Poèmes(1895)–Emile Verhaeren– Auteursrecht onbekendLes bords de la route. Les Flamandes. Les moines Vorige Volgende [pagina 184] [p. 184] Soir religieux Sur le couvent qui dort, une paix d'ombre blanche Plane mystiquement et, par les loins moelleux, Des brouillards de duvet et des vols nébuleux Égrènent en flocons leur neigeuse avalanche. Le ciel d'hiver, empli d'un espace géant, Nacre l'azur profond d'une clarté sereine; Il semble que la nuit tende sur de l'ébène Des manteaux de silence et des robes d'argent. Les peupliers penchant, pâles, leur profil triste, Nimbé de lune, au bord des rives sans remous, Avec un va-et-vient de balancement doux, Font trembler leurs reflets dans les eaux d'améthyste. [pagina 185] [p. 185] A l'horizon, par où les longs chemins perdus Marchent vers le matin, à la lueur des chaumes, Flottent, au son du vent, des formes de fantômes Qui rasent les gazons de leurs pieds suspendus. Car c'est l'heure où, là-bas, les Anges, en guirlande, Redescendent cueillir, mélancoliquement, Dans les plaines de l'air muet, le lys dormant, Le lys surnaturel qui fleurit la légende. On les rêve passant sur les cimes, où luit, Comme des baisers d'or, l'adieu de la lumière, Ils vont par le sentier, le champ et la bruyère, Et, le doigt sur la bouche, ils écoutent la nuit. Et tel est le silence éclos autour du cloître Et le mystère épars autour de l'horizon, Qu'ils entendent la pure et belle floraison Du pâle lys d'argent sur les montagnes croître. Vorige Volgende