Bijdragen en Mededeelingen van het Historisch Genootschap. Deel 2
(1879)– [tijdschrift] Bijdragen en Mededeelingen van het Historisch Genootschap– Auteursrechtvrij
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Rapport van den ambassadeur Aubery du Maurier, na zijn terugkeer uit Holland in 1624 ingediend aan den Koning van Frankrijk.
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confiance qu'ell' a daigné prendre en ma fidellité durant vnze ans antiers en la charge que jay faicte pour son seruice, & les tres humbles graces dont je luy suis obligé de ce qu'il luy plaist combler mon bonheur, me rapelant en ma Patrie, me redonnant ma liberté, et m'admettant si benignement a luy rendre conte de mon Ministere. Que je commenceray par protester a Vostre Majesté, comme deuant Dieu, qu'en tout le cours de cette mienne function je n'ay rien entrepris ny faict qu'en suiuant au pied de la lettre la regle de ses commandements, comme je le puis bien justifier, et que je n'ay eu en tout ce qui s'y est passé, autre affection ny passion, que de son seul seruice, quelques temps et mouuemens qui ayent eu cours, et quelques discours qui luy puissent estre faictz au contraire. En suitte de quoy, Sire, j'adjouste que Messieurs les Estats, Monsieur le Prince d'Orange, & Monsieur son frere, en prenant congé d'eux, m'ont prié d'asseurer Vostre Majesté de leur affection a son seruice, et d'adjouster mon temoignage a ce qu'ils ont chargé leurs Ambassadeurs de luy representer touchant leurs apprehentions et necessitéz presentes, desquelles ils protestent esperer les principaux remedes de Vostre prudence et pouuoir. Pour a quoy satisfaire et ne deguiser a Vostre Majesté ce qui est de la verité, je la puis asseurer que jamais cet Estat la, de puis qu'il a commencé de prendre quelque forme, ne se trouua en plus dangereuse assiette, soit que lon considere les forces qui le menacent par de hors, soit en l'egard de ses maladies interieures, consistantes principalement en une tres dangereuse diuision par dedans. Quand au premier point, je croy qu'ils auront representé a Vostre Majesté ce qui en est. C'est pourquoy je n'y entreray pas, croyant qu'ils n'y auront rien oublié. Mais pour le second je luy diray que depuis six ans cette diuision s'est glissée et fomentée principalement dans la prouince de Hollande, qui est tellement la principale des sept | |
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qui se sont associées pour leur commune deffense, qu'elle seule contribue beaucoup plus a cet effect que toutes les autres six ensemble, et par consequent en est la maladie d'autant plus perilleuse. Peut estre que lesdicts deputéz n'auront découuert a Vr̄e Maté que celle qui est exterieure, tenans l'autre cachée pour certaines considerations particulieres. Mais n'ayant autre but que de faire veoir clairement a Vostre Maté l'estat de leur constitution presente, s'il luy plaist je la luy representeray succinctement et veritablement, affin que tant mieux elle puisse former ses resolutions sur ce qu'il luy plaira faire en leur faueur pour la medeciner, et que cela redondant a leur plus grand bien, il ne soit aussy de tout point inutile au seruice de Vre Majesté. Leur mal interne, et qui s'empire tous les jours, est. prouenu de quelques disputes qui suruindrent entre leurs docteurs en Theologie il y a enuiron treze ans, sur le point de la predestination et quelques autres en dependans, surquoy ils se sont depuis eschauféz de sorte, nommément en ladite Prouince de Hollande, qu'elle fut contrainte en l'an 1618, par resolution du Conseil ordinaire d'icelle, solennellement prise en la forme accoustumée, d'arrester et deffendre le cours de ces contestations, comme tendantes a diuiser les peuples, et a introduire des factions pernicieuses dans l'estat, enjoignant aux prescheurs d'enseigner les peuples simplement a bien croire et a bien vivre, comme ils auoient accoustumé en tout le temps precedent et de s'abstenir d'embrouiller les espris de questions difficilles et curieuses, qui pourroient engendrer schisme en la religion et diuision en l'estat. Auquel decret quelques prescheurs n'ayans voulu obeir, ladite Prouince leur imposa silence comme a desobeissance. En suitte de quoy bientost apréz furent excitées des seditions populaires contre les Magistrats de quelques villes, qui vouloient tenir bon, pour faire obseruer le susdit de- | |
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cret, lesquels aussy tost furent qualifiez du titre odieux d'Arminiens, tellement qu'en certains endroits il y eut des hommes tuéz et des maisons pillées, au mepris des Magistrats desdites villes, les quels eux mesmes s'en trouuent en tel peril qu'ils furent contraints, comme en vne ville nommée Audouatre, de se retirer et quiter leurs maisons et leurs charges. Ce que voyant ledit Conseil de Hollande, et que la consequence des dites mutineries et desordres pouuoit estre tres dangereuse, il eut recours au chef de leurs armes pour le requerir d'ordonner aux gens de guerre, estans en garnison dans les villes, de tenir main forte aux Magistrats d'icelles, tant pour leur propre seureté, que pour empescher les peuples de tumultuer. A quoy leur ayant repondu que c'estoient disputes de religion dont il ne se vouloit mesler, n'y employer son pouuoir a l'effect qu'ils desiroyent de luy, ils eurent recours a la pratique ancienne, mesmes du temps qu'ils vivoyent sous leurs Contes et autres Princes qui les ont dominéz, ascauoir de prendre en seruice, suiuant leurs priuileges, pour la seureté de l'hostel de chacune ville et du Magistrat d'icelle, quelque petit nombre de soldats, pour garder lesdits hostels et n'estre exposéz aux seditions populaires. Ce qui fut pratiqué en quelques villes des Prouinces de Hollande et d'Vtrecht, ou furent leuéz jusques a enuiron de mil ou douze cens hommes en tout, departis en diuers endroicts, pour la seureté de plusieurs maisons de ville. A quoy la partie contraire audit decret donna si mauuaise interpretation, que lors on eclata en inuectiues de bouche & par escrit par toutes lesdites Prouinces, ou l'on decrioit en la susdite qualité d'Arminiens et d'ennemys du pays les Magistrats qui pour leur asseurance auoient eu recours au moyen susdit. Ausquels desordres voyant prendre traict, j'en donnay | |
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auiz a Vostre Majesté, luy representant la verité du tout, & que s'il luy plaisoit contribuer quelque chose pour arrester le cours de ce mal, il estoit besoin de se haster et d'y employer de plus forts remedes que les offices qu'elle m'auoit ordonné faire a cette fin, lesquels acomplis fidellement par moy n'auoient operé le bien qu'elle desiroit pour preuenir leur mal. Ce qui meut Vr̄e Majesté vers le mois de Juillet de l'an 1618 de depescher en Hollande feu Monsr de Boissize, qui s'y rendit a temps pour y trouuer encor toutes choses en leur entier. Mais les raisons et conseils de Vostre Majesté, qu'il leur representa tresbien, tendantes a la conseruation de leur union, non seulement n'eurent non plus d'efficace que les miennes precedantes, ains furent rejettées jusques là, qu'ayans, luy et moy, procuré les moyens d'une bonne reconciliation entr'eux a l'amiable, ils furent rejettéz et eut on recours a ceux de la force, pour aneantir ledit decret de la Prouince de Hollande, en emprisonnant l'auocat general d'icelle auec quelques autres, qui auoient tousiours monstré buter a cheuirGa naar voetnoot1) ces differens par voyé de douceur. En suitte de quoy furent destituéz les Magistrats desdites villes, ou le plus grand nombre d'iceux, ausquels on en substitua d'autres, chose non jamais pratiquée auparauant, non pas mesmes par les Princes Souuerains, ausquels ils ont esté sujectz, d'autant que les dits Magistrats par leur institution sont perpetuelz et ne peuuent estre deposez que par mort ou par forfaicture. S'il n'y eust esté faict changement que de sept ou huict personnes, la necessité requerant cela bien souuent en toutes sortes d'estats, mesmement quand le choix des substituéz est faict auec si bon jugement que le public en | |
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est plustost fortifié qu'affoibly, cela n'eust excité les clameurs et engendré les mecontentements, qu'a produits ce grand remuëment et desestablissement, comme chose imcompatible auec les anciens et non interrompuz priuileges dudit pays, les villes duquel sont gouuernées de cette maniere qu'en chacune d'icelle il y a un Conseil perpetuel, composé es unes de trente, es autres de plus ou de moins des plus eminens, riches et bien entenduz au fait de la police, les quels sont remplacéz du corps de la bourgeoisie lors qu'il en meurt quelqu'un. Au moyen de quoy la face desdites Prouinces de Hollande & d'Vtrecht se trouua changée en moins de huict jours, ceux qui y auoyent auparauant l'authorité principale ayans esté casséz, d'autres ayans esté mis en leurs places, desquels substituéz furent incontinent choisiz et nomméz vingt & quatre Commissaires, par jugement desquels, au bout de huict moys de prison, ledit Auocat de Hollande fut executé a mort, et les emprisonnés auec luy condamnéz a prison perpetuelle. De laquelle procedure les autheurs ne voulurent se laisser demouuoir par les prudens et moderéz conseils que Vostre Majesté leur fit administrer par ledit Sr de Boissize, lesquels au contraire furent rejettez et blasméz avec autant de mépris, comme on refusa sur son instance, faicte par ordre de Votre Majesté, de luy faire reparation d'un libelle diffamatoire escrit & publié en Hollande contre Vostre gouuernement par un nommé Francois Arsens, lequel adherant a tous les mouuements de Vostre Royaume contre Vostre service, l'auoit remply de plusieurs notables impostures tres prejudiciables a la reputation de vos affaires, et ainsy fut contraint le dit Sieur de Boissize de s'en reuenir et laisser les choses en la confusion qu'il n'auoit peu empescher et sans rapporter a Vostre Majesté satisfaction quelconque en legard dudit libelle. Depuis le quel grand changement je ne puis, ny doy, | |
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nier a Votre Majesté, que l'on a visiblement recognu les bienfaicts immenses et du feu Roy, vostre pere, et vostres avoir souffert une si notable diminution de gratitude par l'aneantisement desdicts anciens Magistrats, qui en avoient esté participans & temoins, qu'en toutes occasions il a paru n'en estre autant resté de memoire n'y de gré en ceux qui leur ont succedé, qu'il seroit a desirer. Pour remedier ausquels inconveniens tant de leur desunion, que pour l'asseurance des biens que Vostre Majesté voudra leur faire a l'auenir, elle jugera s'il seroit expedient de leur faire cognoistre que pour leur propre salut ils doivent s'adonner a consolider au plustost cette playe, qu'elle scait estre profonde et dangereuse, ce qui se pourroit tres utillement et facillement, en reunissant et incorporant es villes de Hollande et d'Vtrecht et autres, ou ces changements ont esté faicts, les Magistratz et conseils anciens auec les nouueaux, pour n'en faire desormais qu'un corps, joint de coeurs et d'affections, pour s'adonner a la recherche des moyens de leur conseruation, effaçant ent'reux la memoire de toutes offenses de part et d'autre par vne saincte amnistie, et ordonnant que lesdits conseils fussent reduicts au nombre ancien jusques a ce qu'en chaque ville les supernumeraires eussent vaqué par mort. A faute duquel expedient il est impossible qu'en un estat de la nature de cestuy la, leurs deliberations et contributions aillent jamais bien, tant par ce que les nouueaux establiz n'ont et ne peuuent auoir l'experience necessaire au gouuernement, n'y le credit parmy les peuples, comme les anciens, et que les anciens estans offensez de se voir abatuz et flestriz, sans auoir forfaict, leurs mecontentements s'estendent a tous ceux qui sont de leurs parentelles & dependances, qui sont tresgrandes. Lequel expedient peut d'autant mieux reussir, qu'il est non seulement sans peril pour eux, mais dutout con- | |
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forme a leur propre salut, et que les restablissant en meilleure et plus ferme assiette qu'ils ne sont, ell'asseurera leur condition et ses bienfaits, en obligeant conjointement a soy tous les anciens et les nouueaux Magistrats a la recognoissance d'iceux, de la quelle au contraire en leur estat present Vostre Majesté n'auroit grande asseurance, leurs animositéz les pouuans commettre toute heure les uns contre les autres, et par consequent tenir leur République en continuelle fievre. Or, Sire, la charge desdits Ambassadeurs extraordinaires estant, comme je l'ay mandé a l'auance a Votre Mté, d'implorer le secours de sa bourse, et de la requerir de l'honneur de son alliance, je luy diray tout ce que je scay sur l'un et l'autre de ces points, affin qu'elle mesme y puisse prendre une resolution la plus conuenable au bien de ses affaires. Quant a l'assistance d'argent, il est tres vray, Sire, qu'elle leur est d'autant plus necessaire, que leurs necessitéz sont extremes, portans un fardeau dont la pesanteur excede la mesure de leurs forces, les subuentions de leurs peuples estans fort petites en comparaison de leurs depenses, comme je l'ay particulierement representé a Votre Majesté. et ces subuentions encor estans rendus plus difficilles par leurs desunions, joint que leur public est chargé de grandes sommes, qui courent a rente, et que leur credit est fort diminué. Tellement, Sire, que si quelque grand accident suruenant a leur benefice ne trauerse les desseins du Roy d'Espagne, ou si Vostre Majesté ne les assiste tres puissamment, c'est chose certaine que leur ruyne ne fut jamais si proche d'eux qu'a cette heure. Car destituéz de moyens comme ils sont, ils ne pourront mettre leurs troupes en campagne, a quoy neantmoins ils seront contraints, quand le Marquis s'y mettra, et l'on dit que ce sera bientot, qu'ils ne s'exposent au hasard de voir des | |
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mutineries parmy leurs gens de guerre faute de payement, dont il n'a déja que trop paru d'indices des l'année passée en une poignée de gens, qu'ils tirerent de leurs garnisons vers la frontiere de Gueldres, et depuis mesmes en quelques vnes de leurs plus importantes places. Quant a la somme dont Votre Majeste les voudra secourir, il dependra de sa volonté comment il luy plaira qu'ils la reçoiuent d'elle, n'y ayant que deux voyes, ou en don, ou par prest. Si en don, c'est ce qui a esté faict par le feu Roy, vostre pere, et par Vostre Majesté mesme qui leur a tres-liberalement remis des sommes immenses dont ils auoient baillé leurs recepissez, en vertu desquels on pouuoit bien les en rendre debiteurs a Vostre Couronne. Si par prest, il est vray que ç'a tousiours esté la pratique d'Angleterre enuers eux, la deffuncte Royne Elizabeth ayant voulu les tenir en bride et respect enuers elle par crainte de la repetition des sommes qu'elle leur bailloit, pour seureté desquelles ils luy auoient mesmes engagé trois bonnes places maritimes, a scauoir Ostende, Flissinghes & la Brille, que le Roy de la Grande Bretagne ne leur a depuis restituées que moyennant composition des sommes qu'ils luy devoyent. Mais Vos Majestéz ont tousiours voulu que cette République fust obligée de leurs secours a leur seule beneficence royale. Quant au renouuellement d'alliance, qu'ils demandent, il n'y a doute qu'il seroit tres auantageux a la reputation de leurs affaires, s'il plaisoit a Vostre Majesté la leur accorder, d'autant qu'aux yeux de toute l'Europe Elle feroit paroistre qu'elle s'interesse (à) tout ce qui se peut en leur conseruation. Mais la dessus vient a considerer que le feu Roy, vostre pere, ne feit alliance deffensiue auec eux, limité a certain secours reciproque, qu'aprèz la conclusion de leur trefue, et pour le temps d'icelle, auec le Roy d'Espagne, par le moyen de laquelle se trouuans dechargez du faix de la guerre, ils pouuoient seruir Sa Majesté | |
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des cinq mil hommes de guerre qu'ils s'obligeoient luy fournir a son besoin, comme luy des dix mil, dont il promettoit les assister au leur, jugeant bien Sa Majesté que venans a rentrer en guerre, ils seroyent si empeschéz, pour eux mesmes, qu'ils ne pourroyent accomplir de leur part ce qu'ils luy auoient promis, et partant si ladite trefue n'estoit prolongée, reseruoit de leur faire du bien et favoriser leur subsistance selon la commodité de ses affaires, affin qu'ils n'en fussent tenuz qu'a sa seule bonne volonté et liberalité, et ne presumassent que ce fust par obligation qui l'y astraignist. L'ignorance de la quelle raison a fait que la République de Venize, sur le poinct que ladite trefue estoit d'expirer, s'est engagée a une alliance deffensiue auec lesdits estats, moyennant un secours reciproque de six cens mil francs par an, que la Seigneurie leur paye, et qui la demandent d'elle en vertu de ce titre, par lequel ils la tiennent obligée, au lieu que si par raison d'estat ell'eust resolu de les assister annuellement de cette somme, comme ell'en a grand suject, ils eussent estimé ce benefice de beaucoup plus grand prix. Lequel exemple ayant passé deuant mes yeux durant mon sejour en Hollande, le seruice de Vostre Majesté ne me permet de le luy faire, affin qu'ell'y ait tel egard que sa prudence jugera. Sire, aprèz ces deux poincts il en reste un tres important au bien de vos affaires, sur le suject duquel j'ay eu de frequentes contestations par dela durant les mouuements qui ont agité vostre Estat. C'est pour les transports qui se font ordinairement de plusieurs sortes d'armes et munitions en Vostre Royaume, ceux qui ont eu dessein d'y remuer ayans tousiours eu leur recours de ce costé la, pour en tirer et s'en preualoir. Pour a quoy obuier j'ay souuent tasché de faire observer une conuention que nous auions faite, portant qu'ils ne permettroyent la sortie d'aucunes armes ny munitions de leur pays, sinon qu'ils | |
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en fussent requis en Vostre nom et pour Vostre service. Mesmes que ceux qui en auroyent la conduite par mer, s'obligeroyent de bailler caution en quelqu'une de leurs villes, de rapporter certifficat dans trois mois, comme ils les auroyent dechargées seulement es ports et haures de Vostre obeissance. Nonobstant quoy on en a laissé passer secretement grand nombre, dont la pluspart a mesmes esté découuerte et arrestée en Vostre costé de Provence, de quoy je me suis plaint vivement plusieurs foix par Vostre commandement, sans qu'il ayt esté faict aucune punition des contreuenans, Monsieur le Prince d'Orange ne m'en ayant jamais dit autre raison, sinon que leurs marchans se mettoient a tout hazard pour gagner, que mesmes durant le siege d'Ostande ils auoient clandestinement fourny des munitions a l'archiduc pour batre ladite place, dequoy l'un d'eux ayant esté conuaincu, il ne dist autre chose pour excuse, sinon, que s'il scauoit cinq sols a gagner en enfer, il iroit auec son nauire, s'il n'auoit peur d'y brusler ses voiles. Quant a pourueoir & nommer aux charges, qui vaqueront par mort ou par demission es trouppes Francoyses, entretenues es Provinces Vnies, c'est chose qui ne doit appartenir qu'a Vostre Majesté, d'autant plus qu'elles sont composées de ses sujectz et entretenues du prouenu de ses liberalitéz, & d'autant que cette possession a quelques fois esté interrompue par les excez et desordres des temps, il importe a vostre dignité de la reprendre, et de stipuler cela si bien et expressement, que lesdites prouisions ne dependent que de Vostre Majesté seule. Reste un point de tres grande importance, non seulement a Vostre dignité, Sire, mais aussi a vos sujects traffiquans sur mer, a scauoir de remedier aux depredations ordinaires, qui se font inpunéement sur eux par ceux des Estats, dont il est impossible de tirer raison, pouuant | |
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tres veritablement asseurer a Vostre Majesté que ces six dernieres années que je l'ay seruie par de la, c'est a dire depuis les susdictz changements, il m'a esté impossible d'un nombre infiny de depredations faicts sur vos sujectz et dont ils m'ont fait aparoir d'en faire reparer plus de cinq ou six, encor a ce esté a toute force, et par auoir trouué moyen d'empescher que ces actions fussent traictées en leurs justices ordinaires, pour estre decidées par amiable conuention, de toutes les autres qui vont pardeuant leurs jurisdictions, vos pauures sujectz en decheans tous infailliblement, n'en ayant veu un tout seul, durant un si longtemps, qui n'y ait perdu sa cause aprèz une treslongue et penible poursuitte, quelque bonne qu'il la justifiast. Ce qui provient de l'interest que toutes sortes de personnes ont en ces pays la es captures qui se font sur mer, ou chacun met son argent par esperance de gain, joint que les Amirautéz et les Amiraux en prenans une bonne partie pour les droicts qu'ils s'attribuent, ne jugent jamais en faueur des complaignans, pour ne diminuer leur propre utilité. Auquel desordre il est tresnecessaire que Vostre Majesté pouruoye par un si bon et ferme reglement, pris la dessus auec eux, que desormais il ne puisse estre eludé. Dont l'expedient peut estre pris, premierement en stipulant que le temps de la vendition des marchandises depredées sera prolongé jusques a six mois du jour qu'elles seront amenées dans leurs ports, n'estant maintenant que de deux seulement, et ce pour donner temps aux proprietaires de reclamer leurs biens, lesquels sont venduz ou plustost méuenduzGa naar voetnoot1) precipitéement, a leur grand prejudice, les preneurs mesmes s'en rendans adjudicataires sous noms supposéz, se confians qu'au pris aller ils ne seront tenuz de restituer que le pris de la vente, qui d'ordinaire ne | |
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vient pas au tiers de la juste valeur des choses: et encor sur ce tiers leur estant deduit grand nombre de faux fraiz. Secondement: que la cognoissance de telles depredations ne soit plus attribuée auxdites Amirautéz, mais a des Commissaires nomméz du Corps des Estats Generaux, pour auec l'Ambassadeur de Vostre Majesté resoudre sur les moyens de faire restituer aux interesséz ce qui leur appartient. A faute de quoy ils souffriront tousiours les mesmes dommages, et Vostre Majesté le mesme déplaisir. Quant a l'association desdits Estats auec les corsaires de Barbarie, l'experience aprend qu'ell'est tres prejudiciable a vos sujects, dont les biens et les corps encourent journellement la prise et l'esclauitude; aux quels maux Vostre Majesté scaura mieux pourueoir, comme aussi a s'asseurer suffisamment que desormais vostre banniere sera mieux respectée par eux qu'ils n'ont fait jusques a present, et quils ne troubleront aucuns de vos sujects en leurs nauigations, tant aux Indes Orientales, qu'ailleurs, sur pene de restituer eux mesmes ce qui leur aura esté depredé, n'estant raisonnable qu'ils rendent la condition de vos sujects mauuaise, puisque Vostre Majesté rend la leur si bonne. Je n'importuneray point icy Vostre Maté des premieres actions de ma charge audit pays, comme du traicté de Xanten, touchant les pays litigieux de Cleues et de Juliers, auquel nous trauaillasmes, feu Monsr de Refuge et moy, parce que cela est eslongné. Et neantmoins je diray a Vostre Majesté qu'ayant entrepris premierement auec l'ayde de ses armes, et puis de son entremise, d'asseurer lesdits pays aux Princes de Brandenbourg et de Nieubourg, qui y pretendoient, et par le moyen dudit traicté ayant esté conuenu d'un partage prouisionnel entr'eux, les Espagnols, bien qu'ils fussent interuenuz audit traicté, trouuerent moyen bientost aprez de l'éluder et en suitte de s'em- | |
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parer de la plus part desdits pays, dont ils se sont grandement accreuz et fortifiéz depuis. Sire. Je ne pense pas auoir obmis, en ce que dessus, aucunes des principales circonstances de tout ce que j'ay peu gerer et cognoistre par de la, surquoy aprèz que Vostre Majesté aura pris ses resolutions, il ne me restera qu'a receuoir l'honneur de ses commandements et volontéz sur ce qu'il luy plaira que je face et deuienne desormais, osant la supplier treshumblement trouuer bon que je luy dise que de l'Ambasade, que j'ay faicte si longues années pour son seruice, ne me restant que l'acoustumance de viure de son pain, s'il luy plaist m'en donner encor pour ce qui me reste de jours, elle n'a pauure suject qui ait meilleure deuotion de le manger ny vser le reste de sa vie, qu'en rendant a Vostre Majesté le treshumble & tresfidelle seruice quil luy doit. |