Oeuvres complètes. Tome VIII. Correspondance 1676-1684

N^o 2266.
Christiaan Huygens à J.P. De la Roque.
20 mai 1682.

La minute se trouve à Leiden, coll. Huygens.
La lettre est la réponse au No. 2265.
De la Roque y répondit par le No. 2269.

A la Haye ce 20 Maj. 1682.

Abbe de la Roque.

Monsieur

Puisque Mr. l'Abbé Catelan proteste de n'avoir point de part a la falsisication de vos Journaux il faut l'en croire; cependant il me semble qu'il n'en a pas fort bien usè d'escrire des refutations de mes propositions fondamentales, et d'en donner des copies a d'autres, sans que j'en scache rien. Il paroit, par ce que vous me

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mandez, qu'il croit pouvoir soustenir son objection, et cela estant il est juste que l'on voie aussi ma defense car autrement, s'il reconnoissoit luy mesme de s'estre mepris, il suffiroit d'avertir le public seulement de sa retractation. Pour ce qui est d'un Journal Extraordinaire où il souhaiteroit que vous missiez son escrit avec ma response, je vous prie de n'y point consentir parce que bien de gens negligent de voir ces extraordinaires, principalement quand ils traitent de Mathematique, et il m'importe que tout le monde voie ce que je respons tant a l'abbé Catelan que au P. Dechales. Je raporte en mesme temps tout l'essentiel de ce que M. l'abbé m'objecte dans sa remarque, de sorte qu'il n'est nullement necessaire qu'on la donne entiere et il luy sera tousjours libre par apres de faire imprimer comme il voudra tout ce qui regarde nostre dispute. Mais je crois qu'il s'en abstiendra sans peine, quand il aura vu ma response; par ce qu'en effect ce qu'il m'objecte marque une ignorance fort grande et un defaut de raisonnement. Il me semble que dans le Journal vous pourriez mettre ainsi.

Extrait d'une lettre de Mr. Hugens, avec la Response à une Remarque faite par Mr. l'Abbè Catelan contre sa Proposition 4^e du Traité du Centre de Balancement.

Nous decouvrirons peut estre avec le temps, qui sont ceux qui ont mis la main a vos Journaux Monsieur pour y faire inserer par nos libraires d'Amsterdam la Remarque de Mr. l'abbé Catelan sur ma Theorie du Centre d'oscillation, en retranchant d'autres choses que vous y aviez mises, et vous aviserez alors aux moiens d'empescher a l'avenir de pareilles entreprises. Pour moy, j'aurois tort si je trouvois mauvais qu'on escrivist contre moy, mais je me plains d'une chose, qui est qu'en feignant que cette Remarque ait estè dans vostre Journal du 8^e Sept. 1681, et ne la mettant au jour qu'au mois de Mars dernier, l'on a fait accroire par là que je sois demeurè en faute pendant 6 mois de faire response a des objections qui sont fort peu de chose.

Cependant puis que Mr. l'abbé Catelan les reconnoit pour estre de luy et qu'il semble les vouloir soustenir quoy qu'il proteste de n'avoir eu aucune part a la tromperie dont je viens de parler, je m'assure Monsieur que vous voudrez bien publier la response que j'y ay faite, et que je vous envoyay il y a quelque temps.

La Response estoit celle qui suit. autre caractere.

J'ay estè surpris de voir qu'on ait attaquè ma Theorie du Centre de Balancement, où personne, depuis 9 ans qu'elle est imprimée, n'avoit rien trouvè à dire. Mais ayant considerè la pretendue refutation de Mr. l'abbè Catelan de ma pro-

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pos. 4^me dont il s'agit, je l'ay trouvée telle, que je n'ay point apprehendè qu'elle me fist tort aupres de ceux qui scavent raisonner juste. Car pour dire en peu de mots, &c.

Vous pourrez mettre en suite tout le reste de la response¹⁾, de la quelle j'ay changè et un peu adouci ce commencement, comme vous voiez, parce que Mr. l'abbé proteste de son innocence. Un peu plus avant ou je dis, figurez vous les deux premieres de 4 et de 8 pieds, et les deux autres de 3 et de 9, il sera mieux de mettre les nombres 5 et 10, et 3 et 12, et pour la somme, qui estoit 12, mettre 15. dans tout le reste je ne crois pas qu'il faille rien changer (et cecy mesme estoit peu necessaire), mais je m'en raporte a vous Monsieur, et je vous supplie de me dire librement vostre sentiment. Que si vous estes d'avis de faire quelque narrè plus ample de ce qui s'est passè ou de taxer plus fortement nos libraires et ceux qui sont autheurs de cette friponerie, cela depend uniquement de vous. J'ay fait escrire a l'un des 4 imprimeurs associez d'Amsterdam mais il s'obstine a ne point faire de response sur ce point. Je souhaiterois fort de pouvoir decouvrir leur correspondant à Paris car pour ce jeune Hollandois des Microscopes je ne scaurois le soupçonner de s'estre meslé de cette affaire parce qu'il y a si longtemqs qu'il est de retour de france²⁾, et qu'il ne se mesle plus guere d'estude. Pour ce que vous proposez du Privilege, l'on m'assure qu'il n'y auroit rien a faire, par ce que cette impression est desia en train depuis longtemps. Le meilleur a ce qu'on croit seroit d'agir de concert avec eux, et que vous leur fissiez tenir les copies de vostre part, avec defense d'y rien alterer. Mais s'ils font les mauvais vous pourriez bien decrier leur impression en advertissant le public de la Falsification. Et peut estre vous pourriez les incommoder en envoiant de bonne heure grand nombre d'exemplaires en ce païs, de la petite impression que l'on fait á Paris. Je suis parfaitement

1) Celle que Huygens a donnée dans la Lettre N^o. 2259. Voir encore la pièce N^o. 2267.

2) N. Hartsoeker était revenu de Paris en 1679; il avait alors 25 ans.