tèrent sauvagement au milieu de nous. Nous chantions toujours ce chant de volcan qui gronde. Les musiciens se débandèrent; des hommes furent foulés sous les chevaux, des cris de douleur s'élevaient. Comme dispersée par l'ouragan, la foule tourbillonnait sur la place.
Eitel me souleva d'un bras par la moitié du corps et m'appliqua l'autre main sur la bouche, parce que je continuais à chanter par bravade. Il monta quatre à quatre les perrons d'une des grandes maisons de la place et me déposa au fond d'une salle d'estaminet à faro.
Une heure après, la place était vide. Nous rentrâmes en nous querellant.
- Je t'ai suivie pour te sauver, je sentais que tu te serais laissé tuer au milieu de cette populace. Toi qui as peur des foules, quand c'est la populace qui se soulève, tu changes... tu es avec eux.
- Ce n'était pas de la populace, c'étaient des ouvriers: celui à qui je donnais le bras sentait le cuir.
- Oh oui! ils sentent bon!... tu es indécrassable, je l'ai vu ce soir.
- Et toi donc qui, l'autre jour, as ôté ton chapeau pour cette pitrerie religieuse... c'est bien pis.
Et, cessant de le tutoyer: