Archives ou correspondance inédite de la maison d'Orange-Nassau (première série). Tome VI 1577-1579

Lettre DCCXXXIII.
La Princesse au Prince d'Orange. Elle se défie des offres de pardon.

Monseigneur. Ier revenent l'un de vos gens de Dordrecht, jé sceu qu'il estoit arivé quelque personnage avec

[p. 87]

⁺lettre des Estats de Brabant, mes d'aultant que je n'ay peu entendre les particularités, et que d'aultre part j'ay esté avertie que Messieurs de Estas de ces païs vous mende ce quy en est, je m'en suis reposée là-desus, combien qu'il me demeure craincte que toutes ces présentacions de pardon, dont le bruict court, soit pour, s'yl leur estoit possible, etmouvoir quelque sédicion pendent vostre absence⁽¹⁾. Vous aurez aussi entendu comme il a esté pourveu à Seinct-Guestrudeberg bien à propos contre le desain de l'ennemy. Toutes ces choses quy surviennent me font croire qu'avec l'affection que j'ay, Monseigneur, d'avoir bien tost cest heur de vous revoir, j'ay double rayson de le désirer pour le bien du païs, que Dieu par sa grâce veille conserver, et vous donne, Monseigneur, en parfaicte sencté, très-heureuse et longue vie. A Delff, ce 22 may, sur les dix heures du matin.

Vostre très humble et très-obéissante fame tant que vivera,

C. de Bourbon.

Monseigneur, l'on m'a faict présent des socices¹ de Brucelles, que je vous envoie, à la charge que n'en men-

+ 1577. Mai.

(1) absence. Le Prince profitoit de ce temps de répit pour visiter les différentes parties de la Hollande. La Princesse lui écrit quelques jours auparavant: ‘Monseigneur, vostre messager de Dillenburg est arrivé ce matin, inssy que vous escript M. Taffin, quy me gardera d'user de reditte, sy non pour vous asseurer qu'à cest heure j'espaire bien de ma sendté, moyennant la grâce de Dieu, que je supplie, Monseigneur, faire prospérer l'occasion de vostre véage et vous ramener bien tost en bonne sencté. Ce 14 may sur les deux heure après midy’ (MS.).

1 sancisses.

[p. 88]

⁺gerés⁽¹⁾ guère et ferés boire les aultres. Je me porte assés bien et votre fille encore mieulx.

⁽²⁾ Monseigneur! Depuis avoir hier receu vos lettres sur le midi, et ensemble celle que m'escript Monsieur de St. Aldegonde, je me suis délibérée de partir incontinent, et pour cest effect j'ay prié à disner aujourd'hui deux des magistrats de chacune ville, espérant, si le vent continue bon, de partir à la marée après minuit. Dieu veuille que je vous puisse trouver en bonne santé.... A Middelburg, ce 22^e de may 1577.

Vostre très humble et très-obéissante fame tant que vivera,

C. de Bourbon.

A Monseigneur le Prince.

+ 1577. Mai.

(1) n'en mangerés. La Princesse se défie de ces présents. Le 17 mars Henri Agylaeus (T.V. p. 452) écrit de Bommel au Prince: ‘Genadige Vorst ende Heer... Aen den Gouverneur der stadt was eerghisteren tydinge gecomen dat U.E. vergeven synde niet beter als doot tot Dordrecht gebrocht waere, ende onder de papen ende monnicken is [nu] sommige dagen mompelinge gewecst U Exc. vergeven te wesen, ende sy hebben daer ofte anders ergens om extraordinaire processiën gehouden. De Almogende Godt wil U. E. tegen allen schelmeryen ende ongevallen goede voorsichticheyt verleenen’ (MS.). Pareil avis fut transmis au Prince déjà en 1575 (T.V. p. 131). Et dans l'automne de 1577 ‘kreeg de Prince advertentie datter in Vrankryk eenige waren omgekocht om hem, het ware met vergif of andersins, om te brengen:’ Bor, 906_a.

(2) Dans le billet suivant, non autographe, mais signé par la Princesse, il doit y avoir erreur de date. Elle seroit arrivée un peu promptement à Middelbourg.