Primevères(1834)–André van Hasselt– Auteursrechtvrij Vorige Volgende [pagina 187] [p. 187] Sur un tableau d'Eugène Verboeckhoven. Hier darf ein Herz.... Noch eine Welt sich trâumen, frey von Bösen. Salis. Le soir! voici le soir! O! c'est l'heure où, plus douce, La voix du rossignol meurt en son nid de mousse, Où le vent embaumé berce l'épi des champs, Où des chaleurs du jour la nature respire, Où tout rameau frissonne, où tout écho soupire, Où l'ame du poète a des pleurs dans ses chants. Le soir! voici le soir! C'est l'heure du silence, C'est l'heure où la fauvette aux branches se balance, Où l'on se sent à soi lentement revenir, Où de paix et d'amour on s'emplit et s'enivre, Où l'on rentre en son coeur, où l'on s'écoute vivre, Où l'on ne pense plus que pour se souvenir. [pagina 188] [p. 188] Le soir! voici le soir! Au bord de la colline Glisse un dernier rayon du soleil qui décline. Le couchant enflammé, peint de mille couleurs, Jette ses reflets d'or à la cime des roches Où le liseron blanc suspend ses frêles cloches Et d'où l'acacia sème aux brises ses fleurs. C'est le jour qui finit, c'est la nuit qui commence, La nuit qui plis à plis ouvre son voile immense. Le voyageur s'arrête en s'essuyant le front, Et voit la brume au loin qui gravit les montagnes; Et le pâtre revient de ses vertes campagnes, Dont l'ombre ensevelit l'horizon vaste et rond. La nature revêt sa robe de mystère, Et tout va s'endormir, et le ciel et la terre, Hors la feuille tremblante où l'oiseau s'est caché, Et le souffle qui va baisant l'herbe étoilée, Et le fleuve qui tord ses noeuds dans la vallée Comme un boa-géant sur l'arène couché. L'air pur et velouté se remplit d'un grand calme; Et l'on se trouve en soi si serein et si calme Qu'on nomme vanités les choses d'ici bas, Qu'on se sent rafraîchi par une autre atmosphère, Et qu'on se croit, heureux, bien loin de cette sphère, En un monde meilleur où l'on ne souffre pas. Et l'on songe, tranquille et sans savoir où mène La route sombre où va la folle tourbe humaine. [pagina 189] [p. 189] On vit insoucieux d'hier et de demain; Et, deux charmes au coeur, amour et solitude, On endort de ses jours la morne lassitude, Sans voir ce que nos pieds ont fourni de chemin. O! loin de nos cités où l'on marche à la gêne, Voilà bien le vallon que je rêvais, Eugène; Le vallon doux et frais où m'emportaient mes voeux, Où les anges de Moore, exilés en souffrance, Croyaient, du Paradis retrouvant l'espérance, Sentir la main de Dieu passer sur leurs cheveux; Où tant de fois, ployant son aile diaphane, Triste et le front penché comme un lis qui se fane, Ma Muse alla chercher l'oubli de ses regrets. - Mais où donc l'as-tu vu, toi dont la fantaisie Me refait mon Eden avec ta poésie? Mais où donc l'as-tu vu ce vallon doux et frais? Août 1833. Vorige Volgende