Primevères
(1834)–André van Hasselt– Auteursrechtvrij
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I.Ainsi, - dans le désert immense et solitaire,
Où brûle le soleil, où rugit la panthère
Fouillant le sol mouvant,
Où le semoun sans cesse avec ses flots de sable
Heurte du vieux Chéops la tombe impérissable,
A tous les rumbs du vent, -
Le voyageur qui marche, et, sans ployer la tête,
entend toujours plus haut le cri de la tempête
Bruire sur ses pas,
Et ne voit devant lui rien que l'horizon vide,
Et va, le coeur ardent et toujours plus avide,
Et ne s'arrête pas.
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Les poumons haletans et le corps tout en nage,
Le front haut, il poursuit son long pèlerinage
A travers le désert.
La terre sous ses pieds se creuse comme une onde;
Et pour lui la rumeur du Sahara qui gronde,
Est le plus doux concert.
Il va, - que son chemin se déchire et se ride.
Il va, - que la soif râle en sa poitrine aride
Et lui serre le cou.
Il va, - qu'autour de lui circule un air de flamme, -
Tant qu'il ait de ses yeux, comme il l'a dans son ame,
Trouvé sa Temboctou.
Puis enfin la voilà, cité mystérieuse
Où tendit si souvent son aile curieuse,
Dès ses jours printaniers;
Où sa pensée, avec les caravanes maures,
Respira si souvent le frais des sycomores
Et le frais desronniers.
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II.Ainsi, dans le chemin où l'art sacré vous mène,
Peintre aux belles couleurs! l'ouragan se démène
A vous courber le front.
Mais vous marchez toujours avec plus de courage;
Vous allez, vous riant du souffle de l'orage,
D'un pied toujours plus prompt.
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On a beau vous dresser des embûches dans l'ombre,
Le jour a beau s'enfuir de votre ciel plus sombre,
Vous ne trébuchez pas.
Vous allez franchissant et piége et stratagème;
Car vous portez, ami, le flambeau dans vous-même
Dont s'éclairent vos pas,
Et vous savez le but où votre ardeur aspire.
Une Muse d'en haut vous guide, et vous inspire
Tous vos songes dorés.
Et la gloire est an bout de votre route austère.
C'est votre Temboctou lointaine et solitaire.
Et vous la trouverez!
Novembre 1833. |
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