Briefwisseling. Deel 3: 1640-1644
(1914)–Constantijn Huygens– Auteursrecht onbekend
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2432. Aan prinses Amalia van Oranje. (H.A.)*aant.A ma postdate d'à ce matin, que V.A. aura, j'espere, receuë devant ceste, je n'ay gueres de chose à adjouster, touchant le combat de la nuict passée, la pluspart des recits confirmants à peu près ce que j'en ay specifié. Je parle de la pluspart; car en une confuse meslée arrivée de nuict, il n'est possible que toutes histoires s'accordent sans varier. Pour la perte des enemiz, qu'on a de la peine à sçavoir ordinairement, Mons.r d'Isselstein, qui a esté de la meslée aveq son regiment, a voulu asseurer aujourdhuy S.A. et le prouve par des indices bien considerables, qu'elle est de plus grand nombre que la nostre. Leurs prisonniers sont pres de quatre-vingt. Aujourdhuy on a eslargi sur sa parole le capitaine de cavallerie Louis CairoGa naar voetnoot1), griefvement blessé par la teste, de sorte qu'à peine estime-on qu'il en reschappe, et M. MorganGa naar voetnoot2), qui a longtemps cognu le pere, l'a obligé de toutes sortes de courtoisies, mesmes a esté cause de son eslargissement. Chose qui deplaist à d'autres, sachants comme ces Espagnols n'ont presque donné quartier à pas un des nostres, mais tout tué ce qu'il[s] ont peu; par où il arrive qu'à ce qu'on dit, ils n'ont que peu de prisonniers. De quoy, peut estre, demain nous aurons plus de cognoissance par un trompette qui en doibt revenir. - Monsieur le comte Henri a raisonnablement bien supporté la longue traicte qu'il a esté obligé de faire dans un brancart depuis son quartier au Polder de Namur, où il a esté pansé pour la seconde fois, ceste apresdisnée, sans que les chirurgiens et medecins puissent juger, comme ils l'avoyent apprehendé, que la foye ayt esté offensé. Mais la bale, qui n'est pas sortie, comme on avoit dit, se cerche encores en vain, et, ce qui donne le plus d'apprehension aux experts, c'est qu'on luy a senti un peu endurcir le ventre, à quoy on tasche de pourveoir et remedier par des frequents lavements. Il n'est pas sans fiebvre, mais Charles, le valet de chambre, que S.A. y avoit encor envoyé ceste apresdisnée, tesmoigne l'avoir trouvé beaucoup plus vigoureux qu'au matin; mesmes il ne ne s'est peu empescher de luy compter toute son avanture, de fort bon sens, et d'une voix forte et claire. Le bas du corps est tousjours chaud, mais il ne le sent gueres, ce qu'on espere encor provenir de ce qu'il a tant esté foulé; car, à son dire mesme, il a couché plus d'une heure le ventre à terre, et trois fois la cavallerie a passé sur luy. Une fois quelque soldat des nostres commença à luy vouloir fouïller les pochettes, et à luy oster son espée, mais il s'y opposa rudement, disant: Ghy, sacramentsche schelm, dat u de duijvel haele; siet ghij niet wat ghy doet; ick sal u strax over den copp houwen. Sur quoy l'autre le recognoissant, ou de seule peur, peut-estre, s'enfuit, et le laissa encor là en ceste miserable posture. Ce recit est de luy mesmes. D'autres y adjoustent, que le coronel StarckenburgGa naar voetnoot3) le voyant par terre, envoya veoir si c'estoit quelque soldat de son regiment, et que celuy qui en approcha le recognut le premier. Devant que Charles partit d'aveq luy, il voulut à force se faire mettre hors du lict, disant n'en pouvoir endurer la chaleur; a aussi de | |
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l'alteration continuelle et boit souvent. Il est à craindre et esperer que dans demain on pourra presque veoir, ce que Dieu voudra faire de ce digne cavalier, que toute l'armée pleure, et tout l'Estat a bien raison de regretter. De ces autres blessez le ritmaistre BolswingGa naar voetnoot1) et le jeusne S.r du MetsGa naar voetnoot2) sont trespassez aujourdhuy, ce dernier en presence de son pere aveq tesmoignages de grande repentance de sa vie passée. Il disna hier aveq nous, et m'entretint unc demie heure aveq des ardeurs estranges pour le combat, qu'il craignoit tousjours qu'on remist à une autre fois. Le S.r Aber CrommieGa naar voetnoot3), capitaine de cavallerie escossois, est mort aussi. Du S.r de Franckenberg on ne doubte plus, sur le deschiffrement qu'un trompette en a faict; le ritmaistre WengheGa naar voetnoot4) ne semble aussi pas en debvoir eschapper. Et pour l'infanterie il y a fort peu d'officiers du regiment de M. le comte Henri qui ayent eschappé la mort ou la blessure, sans compter ceux des deux autres regiments, de Starckenburg et EerentreiterGa naar voetnoot5). Mais de l'infanterie et de la cavallerie on tesmoigne esgalement que l'une et l'autre y a faict des merveilles. Comme a bien faict particulierement M. le jeusne comte GuillaumeGa naar voetnoot6), qui n'y estoit que volontaire, et a eu deux chevaulx tuez soubs luy, et le troisiesme blessé. Les S.rs de VaricarvilleGa naar voetnoot7), de HaucourtGa naar voetnoot8) et de S.t HibarGa naar voetnoot9) y ont aussi tres dignement servi, ce dernier ayant receu quelque legere blessure au bras, mais qui ne l'incommode aucunement. Varicarville a eu son cheval fort blessé. Tout ne seroit que bien, si pouvions sauver nostre unique comte, que Dieu vueille, si c'est pour son bien et le nostre. Au camp au Cuijtaert, le 4e de Juillet 1640. |
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