Nécrologie de Charly Guyot.
Si nous sommes ici, Jacques Rychner et moi, c'est d'abord parce que nous aimons Mme de Charrière à travers nos recherches de 18emistes; c'est surtout parce que, lui à la Bibliothèque de Neuchâtel, moi-même à l'université de cette ville, nous avons cherché à suivre l'exemple de Charly Guyot et, dans la mesure de notre possible, de continuer la tâche qu'il avait menée si loin.
Charly Guyot, ayant déjà ressenti cette lassitude dont il ne devait pas se relever, avait reçu de ses médecins le conseil de ne pas entreprendre le voyage de Hollande qu'il s'ét ait d'abord tant réjoui de faire. Et, comme il savait que nous l'aimions bien, il nous avait envoyés, non pour le remplacer, ce qui était impossible, mais pour que nous lui rendions un compte fidèle du succès des magnifiques efforts auxquels nous venons d'assister pour donner aux études Charriéristes sur un plan international l'élan que, dans le cadre de la Suisse Romande, il n'avait céssé de lui ménager. Je ne savais pas que mon rôle d'observateur allait se transformer si douloureusement pour moi, mais je suis heureux, égoistement, que ce soit votre serviteur qui, au château de Zuylen, lui rende un premier hommage après sa disparition.
Et, de fait, il y a là comme la première trace hasardeuse du destin qui a lié Charly Guyot à Mme de Charrière et qui maintenant se plait à associer le nom du professeur de Neuchâtel aux études qu'elle suscite, autrement et mieux que dans les secs comptesrendus bibliographiques. Vous avez tous devant les yeux, dans la bibliographie jointe au dossier du Colloque, la place importante qu'il y a; et sa dernière activité d'enseignant a été d'aller à Lausanne, après sa retraite, exprès, tout un semestre, faire un cours sur l'exilée de Colombier.
En 1948 sa thèse concernait l'ami un peu rigoriste de Mme de Charrière, le pasteur Chaillet, sujet qui était un bon point de départ pour étudier la vie intellectuelle et religieuse en Suisse française à la fin du 18e siècle. Puis l'Encyclopédie (Le rayonnement de l'Encyclopédie en Suisse française), Rousseau (Plaidoyer pour Thérèse Levasseur, Un ami et défenseur de Rousseau, P.-A.-Du Peyron, Pélerins de Môtiers et prophètes de 89) indiquent que la veine était bonne et que ses recherches s' ouvraient largement sur des perspectives d'études sociales et de biographie précise, si difficiles à concilier: le recueil des articles et études De Rousseau à Marcel Proust, publié lorsque Charly Guyot prit sa retraite, était un hommage de ses collègues à cette activité.