Théâtre
Toon Hermans fête ses 75 ans
Le 17 décembre 1916 naquit à Sittard (ville située au sud des Pays-Bas, dans la province du Limbourg) le célèbre fantaisiste, clown et comédien néerlandais Toon Hermans. Quarante ans plus tard, en 1956, sa carrière d'artiste devait prendre un tournant décisif, à la faveur de son premier grand spectacle solo. A mes yeux, Hermans incarne le type même de l'artiste des années 60. Non pas tellement parce que nombre de ses productions respirent l'air de cette époque mais, bien plus, en raison de son quatrième one man show, diffusé à la télévision le 27 février 1965. Ce fut un de ces happenings télévisuels qui, au début des années 60, allaient permettre à ce média de s'épanouir et de générer, du même coup, un nouveau type de stars: les héros médiatiques. Ce samedi 27 février 1965, j'avais douze ans. Avant ce jour, je n'avais encore jamais entendu parler de Toon Hermans. Désormais, grâce notamment à la radio et à la télévision, je connaîtrais par coeur ses sketches et chansons.
Le cabaret néerlandais de cette époque (le mot cabaret désignant en néerlandais l'art du fantaisiste) était dominé par trois artistes de renom: Wim Kan (1911-1986), Wim Sonneveld (1917-1974) et Toon Hermans. Si le premier ne passait qu'à la radio, les deux autres, en revanche, allaient réussir assez rapidement à faire leur apparition sur le petit écran. Il serait intéressant à ce propos d'examiner plus en détail dans quelle mesure la radio et la télévision ont contribué à faire connaître ces trois stars. Toujours est-il que je serais totalement injuste envers le talent de Hermans si j'osais insinuer que cet artiste doit son succès à la télévision. Toon Hermans est avant tout un homme de théâtre qui possède au plus haut point l'art de faire vibrer une salle. Quelqu'un qui n'a jamais su se passer du public, perçu tout à la fois comme caisse de résonance, accumulateur d'énergie et arbitre suprême. Hermans est l'homme de l'improvisation et de l'impromptu dont l'immense talent repose sur des forces théâtrales mystérieuses telles l'inspiration, la personnalité et l'ambiance. C'est lui qui, testant de nouvelles formes de cabaret, aboutirait au spectacle solo. C'est lui encore qui, à partir d'un argument quasi inexistant, réussit à confectionner un programme remplissant à lui seul presque une soirée entière. C'est lui, enfin, qui, dans la tradition des meilleurs comiques, arrive à faire rire les gens de ce qui constitue le comble du tragique: le sketch qui ne passe pas la rampe.
Toon Hermans est un perfectionniste doublé d'un sentimental, un homme qui a le sens du théâtre, du timing et du détail. Il est gai, léger et partisan d'une conception de la vie résolument optimiste, fermée au tragique, si réel soit-il. Hermans a débuté avant la deuxième guerre mondiale, se produisant dans les cafés et autres lieux de divertissement de Sittard, sa ville natale. Il s'inspirait d'exemples illustres: J.F. Buziau (1877-1958), le Buster Keaton néerlandais, Louis Davids (1883-1939), l'univers du cirque et des camelots. Au cours de la guerre, on le retrouve quelque temps à Amsterdam où, membre d'une troupe théâtrale dirigée par Floris Mesler, il se produit dans des revues. Il s'y taille un succès de plus en plus retentissant, imitant Buziau et interprétant des chansons un peu à la manière de Davids. Au début des années 50, Hermans cherche à se renouveler. Il y parvient à la faveur de deux programmes entièrement de son cru: Ballot (1953) et Zaza (1954), reflétant tous deux l'ambiance parisienne, l'existentialisme et la sinistrose moderne.
Après ces coups d'essai, Hermans se lance dans le one man show. Son deuxième spectacle est diffusé à la télévision en 1958, son quatrième - le meilleur - en 1965. Puis, pendant quelques années, il prépare ses débuts à Broadway. Il va enterrer ce projet après une