Briefwisseling. Deel 6: 1663-1687
(1917)–Constantijn Huygens– Auteursrecht onbekend6299. Aan Prinses Amalia van OranjeGa naar voetnoot4). (H.A.)J'eus l'honneur d'informer V.A. par ma derniere du 20e comme le Roy avoit gousté et aggreé la proposition que je m'estois avancé à luy faire pour un acte au seau privé; toute mon industrie a tendu depuis à faire tomber Mess.rs le grand chancelierGa naar voetnoot5) et le grand thresorierGa naar voetnoot6) dans le mesme sentiment. Avec le premier j'ay reusci en sorte au moyen de mes instances un peu empressée[s] sur l'estat present de la Maison, qu'encor disoit il, que la chose n'estoit pas de sa function, il estoit fort content de nous y servir, et mesmes de fortifier le Roy dans ceste resolution. Au second que je craignois le plus, n'estant pas personnage de fort joviale presence, j'ay si bien faict ma cour, que me donnant à disner en son hostel, où tout est fort magnifique, il s'est chargé de seconder sincerement la chose aupres du Roy, estant bien asseuré, ce dit il, qu'il n'y a chose au monde que S.M. puisse faire pour le Prince son nepveu, qu'elle ne le fasse de grand coeur et de mesme que si S.A. estoit son propre enfant. Ce qu'elle faict paroistre à ses ministres en toutes occasions, que d'ailleurs aussi je doibs tenir pour chose certaine, qu'à la derniere session | |
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du Parlement le Roy eust esté fort content de proposer nos interests, mais que chascun luy conseilloit de laisser partir les membres dans la bonn' humeur où ils estoyent, et que sans aucun doubte on entreprendroit la chose à la session de Novembre. Apres avoir ainsi disposé ces mylords il est question de s'en retourner à la source, et presser le Roy de mettre la chose en train. C'est ce que je vien de faire tout presentement, ayant pris le Roy, au sortir de son disné, où il n'y avoit que luy et la ReineGa naar voetnoot1) dans sa chambre. S.M. m'a tesmoigné d'estre bien satisfaicte de ce que j'avoy traicté avec lesdits mylords, et pour sa response m'a repeté que cela sera faict asseurement. C'est de quoy a cest heure je doibs aller informer mesdits mylords, et ainsi je cours dans ce cercle comme l'asne au moulin. En mesme temps j'ay prié le Roy de me dire ce qui luy sembloit des affaires d'Orange, et quels ordres il avoit intention de donner là dessus à son ambassadeur. Il m'a respondu qu'il falloit en cest affaire continuer de faire tout ce qu'on pouvoit, qu'il en avoit parlé à M. de CommingesGa naar voetnoot2), et qu'encor une autre fois il le feroit. Je luy ay representé que c'est là dessus qu'on aura à prendre ses mesures, et à juger s'il sera à propos de me renvoyer en France, ou bien d'abandonner la chose. Cela ne seroit pas bien, a repliqué le Roy. Et cependant il est bien aysé à connoistre icy, qu'au moins tant qu'on est dans le doubte, sçavoir si nous aurons guerre ensemble ou non, on n'a garde de se brouïller avec la France, pour si peu de chose; mesme quand ce doubte de guerre cesseroit, je ne voy pas qu'on s'anime icy avec tant de chaleur contre l'injustice de la France, que feroit bien M. le chancelier et mylord Hollis. Ce qui met M. le secretaire BennetGa naar voetnoot3) dans une autre opinion, à sçavoir, qu'il faudroit s'estudier à sortir d'affaire par quelqu' expedient que ce puisse estre, et donner moyen au Roy de France de nous contenter sans prejudice de ce point d'honneur, qu'il pose dans son obstination. M. de Comminges que j'ay amplement entretenu sur le tout, juge à peu près de mesme, que ce n'est pas chose digne à brouïller deux grands Roix, et qu'il faut cercher un expedient à en sortir de bonne grace. Il dit qu'en effect le Roy icy luy en a parlé serieusement, mais avec retenue et discretion; de quoy il avoit donné advis fidelement à son Maistre, me promettant fort, de vouloir y cooperer de tout son pouvoir, ne trouvant aucune replique à ce que je luy represente par trente argumens du tort que le Roy, son Maistre, faict plustost à soy mesme qu'à S.A. suivant le jugement des plus sages ministres de la cour de France. V.A. void par tout ce que dessus à quoy nous en sommes, et par les raisons que j'ay eu l'honneur de luy citer par cy devant, n'aura point de peine à jnger quel est mon sentiment sur le tout; mais ce sentiment n'est pas une piece à mettre en jeu. C'est à moy à attendre quel sera celuy de V.A. et de quels ordres elle aura aggreable de m'honorer pour l'avenir. - Je me produis devant la Reine avec beaucoup de scrupule, tant que ces miserables portraicts ne sont arrivéz. M. Busero m'a mandé qu'ils debvoyent venir par la prochaine barque des pacquets, ce que je souhaitte extremement, et V.A. ne sçauroit | |
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croire comme ceste representation du Prince pourra servir icy à enflammer les bonnes volontez pour ses interests. M. l'ambassadeur GochGa naar voetnoot1) qui est icy en estime de grande probité, et par là bien voulu à la cour, vid le Roy en particulier le lendemain de son arrivée, les plus sages et discrets se promettant beaucoup de bien de sa negotiation. En voyant les grands qu'il n'a pas tant occasion de frequenter que moy en ce charactere icy, je pense rendre plus de service à ma patrie que, peut estre, on ne le voudroit croire. L'ardeur insensée du peuple est terrible contre nous, mais le Roy est sage, et n'en veult pas legerement à nos gens, qu'il ayme d'entiere affection, ayant appris à les connoistre en ses adversitez. Le duq de York mesme, qu'on croid ne pouvoir empescher d'aller en personne à ceste guerre, proteste de ne la souhaitter point, mais qu'on s'entende en raison et amitié. Ils furent hier ensemble faire reveüe de leurs vaisseaux equippez et en equippage à Chattam. Au retour je dis au duc, que j'esperoy qu'on les employeroit contre les enemis, et non pas contre les amis. Et moy aussi, respondit-il. A Londre, 17/27 Juin 1664. |
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