Le théâtre villageois en Flandre. Deel 2
(1881)–Edmond Vander Straeten– Auteursrechtvrij
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Tamise.A-t-on mis en scène, à Tamise, la vie et les miracles de la patronne spirituelle de la localité, Sainte Amelberge? Un chroniqueur du commencement du XIVe siècle, en décrivant le célèbre ommegang tamisois, touche très-directement ce point si important, et nous permet de tirer, pour les siècles suivants, si féconds en représentations empruntées aux légendes nationales, des inductions d'un caractère entièrement affirmatif: ‘On y voyait aussi, dit-il, des mimes et autres jongleurs (bouffons), des histrions, des joueurs d'orgues, de buccin, de tympanum, de vielle et de cythare, et plusieurs autres virtuoses qui maniaient honnêtement toutes sortes d'instruments, en l'honneur de la bienheureuse vierge AmelbergeGa naar voetnoot(1).’ Des amateurs, ayant pour emblême la Wyngaerdrank, pour devise: Ootmoedig verzaemdt (Humblement assemblés), et pour blason Sainte Anne avec Marie et Jésus, assis dans un pavillon formé de branches de vigne, donnent diverses représentations au commencement de ce siècle. Une association: de vlaemsche Ster (l'Étoile flamande), organise, en 1855, différentes séances dramatiques, dont le produit est consacré à des oeuvres charitables. Un rapport officiel la mentionne en 1864. On chante encore actuellement, en souvenir de Sainte Amelberge, une intéressante légende en cinquante-trois strophes, laquelle semble appartenir à deux siècles au moins. La musique, qui y est adaptée, joint la simplicité expressive à la concision heureuse. Si nous ne nous trompons, la chanson a dû être dansée par de gracieuses jeunes filles, vêtues de blanc. La musique autorise cette supposition, non moinsque l'observation de plusieurs faits semblables en d'autres localités. | |
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Ce curieux petit monument des moeurs de nos pères a été sauvé, en ces derniers temps, par le secours de la presse. Des exemplaires en circulent, avec la reproduction gravée de la châsse miraculeuse de la sainte, sous le titre de: Lofdicht ter eere van de H. Amelberga, maagd en patrones van de heerlykheid en Burght van Temsche. Gr. in-8o de 8 pages. ‘Le Lofdicht de la bienheureuse vierge, dit son biographeGa naar voetnoot(1), se chante aussi à d'autres jours (que le troisième jour de la Pentecôte), par des pèlerins. On l'entend retentir dans les ateliers et dans les campagnes de Tamise. Tout le monde, à Tamise, en connaît quelques strophes, les enfants en entonnent le début avec le refrain, et plus d'un habitant la sait dire d'un bout à l'autre. Ailleurs, il circule également, et même, à Maeter, il doit avoir été en vogue jadis, puisque l'on en a rencontré, chez le curé de l'endroit, un exemplaire intitulé: Lof-dicht ter eeren van de heylige maegd Amelberga, welkers reliquien geëert worden in de parochiale kerke van Mater. Les deux premiers vers le témoignent: Komt hier den lof vermeeren,
Maetersche Borgers alGa naar voetnoot(2).
On verra d'ailleurs que la chanson est exactement la même que celle qui est devenue populaire à Tamise. La cadence des vers, per arces, ainsi que sa mélodie, attestent un âge assez respectableGa naar voetnoot(3). On en a découvert, à Tamise, un exemplaire imprimé en caractères gothiques fort anciens. | |
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Diverses versions nous ont appris que, de temps en temps, des corrections y ont été adaptées, par l'adjonction ou la suppression de mots ou de syllabes. Le mieux est d'en donner une reproduction d'après le plus ancien exemplaire connu. La mélodie originale, qui, selon des hommes compétents, est fort belle, nous est parvenue dans d'exellentes conditions. Les artistes-musiciens remarqueront qu'à peine une ou deux notes d'une époque postérieure semblent s'y être glissées. A en croire certains Tamisois, les habitants du Petit-Brabant, habitués à faire le pèlerinage, s'étaient imaginés que le thème de la chanson était insignifiant, et y avaient substitué un autre motif. L'innovation déplut aux bateliers de Tamise, qui notifierent aux Brabançons qu'il leur fallait opter entre un silence complet ou une interprétation musicale conforme à celle léguée par des siècles, sinon qu'ils les auraient fait passer à l'autre rive de l'Escaut. Devant cette injonction, les pèlerins baisserent pavillon, et recommencèrent le refrain consacré.’ A coup sûr, le Lofdicht, tant pour les paroles que pour la musique, est l'oeuvre de rhétoriciens maeterois ou tamisois. Quelques strophes ne seront donc point déplacées ici: 12.
Van Frankrijk komt getreden
De Koning aan 't klooster aan:
De schoonheid en de zeden
Van die maagd hem wel aanstaan.
Help ons God, door uw heilige maagd,
Help ons God, door haar die u behaagd.
13.
Hij dachte: voor zijnen zone
Is dit een edel maagd,
Om zijn vrouw te zijn idone:
Hij heeft het haar gevraagd.
Help ons, enz.
14.
‘Heer Koning, hoog verheven,’
Sprak zij met goed gelaat,
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‘Mijn trouw is God gegeven,
Hij boven al in 't herte staat.’
Help ons, enz.
15.
Des Konings zoon heeft dit verstaan,
Karolus, kloek en stout;
Naar het klooster is hij ras gegaan,
Zoekt te wezen getrouwd.
Help ons, enz.
16.
Hij vindt haar steenen dragen,
Daar 't klooster getimmerd werd.
Om God zoo te behagen,
Zij geeft hem lof in 't hert.
Help ons, enz.
17.
De knecht die neemt de steenen af,
Zoo zijne heere wou.
Zijn begeerte hij te kennen gaf,
Om zijn bruid te zijn getrouw.
Help ons, enz.
18.
Met bidden noch met dreigen
En verandert haar gemoed.
‘Mijn trouw is aan God eigen,’
Sprak zij, ‘en spaar uw' moed.’
Help ons, enz.
19.
Als hij dit heeft vernomen,
Door gramschap hem ontstelt;
Dreigt haar met herte vrome,
Te nemen met geweld.
Help ons, enz.
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L'ortographe modernisée, que nous nous voyons contraint de suivre ici, dénature entièrement cette intéressante production du terroir. |
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