à vous communiquer, d'une flotte espagnolle de 22 voiles qui s'est descouverte passé quelques jours devers la pointe occidentale de ce royaume, soubs la conduitte d'un grand homme de marine, Don Diego Fasciardo, qui se dit cercher les Hollandoiz et mene des galeons de 1000 à 1200 tonneaux, qui à nostre advis n'est point chose à se moquer, les plus advisez estimants qu'ilz nous viennent occuper la mer boreale, pour ruiner et le traffiq et la pesche, chose estimée bien assez faisable et qui ne respond mal à ce que Mons.r Digbie par ci devant a mandé d'Espagne au Roy, son maistre, qu'on y estoit resolu d'employer cette année le vert et le sec contre les Provinces Unies par mer et par terre. Ce dernier effet n'a paru que trop bien; Dieu nous preserve du premier, que je n'estime moins redontable. En cette cour les mescontentements receuz promettent des resolutions souhaittables, et à present en est on à la chaude deliberation pour ce semble parler clair au bout de cette sepmaine. Mais la Reine Elisabeth est morte et la resouvenance du passé me faict mal opiner, sinon desesperer de l'advenir. Nostre particulier n'avance que tardivement. Hier nous eusmes encor une troisiesme conference avec ceux du Conseil devant le Roy à Hampton Court, mais avec peu de fruit, et si peu que je juge qu'y avons plus destruit que basti, s'y estant regratté des differens que par les arbitrages passez nous soustenons avoir esté pleinement decidez. Mais les advisez ne doibvent rien fonder sur les resolutions de cette cour; on en rejaillist à plaisir et à l'instance du premier venu, qui d'ordinaire y emporte le suffrage. Ne me demandez donc plus, s'il vous plaist, quand nous reviendrons, mais conjecturez avec moy qui ne sçay à quoy regler ma conjecture. Apres cette sepmaine le Roy va s'esloigner de Londres à 50 et 60 miles;
avec ceux de son Conseil nous n'avons jamais achevé un seul point, ni n'en acheverons jamais un seul; quelle sera jamais l'issue de ces affaires? Apres demain nous retournons encor en cour vers le Conseil et, si besoin est, vers le Roy; cela nourrist aucunement mon esperance, mais aussi bien n'y pourra on achever le tout; cela m'accule terriblement, ne voyant où, comment, ni quand aurons moien de reveoir le Roy, sans lequel il est impossible que fassions rien. C'est l'anatomie de noz ennuiz, qui pour tout ne laissent d'estre capables au païs de faire naistre de l'envie et de la medisance sur le subjet de ces longueurs, dans la bouche de ceux mesmes qui taschent de les fomenter sur les esperances que, revenuz re infecta, nous leur lairions du subject d'une leur seconde ambassade. Est il possible, qu'un estat subsiste composé de telles pieces? Ce que je viens de dire toutefois est si asseuré qu'il n'appartient point de m'en faire en aucune part le relateur. Londres, ce 9e d'Octobre 1622.