La Flandre et les élections européennes.
‘Les déclarations officielles allemandes, italiennes, hollandaises, pour ne prendre que celles qui furent les plus nombreuses, affirment ouvertement le droit à la non-limitation des compétences!’ écrit l'ancien premier ministre français et chef de file d'un courant antieuropéen important, Michel Debré (Le Monde du 2 mai 1977). Le fondateur du Comité pour l'indépendance et l'unité de la France ne cite pas de déclarations belges, parce qu'elles sont pratiquement inexistantes. Et pourtant, il y a eu la ‘mission européenne’ du premier ministre Tindemans. Les journaux belges, surtout ceux de tendance chrétienne, ont bien mis en vedette l'importance des initiatives européennes du premier ministre belge, mais ils n'ont guère réussi à éveiller un peu plus d'intérêt pour les élections européennes qui doivent avoir lieu en mai ou en juin 1978.
Y aurait-t-il donc un courant antieuropéen belge, se cristallisant provisoirement dans l'indifférence?
La vérité, c'est que la Belgique - et malgré quelques nuances, aussi bien la Flandre que la Wallonie - ne s'est jamais beaucoup intéressée aux problèmes de politique étrangère. Pour expliquer cette situation, on a cité le statut de neutralité que la Belgique a connu pendant près d'un siècle, les dimensions du pays incitant à la modestie, ainsi que le réseau intérieur de conflits traditionnels - économique et social, philosophique et communautaire - couvrant la presque totalité des habitants du pays.
La création des institutions européennes n'a vu naître ni d'enthousiasme ni de résistance spectaculaires. Rien d'étonnant qu'il en aille de même, jusqu'ici, pour les élections européennes de 1978. On n'en a pas parlé jusqu'à la fin de 1976 et le premier gouvernement Tindemans (1974-1977) n'a pu se décider à résoudre les problèmes techniques qu'elles posent à la Belgique.
Nul doute que la Belgique doit écarter les formules majoritaires. Elles ne s'inscrivent pas dans la tradition politique et elles défigureraient complètement le visage politique du pas. Par contre, tout le monde est d'accord sur l'application de la représentation proportionnelle, mais le découpage électoral en vigueur pour les élections nationales - avec ses 27 arrondissements et l'apparentement à l'intérieur de chacune des neuf provinces aurait les mêmes effets que la formule majoritaire.
Plusieurs solutions peuvent être envisagées, allant de onze circonscriptions au système de listes nationales.
Chacune des formules peut favoriser plus ou moins tel ou tel parti. Un consensus politique sur ce point se trouverait facilement s'il n'y avait pas de conséquences inévitables pour tout le système ingénieux de mesures provisoires, semi-provisoires et définitives pour neutraliser les conflits communautaires. Chacune des formules peut anticiper à une régionalisation - plus définitive - à trois ou à deux - au niveau des provinces, ou tout simplement à un retour à l'unitarisme.
Le professeur W. Dewachter a clairement démontré l'impact communautaire des différentes formules (dans la revue Ons Erfdeel, 1975, 1976, no. 5). La publication de son étude a tout de même encouragé un peu le débat. Le sujet a surgi quelquefois lors d'un congrès politique (mais pré-électoral ou électoral) ou d'une soirée-débat. Quelques personnalités politiques ont déjà formulé leur opinion. Mais il n'y a toujours pas eu de débat parlementaire. Aurait-il déjà eu lieu sans la dissolution du parlement et les élections du 20 avril?
En tout cas, il n'y avait pas encore de consensus au sein des partis. N'a-t-on pas entendu le ministre de l'Intérieur, M. Michel, se prononcer pour la formule de trois circonscriptions électorales - avec 12 sièges pour la Flandre, 4 pour l'arrondissement électoral de Bruxelles et 8 pour la Wallonie - et à la veille des élections du 17 avril, le premier ministre défendre le système des listes nationales,