Oeuvres complètes. Tome III. Correspondance 1660-1661
(1890)–Christiaan Huygens– Auteursrecht onbekend
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No 844.
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Il y a trois mois qu'il fait espérer une visite, à vne DameGa naar voetnoot3) de tres-grand mérite, avec laquelle je luy ay fait faire connoissance, & il n'a encore pû trouver moyen de la luy rendre, quoy qu'il ne le desire pas moins qu'elle, & qu'il ne luy faille qu'vne aprés-disnée pour les satisfaire tous deux. Jugez, aprés cela, Monsieur, ce que peut attendre de luy, vn misérable comme moy, qui n'est bon à rien. Certes, si vous vous résolviez à le venir tirer de cette presse, pour empêcher qu'on ne vous l'oste pour toûjours (& pleust a Dieu que vous en prissiez la résolution dés le printemps où nous allons entrer!) il me semble que quelque passion que lon eust, pour voir, & pour gouverner le Pére d'vn si grand-personnage, & qui vaut tant par luymesme, j'empêcherois bien que vous ne m'échapassiez comme Monsieur vostre fils; & je me flate mesme assez, pour croire que vostre amitié m'ayderoit à en venir à bout. Je me servirois, pour cela, d'vne invention assez facile, & assez sure, a mon avis, qui seroit de vous mener en mon hermitage, où je passe, d'ordinaire, tout l'Esté, & vne partie de l'Automne; & bien qu'il ne soit ni de grande étendue, ni magnifique, comme on vous l'a représenté, il auroit, si je ne me trompe, assez d'agrément, pour ne vous pas déplaire; & pour moy, il ne me pleût jamais tant, qu'il feroit, si javois le bon-heur de m'y voir avéque vous. J'iray donc vous y attendre, au mois de May, & pour fortifier ma foible santé, afin d'estre plus en estat de vous y receuoir, je recommenceray à prendre du lait, des que j'y seray arrivé; car je sens mes humeurs, qui recommencent deja à s'aigrir, & j'ay sujet de croire que ce fut celuy que je pris l'année passée, qui les adoucit, & qui m'a aydé à passer cet hyver plus doucement, que je n'avois fait les six ou sept autres précédens. J'essaiay, il y a deux ans, de ne vivre d'autre chose, pendant quelques-mois; mais je me suis mieux trouvé de n'en prendre que le matin, en assez bonne quantité, & de vivre, le reste du jour, à mon ordinaire, mais sobrement & réguliérement. Ce sera là, Monsieur, (si j'ay jamais le contentement de vous y tenir) que je vous feray bien des questions, à mon tour que je m'instruiray de mille choses, qui vous regardent, & que vous savez, au dépens de vostre patience; & que je vous protesteray du coeur & de la voix, au lieu que je ne le puis, maintenant, que du coeur, & de la plume, que je suis, avec passion, & constamment, autant que personne du monde
Monsieur
Vostre tres-humble et tres-obeissant serviteur Conrart. |
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