrontation militaire sans merci. En 1585, Anvers retomba aux mains des Espagnols, si bien que les Pays-Bas méridionaux restèrent sous la domination espagnole. Beaucoup de calvinistes
flamands se réfugièrent au Nord. Ces calvinistes et leurs descendants joueraient un rôle important dans la vie scientifique, économique et culturelle des Pays-Bas. C'est ainsi que le mathématicien Simon Stevin, Willem Usselinckx, fondateur de la
Compagnie des Indes occidentales, le peintre Frans Hals ainsi que Joost van den Vondel, figure de proue littéraire du
xviie siècle, le Siècle d'Or néerlandais, étaient d'origine flamande. Cette facette passionnante de l'histoire des Plats Pays, hors de Flandre, on la néglige ou on la minimise souvent. C'est le mérite de Cazaux d'avoir su présenter à ses compatriotes une image équilibrée de la formation de la nation néerlandaise.
Pour être moins connue, il est une publication d'Yves Cazaux qui n'en présente pas moins d'intérêt pour le lecteur de Septentrion: il s'agit du numéro 32 de la collection Visages de ce temps (1982). Elle est entièrement consacrée à la biographie et à l'oeuvre de Sadi de Gorter, exdirecteur de l'Institut Néerlandais de Paris et chroniqueur de Septentrion jusqu'à sa mort, survenue en 1994. Yves Cazaux avait une grande admiration pour son ami et ‘complice’ De Gorter, dont Visages de ce temps évoque avec verve la vie et l'oeuvre. En tant que Néerlandais français (ou Français néerlandais), De Gorter était en quelque sorte le symbole vivant de la collaboration culturelle transfrontalière et translinguistique prônée par Cazaux.
Homme politique et historien, Yves Cazaux connaissait comme personne les difficultés que