important est indiscutablement le transfert définitif et presque intégral vers les Communautés des compétences en matière d'enseignement, et ce de l'école maternelle à l'université. Du côté flamand, on détache en même temps l'enseignement officiel du ministre responsable de l'enseignement, de sorte que les vicissitudes de la politique aient moins ou plus du tout d'impact sur les heurs et malheurs des écoles publiques en Flandre. Celles-ci se trouvent dorénavant placées sous l'autorité d'un pouvoir organisateur distinct: le Conseil autonome de l'enseignement communautaire.
Les Régions aussi voient considérablement augmenter le nombre de leurs compétences. Ainsi sont notamment régionalisés la politique économique, les travaux publics et les transports publics. Les compétences déjà transférées précédemment, notamment en matière d'environnement, sont élargies.
Traduits en chiffres, les transferts révèlent leur véritable importance. Jusqu'à la troisième réforme de l'Etat, les Régions et Communautés géraient à peine 10% du budget national. Dorénavant, elles en géreront près de 40%. Et ce n'est pas un point final: lors d'une prochaine réforme, d'aucuns voudraient également régionaliser ou communautariser la sécurité sociale.
Plus de compétences signifie plus de travail, donc plus de moyens financiers. C'est là le deuxième volet important de cette troisième réforme. Dossier forcément très délicat, quand on sait qu'il s'agit de plusieurs centaines de milliards du Trésor national qui doivent être réparties entre les différentes Régions et Communautés, selon le noble art de la répartition à la belge. Cette répartition des moyens a suscité bon nombre de questions, surtout en Flandre. Nombreux sont ceux qui se demandent si la Flandre recevra effectivement ce à quoi elle est normalement en droit de prétendre, du moins si l'on part du principe que chacun a le droit de recevoir en retour ce qu'il a lui-même produit.
Tant qu'à réformer, on s'est également occupé de Bruxelles, qui n'avait rien obtenu lors de la dernière réforme de 1980. Les francophones ont renoncé à l'extension territoriale de l'agglomération bruxelloise au détriment des communes périphériques situées en territoire flamand. Les Flamands de leur côté ont accepté Bruxelles comme troisième Région, permettant ainsi la création de la ‘Région du Bruxelles-capitale’, étiquette quelque peu alambiquée et floue pour faire de Bruxelles une Région à part entière au même titre que la Flandre et la Wallonie, dotée de plus de compétences mêmes que ces deux Régions, puisque la Région de Bruxelles-capitale se voit aussi confier les services d'incendie, le transport public payant et les services d'aide, jusqu'ici compétences du Conseil de l'agglomération bruxelloise, qui sera supprimé dans un proche avenir.
Les législateurs se font donc de plus en plus nombreux en Belgique, ce qui augmente forcément les risques de malentendus et de conflits sur le plan législatif. Pour y faire face et, si possible, les prévenir, la Cour d'arbitrage aussi est dotée de compétences plus larges, les différents éléments constituant la nouvelle Belgique sont légalement obligés de coopérer, et le Comité de concertation entre le gouvernement national et les exécutifs régionaux et communautaires voit s'agrandir son champ d'action.
Enfin, en 1989 on devrait s'attaquer encore au système dépassé du bicaméralisme. Par la même occasion, on supprimerait aussi le ‘double mandat’, c'est-à-dire l'obligation pour les parlementaires nationaux élus d'assumer également quelques jours par mois la fonction de membre de l'assemblée flamande, wallonne, francophone ou autre encore.
La Belgique de demain sera-t-elle une Belgique vraiment ‘fédérale’? Ce n'est pas encore tout à fait sûr. Mais différente de la Belgique traditionnelle, elle le sera indéniablement.
Marc Platel
(Tr. W. Devos)