en 1916 et dirigea jusqu'en 1967 - qu'il développa dans l'entre-deuxguerres une impressionnante activité de concert et fit oeuvre de pionnier. Non content d'assurer l'exécution annuelle de la Passion selon saint Matthieu de Bach, il créait ou interprétait nombre de partitions contemporaines telles que L'Orestie de Darius Milhaud, Evocations et Psaume LXXX d'Albert Roussel ou dirigeait la première exécution en Belgique de partitions de F. Schmidt, A. Caplet, B. Bartok, Z. Kodaly, I. Strawinsky, et surtout de son compositeur préféré Arthur Honegger. En 1955, ce dernier disait encore, en parlant de De Vocht: ‘Je lui dois d'inoubliables auditions du Roi David, des Cris du Monde, de cette Jeanne d'Arc au Bûcher, qui est presque autant à lui qu'à moi, tant il a fait pour elle.’
Lodewijk était aussi un compositeur productif et éclectique. Son oeuvre comprend des symphonies, des concertos, des oeuvres de musique de chambre, des pièces pour chorale, de la musique de théâtre. L'accent y est mis surtout sur la musique vocale. Il manifestait un enthousiasme enflammé pour la parole poétique et religieuse. Des partitions chorales monumentales telles que Heldencantate (Cantate de héros, 1925), Grote symfonie voor gemengd koor en orkest (Grande symphonie pour choeur mixte et orchestre, 1932), Scaldis aeterna (Eternel Escaut, 1966) ou Primavera (Printemps, 1962-1967) confirment avec éclat cette prédilection. Ses nombreuses pages d'inspiration religieuse, depuis les Psalmen voor volkszang (Psaumes pour le chant populaire), en passant par de petits motets et des messes, au grandiose Te Deum, témoignent de sa foi profondément ancrée. C'est dans ses chants plus simples et ses oeuvres lyriques intimes qu'il a probablement exprimé son inspiration la plus riche et la plus sincère. Certains lieder sur le thème de l'amour maternel ou inspirés de poèmes de Guido Gezelle sont de véritables chefs-d'oeuvre dans leur genre.
L'intérêt considérable du public pour sa musique vocale a quelque peu laissé dans l'ombre ses compositions instrumentales, à tort d'ailleurs, car dans ce genrelà également, De Vocht nous a laissé des oeuvres de qualité. Ses concertos pour violon (1943) et pour violoncelle (1955), son Landelijk concerto voor blokfluit en snaarorkest (Concerto pastoral pour flûte à bec et orchestre à cordes, 1957) ou sa Landelijke suite voor gitaar (Suite pastorale pour guitare, 1971-1973) sont non seulement des oeuvres de qualité pour les instruments concernés mais enrichissent le répertoire de la musique instrumentale flamand.
En tant que compositeur, De Vocht a suivi son propre chemin, sans se laisser influencer par des techniques stylistiques ni des expériences nouvelles. Chef d'orchestre ou de choeur soucieux de faire exécuter des partitions modernes, il n'en resta pas moins tributaire des conceptions et du langage du romantisme finissant, qu'il lardait toutefois de quelques harmonies impressionnistes et de plis modernes. Il évitait soigneusement tout pathos et toute amplification qui aurait sonné creux. Il manifestait une prédilection pour le cantabile, pour la mélodie animée, la construction thématique et la clarté structurelle.
Lodewijk de Vocht était un homme d'une dynamique sensibilité, un tempérament naturel, pas toujours facile à aborder. La musique était pour lui en premier lieu l'expression de l'âme, du for intérieur de l'homme. C'est cette expression qu'il a toujours voulu transposer et communiquer de manière toujours sincère, parfois passionnée.
Hugo Heughebaert
(Tr. W. Devos)