Archives ou correspondance inédite de la maison d'Orange-Nassau (première série). Tome II 1566
(1835)–G. Groen van Prinsterer– Auteursrechtvrij
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Lettre CXLVII.
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Ga naar margenoot+sés aux deputés de la Noblesse pour nostre quartier, lesquels nous ont esté denommés à ces fins pour estre de par eux aidés et conseillés, quand le besoin le requerra. Ce que aussi nous avons fait, nous adressans et recourans à eux, comme à nos deffenseurs et conseillers, au cas advenant qu'on procéda envers nous durant la surséance, autrement que la relation nous en a esté faicte; car si on ne nous eut promis, et pour chose toute certaine et asseurée, que les Magistrats n'avoyent aucune puissance de nous rechercher, en façon qui soit, pourveu que nous nous tinssions coy et couvert comme auparavant, ce que aussi nous avons fait, nous n'eussions point eu d'occasion de nous plaindre, parceque ceux qui maintenant sont emprisonnés, ne le seroyent pas. Mais quant nous voyons que contre l'asseurance qu'on nous a donné, on procède à toute rigueur, autant que jamais, contre nous, c'est tout le moins ce me semble que nous pouvons faire, que de nous plaindre, puisque mieux nous ne pouvons avoir. Que pleut à Dieu que la relation que j'ay fait au peuple de la part de la Noblesse, ayant charge d'icelle, fut encores en m'aGa naar voetnoot1 car je ne seroyt point taxé comme je suis d'avoir abreuvé et repeu le peuple de mensonges, et que ceux qui sont prisonniers ne le seroyent pas. Car de fait estant délibéré de partir, craignans de tomber entre les mains de leurs ennemis comme ils sont, on leur fit savoir qu'ils ne bougeassent, ains qu'ils se tinssent couvertement ches eux, et qu'on ne pouvoit autrement procéder contre eux, jusqu'a ce qu'autrement en fust ordonné. Lequel conseil a esté cause, hors mis la providence de Dieu, de leur emprisonnement | |
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Ga naar margenoot+et de tout ce qu'ils souffrent et endurent, qui nous devroit autant ou plus toucher qu'à eux. Car veu que nostre cause et la leure est commune, et que pour la foy laquelle nous voulons maintenir, ils sont prisonniers, à fin de rendre tesmoignage à icelle, nous nous devons aussi employer de tout nostre pouvoir pour eux, comme nous voudrions qu'on fist pour nous, si nous estions en leur place. Et pour tant, Monsieur, je vous supplie autant que vous aimez le Seigneur et par la charité de nostre Seigneur Jésus, laquelle nous devons exercer les uns envers les autres, que si vous pouvez quelque chose en cest endroit et avecq vous tous vos amis et associez, que le facies maintenant, en quoy faisant, nous prierons le Seigneur de vous maintenir en sa garde et protection, par laquelle vous soyés préservés de tous dangers. Au reste touchant de l'apostille à laquelle vous me renvoyés, pour entendre le contenu d'icelle. Que pleut à Dieu que les officiers de Madame ne passassent point tout outre d'icelle comme ils font, ains se contentassent de garder et observer ce qui y est contenu sans transgresser et cracher siGa naar voetnoot1Ga naar voetnoot2 ceste apostille et contre ceux qui osent parler de ce qu'ils font, car si ceci n'est cracher tant contre ce que Madame promets en l'apostille et contrevenir directement à ce qui y est contenu, je ne scay que c'est. Assavoir que le jour de Pasques dernier, en un sermon qui fut fait en la grande Eglise de nostre dame, fut tenu tels et semblables propos par celuy qui preschoit, qu'en despit du Roy et de la Noblesse il n'y auroit autre Evangile presché que celuy qu'il adnonçoit, et qu'il faudroit bien que le Roy cria mercy au Pape, s'il aidoit ou | |
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Ga naar margenoot+favorisoit à la Noblesse. Après, le 7e de ce mois de May, fut joué un jeu aux Jésuites de ceste ville, lequel contenait en somme que ce pauvre homme qui est prisonnier ici, estoit damné, ensamble avec luy tous ceux qui ont présenté la suplication de la part de la Noblesse et principalement Mr de Bréderode, comme chef et capitaine d'iceux. Outre plus les Officiers de l'Evesque ont demandé ceste sepmaine assistance à Messieurs de la ville, pour avoir prinse de corps sur un homme, pour ce qu'il ne veut nullement confesser ni croire que son fils, lequel on a exécuté et bruslé en ceste ville pour la parole de Dieu, soit damné. Tellement que le pauvre homme en est venu jusques à là, ou qu'il faut nécessairement qu'il s'absente d'ici, ou bien qu'il confesse une chose tant estrange et monstrueuse, ou qu'il soit griefvement puni. Et encores n'est ce pas tout, car lundi dernier il y eut une pauvre jeune fille constituée prisonnière, laquelle nous avons retirés des bourdeaux et lieux infâmes, seulement pour n'avoir point voulu aller à confesse et apporter lettre du Curé de la paroisse en laquelle elle faisoit sa résidence. Or je vous laisse penser maintenant, quand le peuple oit et voit toutes ces choses, s'il n'a point bien juste matière de se plaindre et par conséquent de se fâcher, car on dit en commun proverbe, que tant on vient à moucher le nez, qu'il seigne. Qui me fait craindre qu'en la fin, synon qu'on tasche d'y pourveoir, que la patience d'icelluy, de laquelle on abuse tant vilainement, se pourra bien tourner en fureur et rage. Car est ce là, Monsieur, la promesse contenn en l'apostille, par laquelle on nous promet qu'elle mettra si bon ordre entre les officiers, qu'aucun n'aura occasion de se plaindre? Brief si je | |
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Ga naar margenoot+vous voulois discourir tout ce qui se fait contre la promesse de Madame, mentionnée en l'apostille, je n'auroye jamais fait. Qui sera l'endroit où après m'avoir recommandé à vostre bonne gràce, je prieray le Seigneur de combler vos saints et vertueux désirs. De Tournay ce 16me de May 1566.
Vostre serviteur et amy,Ga naar voetnoot(1)
Monsieur, Monsieur de Hames
Le projet de modération, bien qu'il apportât un adoucissement réel aux Placarts, n'étoit pas en harmonie avec les espérances qu'on avoit conçues, ni avec les principes de tolérance Evangélique dont beaucoup de protestans croyoient pouvoir exiger l'application. On desiroit la liberté du culte public, et bientôt, afin de l'obtenir, on commença par s'en emparer. Il y eut des endroits où ce fut une espèce de tactique et de calcul- C'est ce que Fr. Junius fait connoître par rapport à Anvers. ‘Cum novae leges cuderentur, specioso Moderationis nomine exornandae, quae tamen nihil de atrocitate plane nisi in speciem remittebant, tum gravissimo piorum adeoque Ecclesiarum universe periculo cognito, et conventibus aliquot exspenso (quibus etiam bis per illud tempus Antverpiae Philippus Marnixius S. Aldegondius interfuit) visum est necessarium ad praevertenda graviora Ecclesiarum incommoda, ut, quemadmodum Flandri jam diu fecerant, ita nos publice Ecclesiam colligeremus concionesque in propatulo haberemus, cum | |
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Ga naar margenoot+Antverpiae, tum ubicunque futura esset colligendarum Ecclesiarum per Evangelium Christi commoditas.’ Vita, p. 245. ‘L'on crut artificieusement,’ dit le Cardinal Bentivoglio, p. 106 (ed. de Paris, 1669,) ‘que par ce moyen la nécessité devoit d'autant plus induire le Roi à consentir aux demandes que l'on avoit faites.’ |
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