Archives ou correspondance inédite de la maison d'Orange-Nassau (première série). Tome I 1552-1565
(1841)–G. Groen van Prinsterer– Auteursrechtvrij† Lettre LXXXIIIa.
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Ga naar margenoot+il mén desplait plus pour eulx que pour moy, et vous asseure que, cognoissant en eulx ce que je y cognois, sur ma foy, je me soucieroys peu et d'eulx et de leur marrissement, voyant plus loing que peult-estre ils ne font, sy je n'avois plus de considération au service du maistre et au bien du pays, qu'à eulx ny chose qu'ils penssent; et sy, à mon retour, ils ne veullent plus entrer au Conseil, bien leur en convienne; il ne s'y perdroit peult-estre pas tant, comme ils vouldroient bien donner à entendre, et tiens qu'ilz prendront meilleur advis, et que, quoy qu'ils dient, ils entendent mieulx la faulte qu'ils firent de s'en mettre dehors de leur voulonté et auctorité, attendu leurs prétentions; car ce n'est le chemin pour les soustenir, et, sy sa M. estoit contente que, retournant là, je n'entrasse au Conseil, je m'en passeroys, et voulontiers, aux termes que l'on y est, et ay moyen de m'employer là en aultres choses pour le service de Dieu et de sa M.; mais, sy l'on me commande que je y entre, j'en feray comme du passé, et en advienne ce que pourra advenir. Il est encores à mon advis trop tempreGa naar voetnoot1. pour bien juger ce que ce sera de leur voulonté et union: d'icy à là, ilz auront avant mon retour, que ne sera, à mon compte, plus tost que d'icy à deux mois, partant au commencement de juing, je dis ung ou dix joursGa naar voetnoot2 dedans le mois pour mon voyage, querelles et plainctes contre plus de deux, et pense bien que Monsr de Barlaymont et Monsr le Président n'y seront oblyez, et peult-estre ny Madame mesme. Je les attends aux premières lettres que viendront d'Espaigne, à la venue de l'Ambassadeur nouveaul pour Angleterre, et à la correspondence au Sei- | |
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Ga naar margenoot+gneur don Frances d'Alava en France et aultres ministres, et, à mon retour, je les laisseray respondre de ce que pendant mon absence se sera fait, et jusques à la venue du maistre fais bien compte de m'envelopper aux choses le moings que je pourray, mais, venant luy, chascun lors parlera et verra l'on quy aura mieulx faict. Il y-a long temps que l'on est après pour donner à entendre aux villes et aultres ce que vous dictes, et à plusieurs de la Noblesse aussy, que je tasche de les soubmettre aux Espaignols, qu'est faulx et n'y pensay oncques, ny eusse choisy ma retraicte par delà, sy je pensoys que cela eust dehuGa naar voetnoot1 advenir, comme souvent je leur ay dict en plein Conseil, et qu'il n'y a quy que ce soit d'eulx quy plus hardiement et résoluement que moy voulust employer sa personne et sa vie pour le soustenement de la liberté et privilèges du pays, mais non pas pour extendre la Joyeuse-Entrée contre raison, au préjudice de l'auctorité du maistre, pour corrompre et perdre la justice, et consentir à ce que Brabant et, soubs Brabant, les aultres pays soient tirannisés d'aulcuns qu'ont leurs fins et desseins peultestre bien différent de ce que les Seigneurs entendent; car je veux croyre d'eulx qu'ils ne les pourteroientGa naar voetnoot2 en ce, comme ils font, car ce seroit contre leur debvoir; et je diray bien, quand besoing sera, ce que j'en attends, et que j'aimeroys mieulx que mon Prince me tirannisa ung petit que non que, se perdant son auctorité, plusieurs nous tirannisassent et les Pays, que seroit bien avoir perdu les privilèges et la liberté, pour laquelle je perdroys la vie, et oster la justice, sans laquelle les moindres seront proye des grands, et ceulx qui ont rentes et | |
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Ga naar margenoot+biens, en proye de ceulx qui pourroient plus. Je sçay bien que ce que je débattisGa naar voetnoot(1) lors que nous estions devant Metz, au temps de l'Empereur, contre ceulx qui prétendoient entretenir ung tertio ordinaire d'Espaignols, jusques à xii mil aux Pays-Bas, et j'en heus lors le maulvais grey, que je dissimulay, de quy depuis a cogneu que j'avoys raison de soustenir le contraire, et velà comme je veulx leur soubmettre les pays; et quand ils eurent irrité sa Mat par les termes qu'ils usèrent pour deschasser ceulx que sa Mat y laissa au partement, quand ils n'y pouvoient plus tordre cheville, qui trouva les expédiens pour donner la commodité pour les embarquer, quy fit les lettres pour y persuader le Roy? mais cela s'oblye, comme le service que j'ay faict traictant la paix, et sy sçet bien le Prince, s'il s'en veult souvenir, ce que je y fis et diray davantage que, comme les termes qu'ilz usarent à l'endroit du Roy à Gand pour le contraindre (je diray ainsy) de oster les Espaignols, me semblarent fort mal: aussy ne fut le chemin que print Erasso pous les y faire demeurer, à mon jugement, ny bon, ny convenable, ny aussy qu'ils y demeurassent contre le gré des pays, oyres qu'ils n'estoient en nombre pour forcer icelluy, et sy se descharg[eoient] les pays d'austant de frais pour les garnisons, et repartiz en divers lieux, l'on les eust faict vivre sans foule, et mesmes estant la charge d'iceulx donnée aux deux Seigneurs, quy n'entendirent oncques ce que cela emportait, ny le bénéfice que eulx en leur particulier et les Pays en eussent peu recepvoir, et, s'ils l'entendirent, ce fut quand jà ils ne pouroient aller en arrière. Je sçay | |
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Ga naar margenoot+ce que je dis, et, pour ce qu'ils dient que je les veulx 1564. soubmettre aux Espagnols, je vouldroys qu'ilz me dissent quy j'ay avancé en charges du pays de la dite nation; il ne s'en trouvera ung seul, mais ils se sonviendront quy, au temps du Duc de Savoye, avança RoblesGa naar voetnoot(1) et je sçay pourquoy, et Mondragon a esté nommé en sa charge par Mr d'Aigmont, et le Comte de Mansfelt, que se peult bien dire estrangierGa naar voetnoot(2), largement plus que moy, qui suis moy et les miens, vassal et subject de sa Mat; j'adjousteray que sçay fort bien que l'on m'a voulu imputer que plusieurs ont été pourveus de charge au gouvernement du marquis de Berghes, aultres que ceulx qu'il avoit nommés, pour ce que ceulx qu'il nommoit ne se trouvoient sy qualifiés pour le service du maistre tant que ceulx que l'on y a pourveu, ores que ceulx qu'il nommoit fussent plus à son propos; mais je suis esté sy modeste que j'ay souffert ce qu'on en a voulu dire; combien que j'eusse bien peu déclarer que ceulx quy, au lieu de ceulx que le marquis de Bergues vouloit, sont esté pourvuz, sont été nommez par aultres des Seigneurs qui recommandoient le secret, pour non avoir le maulvais gré, et peult-estre pour non préjudicier à leur ligue et intelligence, et je leur ay voulu pourter ce respect que de non le déclarer, ce que j'eusse fort bien sceu et peu faire, sy je les eusse voulu mettre en picque, mais j'ay passé et | |
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Ga naar margenoot+coulé le tout doulcement sans faire bruyt, et sy entendoys toutesfois assez que j'en auroys peu de grey, et eusse ung vindicatif bien peu rendre la change et aultres aux termes que l'on m'a tenu; mais Dieu est par dessus, à quy il fault remettre le tout, quy sçaura bien payer chascun avec le temps selon ses mérites, et ne seront les saisons tousjours d'une sorte. J'espère qu'Il m'aydera, et fault procurer de tirer profit de ce en quoy les adversaires procurent faire dommage; vélà ma philosophie, et procurer avec tout cela de vivre le plus joyeusement que l'on peut, et se rire du monde, des appassionnez, et de ce qu'ilz dient sans fondement..... Besançon, 18 avril 1564. |
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