Oeuvres complètes. Tome XX. Musique et mathématique
(1940)–Christiaan Huygens– Auteursrecht onbekend
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II. La division du monochorde. | ||||||
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Avertissement.Nous publions dans les pages qui suivent les recherches de Huygens sur la théorie mathématique du tempérament musical, en les faisant précéder (Pièce A.) par une copie, d'une main inconnue, d'un écrit (manuscrit?) de l'un des frères Hemony où Huygens a inscrit, outre la date - 16 juin 1661 -, le nom de la ville d'Antwerpen (Anvers). A la date indiquée Huygens ne se trouvait pas dans cette ville. Il s'y était trouvé de passage le 16 octobre 1660Ga naar voetnoot1) et avait saisi cette occasion pour visiter le carillonneur et l'entendre jouer du célèbre carillon - ou plutôt d'un des célèbres carillons - nouvellement installés par les frères HemonyGa naar voetnoot2). Ceci peut avoir été une des causes qui le déterminèrent, après être rentré à la Haye en 1661 à la fin du mois de mai, à s'occuper lui-même de la théorie de la musique. En effet, dans la copie susdite, l'auteur de l'écrit donne le conseil de commencer par partager la ligne musicale en 10000 partiesGa naar voetnoot3); or, dans la ‘Divisio Monochordi’ (notre Pièce B. Div. Mon. I) | ||||||
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datée du 8 juillet 1661, Huygens divise en effet le monochorde en ce nombre de parties. Il est vrai que Stevin dans son manuscrit ‘Vande Spiegeling der Singkonst’ divise également le monochorde en 10000 parties. La Pièce C. Divisio Monochordi II empruntée au petit Manuscrit 13 où Huygens avait l'habitude de noter ses principales découvertes (jusqu'à ± 1662) est sans doute à peu près de la même époqueGa naar voetnoot4). Son intérêt pour les cloches est attesté en outre par le fait qu'en août 1662 il alla visiter Hemony (il parle au singulier; s'agit-il de Pierre Hemony le cadet?) à Amsterdam et eut avec lui une ‘longue conference’ sur les ‘tons de la musique, ou il est tres scavant’.
D'autre part nous attirons l'attention sur la note 11 de la p. 46. Ne connaissant ni Mr. de Montalent ni son manuscrit, nous ne pouvons toutefois former aucune conjecture sur la grandeur de son influence sur Huygens. Comme la note nommée le fait voir, cette influence se rapporte probablement, non pas aux Pièces ici considérées, mais à la division de l'octave en 31 parties, c.à.d. au ‘Cycle Harmonique’.
Nous ajoutons encore à ces Pièces un Appendice qui porte la date 1676.
On connaît le grand intérêt pour le tempérament musical dont avaient fait preuve depuis longtemps les constructeurs et accordeurs d'instruments à touches ainsi que les musicologues. Par l'introduction de la tierce majeure harmonique ou naturelle (5:4) au lieu de la tierce majeure pythagoricienne (81:64) et du principe harmonique de l'accord de tonique, l'impossibilité de produire exactement tous les intervalles dans les dits instruments était devenue encore plus manifeste qu'auparavant; il fallait donc tâcher de trouver un compromis capable d'écarter au moins les plus rudes dissonances. Le nombre des systèmes inventés à cet effet, est considérable. Une place importante | ||||||
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revient à celui de 1511 de l'organiste allemand Arnolt SchlickGa naar voetnoot5) qu'on désigne par le nom de tempérament du ton moyen. Considérant la série des quintes
dont le dernier ton forme (à des différences d'octave près) un intervalle 81:80, dit comma syntoniqueGa naar voetnoot6), avec la tierce majeure naturelle de c, Schlick eut l'idée de diminuer chacune de ces quintes d'un quart du dit intervalle. Dans la gamme construite suivant ce principe la tierce majeure, et par conséquent aussi la sixte mineure, était naturelle, tandis que, simultanément avec la quinte, la tierce mineure était diminuée d'un quart de comma. Il n'y a dans cette gamme qu'un seul ton entier, précisément moyen entre le ton majeur (9:8) et le ton mineur (10:9) de la gamme naturelle; c'est de lui, le ‘mezzo tuono participato’, que provient le nom de tempérament du ton moyen (mean tone temperament). Ce système est amplement traité par les théoriciens Francesco SalinasGa naar voetnoot7) et Gioseffo ZarlinoGa naar voetnoot8) qui paraissent ne pas connaître Schlick: voyez la note 6 de la p. 18 qui précède, où Huygens dit qu'ils s'en disputent l'invention. D'ailleurs ces deux musicologues discutent d'autres systèmes aussi, les comparant avec luiGa naar voetnoot9). | ||||||
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Le traité de Huygens intitulé ‘Divisio Monochordi’ (notre Pièce II B) contient une théorie mathématique de ce système. La méthode appliquée consiste à partir d'une corde de longueur a et à calculer successivement les longueurs des cordes donnant les tons de la gamme chromatique correspondante, d'après le principe de la construction pythagoricienne, c.à.d. par formation de quintes et d'octaves, complétées par des tierces déterminées elles aussi à l'aide de quintes et d'octaves; or, la longueur x de la corde donnant la quinte avec le ton fondamental est d'abord considérée comme inconnue: sa valeur est déterminée, et avec elle celle de la quinte tempérée, par les conditions imposées à certains intervalles. Dans cette Pièce B, la condition unique est la suivante: les quintes sont rendues inférieures à leur valeur naturelle (3:2) d'autant que les sixtes majeures sont rendues supérieures à la leur (5:3). Cette condition paraît conduire à des tierces majeures naturelles ainsi qu'aux autres intervalles du tempérament du ton moyen. | ||||||
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Dans la même Pièce un deuxième système est obtenu en postulant que les tierces majeure et mineure, ainsi que les sixtes majeure et mineure, seront également distantes les unes et les autres de leurs valeurs naturelles. Il est connu sous le nom de tempérament de ZarlinoGa naar voetnoot10). Dans la Pièce indiquée ici par la lettre C Huygens déduit de nouveau le tempérament du ton moyen, en posant cette fois directement la condition de la justesse de la tierce majeure.
À la p. 54r du portefeuille ‘Musica’ Huygens parle de ‘mon monochorde de 120 demipouces ou 5 pieds’Ga naar voetnoot11). |
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