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† Lettre CCLXXI.
Le Prince d'Orange au Roi d'Espagne. Il s'est démis de ses charges et va quitter les Pays-Bas.
Ga naar margenoot+*** M. Kluit Hist. der Holl. Staatsreg. I. 488.) a cru, mais à tort, que le Prince, en se retirant pour des affaires domestiques, n'avoit pas entendu renoncer à ses Gouvernemens. ‘Princeps Auraicensis, offensas nonnullas praetexens, ab administratione omni se abdicaturus et in Germaniam discessurus videtur.’ Vigl. ad Hopp. 418.
Sire!
Il me déplait grandement qu'il convient que je travaille Vostre Maté si souvent par mes lettres, où qu'icelle a tant de grandes occupations: c'est à cause, Sire, de beaucoup de calumpnies et variances qui passent par le monde, signamment en mon endroit, pour lesquelles éviter je tiens Vostre Maté souvenante qu'il y at un an que supliois me pouvoir retirer en ma maison, ce que je n'ay sceu obtenir. Depuis, Sire, comme il a pleu à Vostre Maté me faire escripre que je deusse faire le nouveau serment, expressé en ses lettres, ce que n'ay peu efectuer pour les raisons qu'il aura pleu à Vostre Maté entandre par les miennes précédantes, j'ay mis en mains de son Alteze tous les gouvernemens que j'avois par la bénignité de Vostre Maté pour en user comme elle trouveroit le plus convenir pour le service de Vostre Maté et tranquillité de ses pays. Et pour autant, Sire, que me voiant main- | |
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Ga naar margenoot+tenant desempescé de mes estatz et charges et que la saison est propre de cheminer, me suis bien voulu transporter vers Allemaingne, pour y estre quelque temps et entandre à quelques affaires, tant miens que ceulx de mes frères et soeurs, lesquels ne peuvent plus longuemant soufrir mon absance sans grant préjudice d'iceulx, que me faict suplier Vostre Maté ne vouloir trouver mauvais mon dit partement pour achever mes dit affaires, et estre asseurée qu'en tous lieux où que me trouveray, ne mancqueray jamais à l'obligation et debvoir que je doibs à Vostre Maté, comme sien vassal
et serviteur très humble, et m'estimeray bien heureux d'entandre ce qu'il plairat à icelle me mander, car l'afection que j'ay tousjours porté à Vostre Maté et bien de ses pais, m'est tellement imprimée, que ne délaiszeray mectre corps et biens en tout ce que je cognoistray povoir estre le vray service de Vostre Maté, repos et maintenement de ses pays, et luy demeureray tel par tout où je seray.
Sur ce, Sire, baisant très humblement les mains de Vostre Maté, prieray Dieu la conserver longuemant en très heureuse et bone vie. De Breda, le jour d'apvril 1567.
Il ne restoit plus au Prince qu'à se retirer. Réunir les Gouverneurs et les Chevaliers afin de prendre le fait en main (voyez Tom. II. p. 40); réunir les Etats-Généraux pour défendre les libertés du Pays, (l.l. p. 325); telle avoit été son intention, et les levées en Allemagne étoient probablement destinées à soutenir contre les Espagnols les résolutions de ceux qui avoient qualité pour s'interposer entre la nation et un Souverain irrité. Peut-être songea-t-il quelquefois à user de son influence person- | |
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Ga naar margenoot+nelle pour résister à la force; mais il auroit eu besoin à cet effet de la coöpération du Comte d'Egmont (Voyez Tom. II. p. 323). Durant les derniers mois les actions du Prince semblent avoir eu pour but le rétablissement de la tranquillité du pays, afin que le Roi, à sa venue, ne pût se prévaloir du désordre pour sévir contre les Protestans: mais les nouvelles relatives à la mission du Duc d'Albe, lui ôtoient tout espoir d'obtenir pour les Pays-Bas l'oubli du passé et la tolérance des Chrétiens Evangéliques. Les Confédérés étoient désunis, dissipés; les Calvinistes et les Luthériens plus ennemis que jamais; les Princes Allemands délibéroient sur l'envoi d'une ambassade, et cependant la Gouvernante, après la reddition de Valenciennes, de Maastricht, de Bois le Duc, marchant de succès en succès, parloit et agissoit dans le sentiment d'une superiorité contre laquelle toute
résistance partielle venoit se briser.
Néanmoins le Prince eut quelque temps avant son départ une entrevue remarquable avec des députés des Calvinistes. ‘De Gedeputeerde van der Religie syn eene wyle tydts te voren secretelyk by hem gekomen om raed en advys te hebben wat sy doen souden mogen om hen te beschermen: hy heeft hen dese antwoorde gegeven, so verre sy-luiden als noch den name en tytel van de Confessie van Augsburg wilden gebruiken, datter goede middel was om hen-luiden te beschermen, door middel en hulpe van de Duitse Fursten, maer als sy daer in swarigheit maekten, en seiden dat se 't selve niet en konden doen sonder quetse van haer conscientien, so heeft hy haer noch een ander middel voorgeslagen: namentlyk datse in haeste souden opbrengen vyf of 600000 guldens, om die te gebruiken tot hen-luider bescherminge, daer op sy antwoorden dat se daertoe wel raed wisten, om de selve op te brengen, dan begeerden te weten de middelen hoe en in wat manieren hy hen-luiden dan beschermen soude: den Prince seide dat sulx niet gelegen en was te verklaren, door dien het middel openbaer zynde, hem niet mogelyk en soude syn als dan iets oorboorlyx daermede uit te richten, datse over sulx 't selve mosten stellen tot syn dispositie en discretie: dan en konden daer in niet eens werden.’ Bor, 166.b Il est difficile de conjecturer quelles mesures le Prince avoit en vue;
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Ga naar margenoot+mais il résulte de ce récit que, déjà alors, malgré sa circonspection accoutumée, s'il eût entrevu la moindre possibilité de réussite, il n'eût pas hésité à tout exposer pour prévenir le massacre des pauvres Chrétiens. Mais, humainement parlant, ses tentatives eussent échoué, et l'Eternel réservoit sa vie à des travaux moins infructueux.
Son départ causa une consternation universelle. Des milliers d'habitans plus ou moins compromis dans les troubles, abandonnèrent le pays.
Bréderode partit aussi; la Confédération n'existoit plus. Bor dit à ce sujel; ‘Also hebt gy beminde Leser mogen verstaen hoe dat het verbond der Edelen eensdeels door haer ongestadigheid, tweedracht, lichtvaerdigheid, en eensdeels door de listigheid der Gouvernante en haren Raed te niet is gegaen.’ I. 176b.
La Gouvernante avoit entièrement réduit les Pays-Bas sous l'obéissance du Roi. ‘Nulla per Belgium urbs oppidumve nullum, nulla uspiam arx aut pagus fuit, qui, certatim ejectis haeresum magistris ac seditionum incentoribus, non sese Regis arbitrio clementiaeque tradiderit.’ Strada, p. 333. Elle s'en glorifia avec raison. ‘Exposuit qua ratione turbas duobus postremis annis excitatas ante Aprilis exitum ita composuerit, ut Belgium universum ad obedientiam Regi debitam redegerit.’ l.l. 364. Il ne s'agissoit plus de rétablir l'ordre, mais de le conserver; c'est à quoi un peu de clémence eut suffi, même en maintenant un catholicisme exclusif. Pour susciter une opposition nouvelle il falloit le Duc d'Albe et un régime de sang. Hopper, auquel la séverité du Duc étoit connue, prévoyoit ce résultat. ‘Albanus brevi iter videtur ingressurus, nec multo post Rex, si nobis credet, subsecuturus. Ostendimus enim omnibus rationibus non modò infructuosam, sed omni periculo plenam fore Ducis profectionem, nisi id fiat.’ Epist. ad Vigl., p. 115. Ce qu'il prévoyoit, chacun l'avoua plus tard. ‘Albani perseveram invisamque Belgis administrationem ... fuisse belli occasionem principiumque non abnuerim.’ Strada, 369. |
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